Le document soumis à notre commentaire est extrait d'un arrêt de la Cour internationale de Justice (CIJ) en date du 27 juin 1986 intitulé : « Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci ». Cet arrêt fait suite au différend intervenu entre le Nicaragua et les Etats-Unis. En voici le cadre : De 1956 à 1979 le Nicaragua vit sous la domination du clan Somoza que les Etats-Unis soutiennent. En 1978 l'opposition rassemblée dans le Front sandiniste, déclenche l'insurrection. Le dernier Somoza de la famille abandonne alors le pouvoir en 1979. Les Sandinistes prennent alors peu à peu le pouvoir en s'appuyant sur Cuba et l'URSS. Un mouvement contre révolutionnaire y fait alors face, le mouvement « Contra ». En 1983 les Etats-Unis voyant d'un mauvais œil la constitution du pôle révolutionnaire des Sandinistes décide de soutenir financièrement et militairement les contre-révolutionnaires (« Contras »). Le Nicaragua soulève alors la violation par les Etats-Unis de principes fondamentaux du droit international tel que l'interdiction de l'emploi de la force dans les relations internationales et de toute ingérence dans les affaires d'un autre pays.
Ainsi, afin d'être en mesure de statuer sur ce conflit, la Cour doit pouvoir identifier les règles du droit international coutumier relatives au non-recours à la force et à la non-intervention. L'article 38 du statut de la CIJ évoquant les différentes sources du droit international dont la coutume, définie celle-ci comme « preuve d'une pratique générale, acceptée comme étant de droit ». Reflétant ainsi la pratique de l'ensemble des Etats de la société internationale, elle fait partie du droit international général (droit composé des normes applicables à l'ensemble des sujets de l'ordre juridique international).Une fois ces règles établies la Cour sera en mesure de les appliquer au présent différent. Quels éléments la CIJ prend elle alors en compte afin d'identifier les règles du droit international coutumier ? La pratique de ces règles est-elle strictement établie ?
L'analyse de l'extrait de l'arrêt de la CIJ qui nous est ici soumis nous permet de répondre à ces différentes interrogations. En effet si la constitution d'une règle coutumière répond à de strictes exigences (I), nous verrons en quoi son application se révèle nettement moins rigoureuse (II).
[...] Au contraire c'est de cette pratique adaptée ou même détournée qu'en ressort la reconnaissance si ce n'est la confirmation de leur existence. [...]
[...] Il suffit qu'ils adaptent leur comportement de manière générale pour déduire l'établissement d'une règle coutumière. Ces propos précisent donc l'exigence de l'élément matériel à la constitution d'une règle coutumière. Par contre on ne peut parler d'une atténuation ou d'une limite posée à cet élément. Il est toujours strictement requis dans l'identification d'une règle coutumière mais cette identification peut-être établie au travers d'une pratique adaptée à la règle en question selon les énonciations de la Cour. Ainsi elle n'exige pas toujours une pratique unanime. [...]
[...] Mais la Cour semble aller bien plus loin qu'admettre une pratique adaptée en effet elle reconnaît la possible méconnaissance de ces règles et conforte ainsi l'idée d'une pratique imparfaite. En outre elle y attache des conséquences bien spécifiques. La confirmation d'une règle coutumière par sa méconnaissance : La Cour en convient : Il ne faut pas s'attendre à ce que l'application des règles en question soit parfaite dans la pratique étatique Elle admet la possible déviance des Etats par rapport au respect des règles en question. [...]
[...] En effet la formation de la coutume s'appuie sur l'ensemble de comportements des sujets de droit international qui peuvent se traduire de multiples façons : accumulation et répétition de certains faits, actes juridiques, déclarations et attitudes diverses. En effet il ne naît de pratique correspondant à un sentiment d'obligation, qu'avec la répétition de cette pratique. Ainsi la Cour place cet élément matériel au devant de la formation du droit international coutumier comme elle l'a déclaré récemment au travers de l'arrêt : Plateau continental Jamahiriya arabe libyenne/Malte dont les énonciations sont ici brièvement rappelées : La substance du droit international coutumier doit être recherché en premier lieu dans la pratique effective des Etats Par ailleurs elle confirme la plénitude de cet élément constitutif en soulignant eu égard à l'article 38 de son statut qu'elle ne peut ignorer le rôle essentiel d'une pratique générale Elle prend alors l'exemple de deux sujets de droit international qui conviendraient à eux seuls du contenu de ce qu'ils considèrent comme une règle. [...]
[...] En l'espèce la Cour, dont la compétence porte sur l'identification et l'application des règles coutumières relatives au non-recours à la force et à la non-intervention, reconnaît ici l'existence d'un comportement démontrant le sentiment d'agir suivant une obligation juridique pour les parties. Pour cela elle fait état des reconnaissances par les Parties de la validité de ces règles en droit international coutumier et place ces reconnaissances au-delà du fait que les Parties soient liées par ces règles sur le plan conventionnel. On voit là toute la prééminence de la disposition psychologique des sujets de droit sur l'existence d'actes juridiques. [...]
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