Règlement Bruxelles I, droit international privé, exequatur, condamnation, réparation de dommages, jugement américain, juge français, contrôle de la régularité, jugement étranger, force exécutoire, décision espagnole, champ d'application, tribunaux français, condamnation en réparation
Pierre Fournier, de nationalité française, et Friedrich Guida, de nationalité américaine, mariés en 2013 à New York, vivent entre New York et Paris. Esthète et violoniste amateur, Friedrich collectionne les violons de lutherie française réputés pour leur sonorité claire et envoûtante, particulièrement appréciée dans la musique de chambre de Saint-Saëns ou de Fauré. Il remporte aux enchères chez Christie's New York en 2016 un splendide Vuillaume de 1858 pour la somme de 18 000 $ et décide de le faire restaurer chez Étienne Vatelot, luthier installé rue de Rome à Paris. Malencontreusement, le luthier installe une âme au violon (petite pièce de bois à l'intérieur de la caisse de résonance) en bois d'érable et non en épicéa comme convenu. Après quelques heures de mise sous tension, le bois de l'âme éclate et perce la caisse de résonance, rendant le violon inutilisable. Furieux, Friedrich récupère l'instrument aux États-Unis et le fait entièrement réparer par Matthew Rubendall pour 9 000 $. Décidé à obtenir réparation, Friedrich saisit la Cour Suprême de New York, qui condamne l'atelier Vatelot au paiement de la remise en état du violon, soit 9 000 $, des frais d'avocat de 4 000 $, ainsi que des dommages-intérêts punitifs à hauteur de 19 000 $. En qualité d'avocat français, vous êtes consulté par Friedrich afin de savoir s'il peut obtenir l'exequatur de la décision américaine en France.
[...] L'action en exequatur d'une condamnation en réparation prononcée aux États-Unis Pour aller plus loin, il faut également vérifier les règles classiques de procédure française, à savoir : la qualité pour agir et l'intérêt pour agir qui doit être né, actuel et légitime. En l'espèce toutes les conditions semblent être remplies. Dès lors, Friedrich pourra agir devant les tribunaux français afin d'obtenir l'exécution de la décision américaine. Cas 2 : Quant au Règlement Bruxelles 1 bis Applicabilité du règlement Il fallait en premier lieu se poser la question de l'applicabilité du Règlement du 21 avril 2004 portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées. Pour que ce règlement soit applicable, trois champs d'application sont à respecter. [...]
[...] La preuve de cette ignorance pourrait donc permettre au juge de refuser l'exécution de cette décision. En outre, le Règlement confère une compétence exclusive concernant l'exécution aux juridictions de l'État membre du lieu de l'exécution. En l'espèce le débiteur est français et l'on suppose que ses comptes sont domiciliés en France. Par conséquent le juge français peut refuser l'exécution de la décision espagnole également sur ce principe. En conséquence, il sera possible pour Pierre de faire échec à la saisie de ses comptes bancaires. [...]
[...] De ce fait, le champ d'application temporel est respecté. Loci : le règlement s'applique aux effets, dans État membre, des décisions judiciaires rendues dans un autre État membre. En l'espèce le but recherché et de faire produite en France une décision rendue en Espagne. Materiae : l'acte en question doit être un acte juridictionnel ou un des actes non juridictionnels visé dans le Règlement, rendu en matière civile et commerciale. En l'espèce, il s'agit d'un jugement de condamnation en paiement d'une créance commerciale. [...]
[...] L'exécution d'une décision étrangère est un problème de compétence internationale indirecte. Il s'agit de savoir s'il est possible d'obtenir les effets de la puissance publique pour parvenir à une exécution forcée de la décision. Or, pour cela, il existe une procédure spécifique. Il faut de suite écarter l'application du Règlement Bruxelles 1 bis puisque la décision n'a pas été rendue par une juridiction d'un état membre, mais aux États-Unis. Il faut donc se tourner vers le droit commun de la compétence internationale directe. [...]
[...] De plus, l'article 40 B1bis ajoute qu'une décision exécutoire emporte de plein droit l'autorisation de procéder aux mesures conservatoires prévues par la loi de l'État membre requis. En l'espèce la décision rendue est exécutoire en Espagne et jouit donc également de la force exécutoire en France, la saisie des comptes ne peut donc normalement pas être empêchée. Cependant, concernant l'exécution l'article 46 du Règlement prévoit qu'à la demande de la personne contre laquelle l'exécution est demandée, l'exécution d'une décision est refusée lorsque l'existence de l'un des motifs visés à l'article 45 est constatée. [...]
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