Tribunal arbitral, compétence du Tribunal, objections, arbitrage, investissement, arbitrage des investissements, CIRDI Centre International de Règlement des Différends relatifs aux Investissements
Monsieur le Président, mesdames et messieurs,
La République fédérale du Nigéria est attraite aujourd'hui devant votre tribunal par l'entreprise de droit marocain Alttaqua'Akhdir en vertu d'un prétendu consentement donné par l'État nigérian à l'arbitrage devant un tribunal CIRDI.
L'État nigérian soutient le contraire, et réclame dans cette phase préliminaire du procès que le tribunal arbitral saisi déclare son incompétence, tant pour les « treaty claims » que le « contract claim » introduit devant votre tribunal par le demandeur.
Avant de rentrer dans le détail, il est nécessaire de préciser la nature des allégations et leurs effets sur l'appréciation de la compétence du tribunal. Une première catégorie constitue les « treaty claims », comme son nom l'indique, les allégations portent sur la violation par l'État des obligations résultant du TBI. Vu que les obligations résultent du TBI, c'est aux dispositions du TBI qu'il faut se référer pour établir la compétence. La seconde catégorie de faits reprochés constitue les « contract claims » qui se réfèrent aux violations du contrat et dont la compétence du tribunal saura être appréciée en vertu de la clause compromissoire prévue dans le contrat.
[...] La notion d'investissement et la compétence matérielle du tribunal Nous concédons à la partie demanderesse que les critères d'apport et de durée prévus à l'article 1.3 du TBI sont bien remplis. Néanmoins, l'État nigérian n'est pas persuadé que le demandeur ait véritablement prouvé l'existence d'un risque dans cette opération qu'il qualifie d'investissement. Certes, le traité ne définit pas le « risque », mais il parait raisonnable de l'apercevoir par analogie au risque opérationnel du test salinien que le succès ou l'échec de l'opération soit incertain (Postova Banka, A.S. [...]
[...] Et c'est ainsi que selon la lecture donnée du critère du « risque », le risque souverain de l'espèce ne permet pas de qualifier l'investissement (Postova Banka, préc. §369-370). Au-delà du critère du « risque », encore faut-il remplir d'autres exigences identifiées dans l'article 1.3 du TBI Nigéria-Maroc et que nous analyserons individuellement : D'abord, l'entreprise ne doit pas être simplement établie, mais aussi opérée en conformité avec les lois de l'État nigérian. À la lecture du critère, il ressort clairement que les États signataires du TBI ont inséré une clause de légalité de l'investissement qui s'applique certes dans la phase d'admission de l'investissement, mais dont l'application est aussi post-admission. [...]
[...] Ainsi, la lecture que l'État nigérian propose au tribunal c'est une contribution in concreto (quels sont les effets concrets de l'activité du demandeur ?), et non pas in abstracto. Le triste constat que nous faisons devant vous c'est que concrètement, l'activité du demandeur ne fait que mettre en péril le développement durable du Nigéria. En dernier, et pour reprendre le questionnement du tribunal arbitral de l'affaire Abaclat c. Argentine (§364) : est-ce que c'est cet investissement que les États signataires ont voulu protéger dans le TBI Nigéria-Maroc ? [...]
[...] Nous attirons l'attention du tribunal que la prétendue violation du contrat ne peut pas entrer dans le champ du treaty claim, pour les raisons suivantes. Monsieur le président, mesdames et messieurs les arbitres, ce n'est pas parce que figure le « any dispute » que l'État nigérian aurait consenti une compétence matérielle universelle. S'il n'y a pas de clause de couverture dans le TBI, c'est que les États ont implicitement et volontairement exclu les contract claims du champ d'application des articles 26 et 27. [...]
[...] Concernant la compétence personnelle, nous invitons le tribunal arbitral à faire attention aux parties au contrat qui contient la clause compromissoire. En effet, le demandeur, certes actionnaire de la partie contractante, n'est pas bénéficiaire de la clause compromissoire et celui-ci ne peut introduire qu'un treaty claim, qui a été précédemment exclu, et non pas le présent contract claim (Paushok c. Mongolia, sentence du 28 avril 2011, § 202). Concernant la compétence matérielle, nous invitons également le tribunal arbitral à faire attention à la rédaction de la clause, qui saurait être interprétée comme une clause de fork in the road, et comme son nom l'indique, l'option est sans retour possible. [...]
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