droit de rétention, dessaisissement volontaire, créancier rétenteur, article 2286 du Code civil, article 2255 du Code civil, débiteur, procédure collective, article L 642-20-1 du Code de commerce, droit de rétention immobilier, liquidation judiciaire
Par un arrêt du 30 janvier 2019, la chambre commerciale de la Cour de cassation apporte des précisions quant à la détention par un tiers d'un bien faisant l'objet d'un droit de rétention, en particulier lorsque le débiteur du prix de vente de ce bienfait l'objet d'une procédure collective.
Une société a vendu un immeuble à des époux, immeuble destiné à loger leur fille. Par la suite, la vente a été annulée pour dol par un jugement qui a ordonné la restitution du prix de vente aux acquéreurs et condamné la société venderesse à des dommages et intérêts. Or, cette dernière ayant été mise en liquidation judiciaire, les acquéreurs ont dû, pour obtenir la restitution du prix de vente de l'immeuble, déclarer leur créance qui a été admise par une ordonnance du juge-commissaire.
[...] Pour rejeter l'argumentation du liquidateur, la Cour de cassation retient que la libération de l'immeuble faisant l'objet du droit de rétention par l'occupante n'est pas une condition préalable à la saisine du juge-commissaire pour voir autoriser la vente du bien. Cette solution découle de toute évidence du revirement opéré par la Haute Juridiction. En effet, dans l'arrêt précédemment cité du 23 octobre 2002, la Cour de cassation avait considéré que le droit de rétention ayant pour objet un immeuble était inopposable au liquidateur et à la procédure collective. [...]
[...] Toutefois, la Cour de cassation a rejeté cette argumentation en considérant que les « titulaires d'un droit de rétention sur l'immeuble, ne se sont pas dessaisis de la détention de ce bien, occupé de leur chef et pour leur compte, par leur fille, en vertu d'une convention écrite, dont la qualification adoptée par les parties et le notaire instrumentaire importe peu ». La Cour ne fait donc pas de la qualification de la convention, en vertu de laquelle le détenteur effectif occupe les lieux pour le compte du rétenteur, un élément essentiel pouvant mettre en échec le droit de rétention. [...]
[...] Une appréciation de la notion de dessaisissement volontaire favorable au créancier rétenteur Dans cet arrêt du 30 janvier 2019, la Cour de cassation affirme que le droit de rétention peut subsister en l'absence de détention physique personnelle du bien retenu par le créancier rétenteur À cette occasion, elle subordonne la validité d'une détention corpore alieno à l'existence d'une convention écrite entre le créancier rétenteur et le détenteur effectif du bien, dont la qualification importe peu La persistance du droit de rétention en l'absence de détention physique personnelle par le créancier rétenteur Pour qu'un créancier puisse exercer un droit de rétention, il est nécessaire d'établir un lien de connexité entre la détention de la chose et la créance. L'article 2286 du Code civil envisage trois liens de connexité et notamment un lien de connexité juridique. Ce lien permet de conférer un droit de rétention au créancier dont la créance est issue d'un contrat qui l'oblige à remettre une chose. En l'espèce, la créance des époux est issue d'un contrat de vente, en particulier de son annulation. [...]
[...] Une qualification erronée d'une telle convention, comme c'est le cas en espèce, ne permet pas de retenir l'existence d'un dessaisissement volontaire. Cette appréciation de la convention écrite donnée par les acquéreurs à leur fille est nécessairement protectrice du créancier rétenteur. Ce dernier conserve ainsi son droit de rétention en l'absence de détention physique personnelle, et ce, même si la qualification de la convention permettant la détention effective par un tiers est erronée. En tout état de cause, on pourrait considérer que la raison pour laquelle la qualification d'une telle convention est indifférente se trouve dans l'article 2255 du Code civil qui prévoit le cas de la possession dite corpore alieno. [...]
[...] En outre, l'arrêt du 30 janvier 2019 démontre que cette évolution se couple de l'octroi de prérogatives toujours plus importantes au créancier rétenteur. Toutefois, s'il est aujourd'hui admis par la Cour de cassation que le droit de rétention est un « droit réel opposable à tous et même aux tiers non tenus de la dette », celle-ci refuse de lui reconnaître la nature de sûreté personnelle (par exemple, Cass. Com mai 1997, n°95-11.915). On pourrait toutefois remettre en cause cette appréciation. [...]
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