Il a longtemps été considéré que la CEDH ne proclame et ne protège que des droits civils et politiques, et que la charte sociale européenne, conclue au sein du Conseil de l'Europe en 1961 et révisée en 1996, en constitue la réplique en matière de droits économiques et sociaux sans mettre en place cependant un mécanisme institutionnel de contrôle aussi efficace que la Cour européenne des droits de l'homme. Cette division des rôles amenait à la conclusion que les droits sociaux, situés hors du domaine de la convention n'ont pas leur place sur la scène de la juridiction de Strasbourg. Et la cour européenne s'est d'ailleurs refusée dès 1986 à dégager de la convention un « droit qui n'y a pas été inséré au départ » dans son arrêt « Johnston ». A cela s'ajoutaient divers instruments permettant la protection des droits sociaux : la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui proclame dans son article 22 : "Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale ; » et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 16 décembre 1966.
Cependant, la jurisprudence de Strasbourg avait admis dès 1979 dans son arrêt Airey que si la convention « énonce pour l'essentiel des droits civils et politiques, nombre d'entre eux ont des prolongements d'ordre économique et social ». D'ailleurs, un droit social est expressément garanti par la Convention : Il s'agit de la liberté syndicale énoncée à l'article 11. Mais, c'est surtout l'interprétation dynamique des dispositions de la Convention par la Cour européenne des droits de l'homme qui a permis une véritable protection des droits sociaux. Cette « œuvre créatrice » tire sa légitimité du Préambule de la Convention qui énonce que la Cour doit assurer non seulement la sauvegarde mais aussi le développement des droits et libertés. Dans l'arrêt Wemhoff c/ Allemagne du 27 juin 1968, la Cour rappelle une directive générale d'interprétation : « S'agissant d'un traité normatif, il y a lieu (…) de rechercher quelle est l'interprétation la plus propre à atteindre le but et à réaliser l'objet de ce traité et non celle qui donnerait l'étendue la plus limitée aux engagements des parties ». La protection des droits fondamentaux s'inscrirait donc dans une volonté d'adopter une interprétation finaliste ou téléologique du texte. Ainsi, si on retient une conception large des droits sociaux, la Cour s'est penchée sur la protection des enfants contre l'exploitation, les conditions de vie en prison, les travaux forcés, le droit au logement, le droit du travail… Nous ne retiendrons pas cette conception extensive des droits sociaux. Nous nous limiterons à une approche beaucoup plus restrictive de la matière sociale c'est-à-dire les prestations sociales et les pensions des fonctionnaires, car elle illustre le mieux le dialogue des juges entre la Cour européenne et les juges nationaux. Il sera donc analysé dans un premier temps la protection nouvelle des droits sociaux sur la base de la convention européenne des droits de l'homme, puis les prolongements de cette protection…
[...] Brahim Gagou c/CPAM du Val de Marne et autre : que le bénéfice des prestations d'assurance maladie est soumis, s'agissant des ayants-droit majeurs de nationalité étrangère, à une exigence de régularité de leur séjour sur le territoire national ; Attendu qu'une telle disposition ( ) est justifiée par la nécessité pour un Etat démocratique d'exercer un contrôle à l'entrée de son territoire ; qu'enfin, l'ouverture des droits sociaux pour le conjoint de l'assuré n'est subordonnée qu'à la production d'un récépissé de demande de titre de séjour et non à une autorisation administrative ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que la distinction résultant des articles L. 161-25-2 et D. 161-15 du Code de la sécurité sociale n'est pas contraire aux exigences des articles 8 et 14 de la ConvEDH ensemble l'article 1 de son protocole nº1. [...]
[...] Le principe posé par le juge européen d'une interdiction de la suppression des droits à pension. CEDH juin 2002, Azinas Chypre : La suspension des droits à pension d'un fonctionnaire en ce qui le prive lui et sa famille de tout moyen d'existence constitue une rupture de l'équilibre qu'il convient de ménager entre la protection du droit de propriété de l'individu et les exigences liées à l'intérêt général Les enseignements tirés par le juge interne : la fixation jurisprudentielle du nouveau montant de la pension. [...]
[...] 161-15 du Code de la sécurité sociale n'est pas contraire aux exigences des articles 8 et 14 de la ConvEDH ensemble l'article 1 de son protocole nº1. L'aboutissement à une interdiction totale de discrimination en matière de prestations sociales ? Cette invocation de l'article 14 dans le cadre des droits sociaux soulève la question de la portée de l'interdiction des discriminations dans ce cadre. En effet, cela signifie-t-il qu'il n'existe plus de possibilités d'instaurer des différences de traitement dans l'octroi des droits sociaux ? [...]
[...] Néanmoins, on ne peut pas être sûr que ce critère restrictif ne va pas à son tour être censuré par la Cour européenne des droits de l'homme. II- L'extension de la protection et l'évolution des problèmes jurisprudentiels Le juge européen avait à l'origine la volonté d'introduire les droits sociaux dans le corpus de la convention pour permettre la mise en jeu de l'article 14 mais cela a eu des répercussions sur d'autres problèmes relatifs à ces droits notamment du fait de l'extension de la protection des droits sociaux opérée par les juges internes, extension confirmée par les juges européens. [...]
[...] L'extension par le juge européen de l'application de l'article 6 de la Convention à des droits sociaux. ( Dans le cadre de droits à des prestations sociales. En ce qui concerne cette insertion des droits sociaux dans le cadre de la convention, il ne s'agit pas réellement d'une protection expresse, elle n'est pas considérée comme telle puisque ce qui est mis en avant ici c'est l'extension de l'application de l'article 6 à un nombre de plus en plus important de domaines. [...]
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