Confiance doit être faite en la Convention Européenne, dont le principe est de trouver un équilibre entre la protection de l'individu et les intérêts de la collectivité. Il est toutefois intéressant de se demander si cette balance des intérêts n'obéit pas à des règles particulières en matière d'éloignement des étrangers. Il ne faut pas perdre de vue que le statut de l'étranger est un domaine dans lequel les Etats entendent garder une pleine souveraineté.
On peut alors se demander en quoi la liberté des Etats en matière de politique migratoire est limitée par la Convention Européenne des Droits de l'Homme. Le texte de la Convention est décevant sur ce point, puisqu'il donne une certaine priorité à la souveraineté des Etats parties (I). Mais la jurisprudence européenne a opéré un rééquilibrage, en étendant l'application de certains droits énoncés dans la Convention au profit des étrangers menacés d'éloignement (II)...
[...] Selon la Cour, l'article 5 1 n'exige pas qu'il existe des motifs raisonnables de croire à la nécessité de la détention d'un étranger contre lequel une mesure d'expulsion est en cours ; il suffit qu' une procédure d'expulsion [soit] en cours Une détention est par conséquent justifiée même si aucun arrêté d'expulsion n'a encore été pris. En revanche elle ne l'est plus si la procédure d'expulsion ne respecte pas l'obligation de diligence raisonnable. En l'espèce la Cour n'a pas jugé excessif le fait que la demande d'asile faite par M. Chahal ait été en cours d'instruction depuis près de quatre ans. Elle opère une balance des intérêts en jeu, à savoir, du côté du requérant, l'appréhension de la torture et du côté du gouvernement britannique, la protection de la sécurité nationale. [...]
[...] L'arrêt Amuur est particulièrement important au regard de la situation fragile des demandeurs d'asile. Ni la Convention, ni ses protocoles, ne contiennent de disposition sur le droit d'asile. La Convention ne consacre ni le droit d'entrer sur le territoire d'un Etat partie pour y demander l'asile, ni le droit à un examen au fond de la demande d'asile, ni le droit d'accéder à la procédure de reconnaissance de la qualité de réfugié. Le contrôle des conditions de détention des étrangers est ainsi fondamental, même s'il est limité par la considération de la souveraineté des Etats. [...]
[...] En allant plus loin, M. Morenilla ajoute que l'Etat qui, pour des raisons de convenance, accueille les travailleurs immigrés et autorise leur résidence devient responsable de l'éducation et de la socialisation des enfants de ces immigrés tout comme il l'est des enfants de ses propres citoyens. Ce sont les Etats qui fabriquent les étrangers puisque sont telles les personnes auxquelles on n'estime pas opportune d'attribuer la nationalité. Ainsi s'explique le décalage qui peut exister entre la situation juridique des individus nés sur le territoire d'un Etat qui n'est pas celui dont ses parents sont originaires, et leur situation de fait, qui en fait des membres de la communauté de cet Etat. [...]
[...] Ainsi, l'étranger sera indirectement protégé s'il peut prouver que la mesure d'éloignement prise à son encontre est de nature à porter atteinte à l'un de ses droits garantis par la Convention. Par une jurisprudence désormais établie, le juge européen permet à l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire, de se prévaloir des art et 8 CEDH, à savoir, la protection contre la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants (art. et le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (art. [...]
[...] Enfin, la Commission européenne des droits de l'homme est saisie, et indique qu'il serait souhaitable que les requérants ne soient pas renvoyés en Syrie, pays où ils avaient transité avant d'arriver en France. Avant même que le juge français statue et passant outre l'invitation de la Commission, le Ministre de l'Intérieur refuse l'entrée sur le territoire aux consorts Amuur, et ordonne leur éloignement vers la Syrie. Comble de l'ironie, le juge des référés statue deux jours plus tard en faveur des étrangers, constatant que la rétention exercée n'était prévue par aucun texte de loi. [...]
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