Si les perquisitions fiscales ne figurent pas parmi les procédures d'imposition les plus utilisées par l'administration fiscale, il n'en demeure pas moins que le droit de visite et de saisie est la procédure la plus attentatoire aux libertés individuelles et la plus traumatisante pour les contribuables. On observe que, depuis quelques années, les perquisitions fiscales préalablement réservées aux fraudes d'une gravité significative ont été banalisées.
Par ailleurs, cette procédure est souvent utilisée alors même que l'administration fiscale dispose d'informations permettant de notifier des redressements ou d'entamer des poursuites correctionnelles. On constate donc que les perquisitions fiscales se substituent fréquemment à une procédure de contrôle fiscal classique. L'encadrement judiciaire de la mise en œuvre des perquisitions fiscales ne permet pas au contribuable de disposer de recours effectif pour contester la perquisition dont il fait l'objet que ce soit, la légalité de l'ordonnance ou les opérations de visite et de saisie. Par conséquent, depuis plusieurs années, les praticiens dénonçaient cette procédure et plaidaient pour une réforme des perquisitions fiscales.
C'est dans ce contexte qu'une décision très importante et novatrice vient d'être rendue par la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) le 21 février dernier.
[...] crim janv 00- Sté Rue du Cherche- midi, Sté TMR France Europe et Sté TMR International Consultant et 00- 00- 00- 30.253 et 00- Sté Rue du Cherche- midi, Sté TMR France Europe et Sté TMR International Consultant). Le très court laps de temps réservé au juge pour prendre connaissance de la requête, de l'ordonnance, n'est pas, non plus, pour la Cour de cassation, de nature à susciter de réserves sur la réalité de la vérification par le juge du bien-fondé de la demande, en fait et en droit. [...]
[...] La Cour de cassation réduit ainsi son contrôle à une apparence purement formelle. Durant le déroulement de la visite domiciliaire, le contribuable perquisitionné, déjà considérablement affaibli par l'effet de surprise très déstabilisant de la mesure, ne dispose d'aucun recours effectif auprès du juge pendant le déroulement de la visite à son domicile et/ou dans ses locaux professionnels. De fait, la visite domiciliaire peut avoir lieu hors la présence de l'intéressé (Cass. com oct 89- Sté Roga enseignes). Dans ce cas, l'article L B du LPF prévoit que l'officier de police judiciaire doit requérir deux témoins choisis en dehors des personnes relevant de son autorité ou de celle de l'administration des impôts. [...]
[...] Le gouvernement français rappelait également que, dans sa décision du 8 janvier 2002 (CEDH janv 51578/99, Keslassy France), la Cour européenne avait retenu que l'article L B énonce un certain nombre de garanties et que l'ingérence dans le droit du requérant au respect de sa vie privée et de son domicile était proportionnée aux buts légitimes poursuivis et donc nécessaires dans une société démocratique au sens de l'article 8-2 de la convention. Pour les requérants, la jurisprudence Ferrazzini n'était pas au cas d'espèce pertinente dans la mesure où elle concerne l'applicabilité de l'article 6-1 au contentieux fiscal de l'assiette. Par ailleurs, ils rappelaient que la Cour européenne considère que les droits garantis par l'article 8 de la convention peuvent être interprétés comme incluant pour une société le droit au respect de son siège social, son agence ou ses locaux professionnels (CEDH avr 37971/97, Sté Colas France et a. [...]
[...] C'est dans ces conditions que les requérants ont saisi la Cour européenne pour faire constater la violation du droit à un recours effectif (garanti par l'article 13 de la convention) et à un procès équitable (garanti part l'article pour faire contrôler les conditions de l'atteinte à l'inviolabilité du domicile (garanti par l'article 8). En défense, le gouvernement français alléguait à titre principal l'irrecevabilité de la requête, notamment en raison de l'inapplicabilité de l'article faute pour la contestation d'entrer dans son champ d'application, et à titre subsidiaire le mal fondé des griefs. La Cour européenne a donné raison aux requérants sur le terrain de l'article 6-1 de la convention entraînant la caducité de l'article L B du LPF et la réforme tant attendue par les praticiens (II). [...]
[...] Or, nous l'avons vu, celle-ci couvre cette pratique. Ainsi juge-t-elle que le nombre de pièces produites par l'administration fiscale à l'appui de sa requête ne saurait en soi laisser présumer que le juge s'est trouvé dans l'impossibilité de les examiner (Cass. crim mars 2001, 2275, F-D). En rejetant tous les moyens invoquant la preuve contraire à la présomption selon laquelle l'ordonnance est l'oeuvre du juge qui l'a signée, la Cour de cassation confère un caractère irréfragable à cette présomption. En outre, l'ordonnance d'autorisation ne peut faire l'objet que d'un recours en cassation qui s'avère être lui-même largement formel. [...]
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