A l'origine de la création de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) la préoccupation majeure était d'assurer la protection des entreprises contre les décisions illégales qui pouvaient émaner du pouvoir communautaire. A ce titre, le recours en annulation garantissait le respect de la légalité, c'est-à-dire des traités, par les institutions communautaires. Plus d'un demi-siècle après, le respect de la légalité constitue toujours une des missions de la Cour de justice et le recours en annulation est l'un des moyens les plus efficaces garantissant ce respect.
Au sein du contentieux communautaire, le recours en annulation occupe une place fondamentale, c'est en effet le recours direct devant la Cour de justice le plus utilisé. Prévu à l'article 230 du traité établissant la Communauté européenne (traité CE), le recours en annulation permet au requérant de demander au juge communautaire d'annuler un acte d'une institution visant à produire des effets de droit, au motif que celui-ci est illégal. S'inspirant assez largement du recours pour excès de pouvoir du contentieux administratif français, ce recours apparaît comme un instrument essentiel dans la mission générale de contrôle de la légalité de l'action des institutions communautaires par le juge. Ainsi seuls les actes des institutions européennes peuvent faire l'objet d'un recours en annulation, il peut être dirigé contre « les actes conjoints du Parlement européen et du Conseil, les actes du Conseil, de la Commission et de la Banque centrale européenne (BCE) ainsi que les actes du Parlement européen ayant des effets juridiques vis-à-vis des tiers » (article 230 du traité CE).
[...] Les conditions d'accès pour les requérants particuliers au recours en annulation demeurent donc pour l'instant restrictives et peuvent légitimement apparaitre singulières devant l'aisance d'accès reconnue aux institutions communautaires et aux Etats membres en la matière. Néanmoins cette facilité d'accès au juge communautaire de l'annulation s'avère être en cohérent au vu de la place qu'occupent les requérants privilégiés au sein de l'ordre juridique communautaire et au vu des spécificités mêmes de l'ordre juridique communautaire. II- Un privilège juridictionnel en cohérence avec l'ordre juridique communautaire Ce privilège juridictionnel que constitue cette facilité d'accès au juge de l'annulation semble en cohérence avec le système juridique communautaire, du fait, tout d'abord que ces requérants dits privilégiés soient les protagonistes du droit communautaire mais également du fait de la nécessaire conciliation entre respect de la légalité et sécurité juridique Les requérants privilégiés en tant que protagonistes du droit communautaire Les Etats membres et les institutions communautaires sont les protagonistes du droit communautaire. [...]
[...] Comme nous l'avons vu dans la première partie, ces deux régimes d'accès au juge apparaissent en totale opposition, néanmoins ils se complètent. Les Etats membres et les principales institutions communautaires, d'une part, étant les plus aptes et les mieux armées à contester la légalité des actes communautaires, en effet pour ces dernières le juge communautaire est le seul juge compétent pour connaître de leurs litiges. A l'opposé les requérants individuels, qu'il soit personne physique ou personne morale, sont attachés à un Etat membre, à un système juridique national et aux juridictions qui y sont liées. [...]
[...] La notion de requérants privilégiés correspond quant à elle à une subdivision dans la catégorie des requérants institutionnels, cette notion regroupe aujourd'hui tous les Etats membres ainsi que le Conseil, la Commission et le Parlement européen. A chaque catégorie de requérants, le traité reconnait des modalités propres d'accès au juge de l'annulation. Les requérants privilégiés ayant un accès optimal au juge de l'annulation et les requérants particuliers, ou ordinaires en comparaison du régime des premiers, ayant un accès beaucoup plus restreint. [...]
[...] Cependant, la reconnaissance du Parlement européen au rang d'institution communautaire entraina en toute logique la qualification par la Cour de justice du Parlement européen en tant que requérant institutionnel privilégié (CJCE, arrêt Parlement c. Conseil du 22 mai 1990). Cet acquis jurisprudentiel sera officialisé par les traités de Maastricht en 1992 et de Nice en 1999. Si la Cour puis les traités ont admis une nouvelle institution au titre de requérant privilégié, la qualification demeure stricte. Cela se manifeste notamment par la vision classique de la notion d'Etat et par le refus d'élargir le statut de requérant privilégié aux collectivités publiques infra étatiques. [...]
[...] En l'occurrence, le privilège juridictionnel des requérants privilégié dans le cadre du recours en annulation n'est qu'un élément d'un système d'ensemble d'accès au juge communautaire. [...]
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