La Convention Européenne des Droits de l'Homme, signée à Rome, (C.E.D.H) est entrée en vigueur le 3 septembre 1953 mais ne fut pas ratifiée par la France avant la fin des conflits coloniaux en Indochine, puis en Algérie. Ce n'est que le 3 mai 1974 que le président de la République par intérim, Alain Poher annonce la ratification de la Convention devant le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, à Strasbourg. En 1981, sous la présidence de François Mitterrand et à l'initiative du garde des sceaux Robert Badinter, la France accepte la clause de recours individuel des citoyens devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme, organe juridictionnel prévu par la convention pour veiller au respect effectif des droits de l'Homme par les Etats.
Ces deux dates sont fondamentales dans l'histoire juridique française. Depuis lors, la Convention fait partie intégrante de l'ordre juridique interne français. En outre, au regard de l'article 55 de la Constitution de 1958, comme tout traité international, elle dispose « d'une autorité supérieure aux lois ». Parmi les droits garantis figure le « droit à un procès équitable » qui n'est pas compris directement à l'origine dans la lettre de la Convention, mais qui a été consacré par la jurisprudence de la Cour, notamment par l'arrêt Golder vs.Royaume-Uni (1975) qui abandonne l'expression de « bonne administration de la Justice » et utilise pour la première fois celle de « procès équitable ». Ce n'est qu'après la réforme de la Convention de 1998 que l'article 6§1 prend officiellement le nom de « droit à un procès équitable ». Ainsi dans tous les pays ayant ratifiée la CEDH, « toute personne a le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ».
Ce droit est avant tout considéré par la Cour comme le droit de « faire entendre sa cause » par un tribunal. Il s'agit de la condition préalable au respect de tous les droits de l'Homme. Afin de garantir l'effectivité de l'Etat de droit, toute personne juridique ou morale doit pouvoir se prévaloir de ses droits devant un tribunal. Il s'agit par conséquent d'un droit qui fait figure de norme processuelle de référence en Europe, mais en quoi consiste-t-il et comment s'applique-t-il dans les différents Etats signataires, tant ceux de tradition de « roman law » comme pour les pays de « common law » ?
Nous verrons dans une première partie que les champs et les modalités d'application de l'article 6 sont définies par la Cour de manière précise, et que les exigences de la Cour l'objet d'une intégration à des degrés divers dans les différents ordres juridiques internes.
[...] Ces notions sont autonomes car propres à la Convention. En effet, des obligations ou droits de caractère civil peuvent être reconnus par la Cour dans une procédure administrative française par exemple. C'est le cas de l'arrêt Bloch 1989 dans lequel la Cour considère matériellement les faits concernés pour déterminer la qualification juridique d'un contentieux, tout en tenant compte de l'objet et du but de la Convention En matière pénale, la cour a considéré dans l'affaire Öztürck (1984) que les sanctions répressives en matière de sécurité routière en Allemagne relevaient de la matière pénale. [...]
[...] Afin de garantir l'effectivité de l'Etat de droit, toute personne juridique ou morale doit pouvoir se prévaloir de ses droits devant un tribunal. Il s'agit par conséquent d'un droit qui fait figure de norme processuelle de référence en Europe, mais en quoi consiste-t-il et comment s'applique-t-il dans les différents Etats signataires, tant ceux de tradition de roman law comme pour les pays de common law ? Nous verrons dans une première partie que les champs et les modalités d'application de l'article 6 sont définis par la Cour de manière précise, et que les exigences de la Cour l'objet d'une intégration à des degrés divers dans les différents ordres juridiques internes Le droit au procès équitable : une construction jurisprudentielle autonome 1. [...]
[...] Se pose en effet la question des contentieux administratifs. Les contradictions sont plus ou moins grandes selon les Etats, certains d'entre eux comme l'Espagne ayant une Constitution postérieure à la Convention de Rome qui reprend les droits garantis par la Cour. Ainsi, l'article 24 de la Constitution espagnole est directement inspiré de l'article Les contradictions avec l'ordre interne : une nouvelle conception européenne du bon juge 1. Le Commissaire du gouvernement, une atteinte à l'impartialité du juge ? La jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme prend pour référent l'image d'un juge impartial c'est-à-dire non soumis à des pressions externes comme internes, et indépendant tant dans son mode de nomination que dans l'expression du règlement du contentieux. [...]
[...] L'article n'a vocation à s'appliquer que s'il y a un contentieux, terme que la Cour a défini de manière plus matérielle que formelle, il peut donc porter sur l'existence même d'un droit ou sur les modalités dont un sujet de droit peut en faire l'usage. Il faut donc une contestation réelle et sérieuse portant sur un droit défendable Par exemple, un juge néerlandais n'est pas obligé d'octroyer des frais d'avocats aux justiciables, il décide de manière discrétionnaire de le faire ou non. Ainsi, il ne peut y avoir de recours portant sur ce fait, il n'y a pas de droit défendable. [...]
[...] Arrêt Golder, CEDH Arret Golder(1975) ZOLLER Elizabeth, Procès équitable et due process of law in Recueil Dalloz 2007 p.517 et suite. [...]
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