La question des rapports entre l'ordre juridique communautaire et les ordres juridiques nationaux est l'une des questions clés du droit communautaire.
La primauté du droit communautaire signifie que la norme communautaire prend place dans l'ordre juridique interne des États membres avec un rang de priorité sur l'ensemble des normes nationales. La conséquence est qu'en cas de conflit entre une norme communautaire et une norme nationale l'application de la seconde devra être écartée au profit de la première. L'affirmation de cette primauté du droit communautaire était nécessaire et inévitable. En effet à partir du moment où il était admis que l'ordre juridique communautaire s'intégrait dans les systèmes nationaux et que ses dispositions créaient directement des droits et obligations pour les particuliers, il était inévitable que les juges nationaux, qui doivent assurer son respect, se trouvent confrontés à des problèmes de précellence entre droit national et droit communautaire.
Or les traités n'apportent aucune indication, en tout cas expresse, quant à la résolution de ce problème. En effet l'on observe le silence des traités qui contiennent au moins une mention de l'applicabilité directe qu'ils attribuent au règlement mais aucune affirmation claire d'une quelconque primauté du droit communautaire.
Ce silence doit être interprété comme une prudence nécessaire plutôt qu'une lacune car affirmer expressément la primauté du droit communautaire sur le droit national aurait été prendre parti sur la nature constitutionnelle de la construction communautaire, ce à quoi les États fondateurs n'étaient pas disposés à consentir, pas plus qu'aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle les traités sont restés discrets sur le principe de primauté et ont préféré employer des formules plus discrètes telles celle qui attribue un caractère obligatoire aux actes institutionnels ou celle suivant laquelle les États membres s'abstiennent de toutes mesures susceptibles de compromettre la réalisation des buts du traité.
Malgré le silence des traités sur la primauté du droit communautaire, l'affirmation du principe par la Cour de Justice n'est en elle-même pas surprenante. En effet, la pratique posant le problème en termes concrets, a obligé la Cour de Justice, interrogée par les juges nationaux, à donner une solution au problème de prédominance entre droit national et droit communautaire.
La primauté, principe d'origine jurisprudentielle, est-elle une condition d'existence du droit communautaire en raison du fait qu'elle détermine son application uniforme et efficace participant ainsi à sa distinction avec l'ordre juridique international ?
La réponse à cette question s'organisera autour de deux axes : d'une part la consécration et le fondement du principe de primauté (I) et d'autre part sa portée et ses conséquences qui en font sa spécificité (II).
[...] Conclusion Le traité établissant une Constitution pour l'Europe a réactualisé le débat sur la primauté du droit communautaire en la consacrant textuellement. En effet l'article I-6 du traité du 29 octobre 2004 disposait que la Constitution et le droit adopté par les institutions de l'Union, dans l'exercice des compétences qui sont attribuées à celles-ci, priment le droit des États membres. Une déclaration annexée au traité ajoutait que les dispositions de l'article I-6 reflètent la jurisprudence existante de la Cour de Justice. [...]
[...] En second lieu, il semble intéressant d'examiner la relation entre le droit communautaire et la loi française. En France, l'article 55 de la Constitution de 1958 dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dés leur publication, une autorité supérieure à des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie Toutefois le Conseil constitutionnel se refuse traditionnellement d'examiner la conformité d'une loi aux prescriptions d'un traité. Ce refus ressort clairement de sa décision du 15 janvier 1975 par laquelle le juge constitutionnel français refuse de vérifier la compatibilité du projet de loi sur la libéralisation de l'avortement avec la Convention européenne des droits de l'Homme. [...]
[...] Le juge national se trouve alors investi du pouvoir de vérifier que les normes de son État, quelles que soient leurs places dans la hiérarchie, ne portent pas atteinte à l'uniformité d'application du droit communautaire. Les pouvoirs du juge national se définissent par rapport à cette compétence. Par conséquent la solution qui s'impose au problème des rapports entre le droit communautaire et les droits nationaux est celle-ci : le traité étant la Constitution de la Communauté, aucune disposition nationale ne peut lui être légalement opposée, ni aux actes pris sur son fondement, puisqu'il s'agit de la norme suprême du système communautaire, à moins que le traité lui-même ne prévoie son effacement devant certaines dispositions du droit des États membres. [...]
[...] Le juge italien avait donc saisi la Cour d'une question préjudicielle relative à l'interprétation, c'est-à-dire au sens à donner à ces dispositions du traité . A l'occasion de sa réponse, la Cour a consacré la spécificité du droit communautaire par rapport au droit international : attendu qu'à la différence des traités internationaux ordinaires, le traité de la CEE a institué un ordre juridique propre, intégré au système juridique des États membres lors de l'entrée en vigueur du traité et qui s'impose à leurs juridictions. [...]
[...] Sans primauté il ne saurait donc y avoir d'application uniforme, qui est une exigence fondamentale du droit communautaire. b-la primauté : volonté de distinguer l'ordre juridique communautaire de l'ordre juridique international La Cour aurait pu simplement reconnaître la primauté en se référant aux obligations contractées dans des traités régulièrement ratifiés par les États membres pour en déduire, comme l'aurait fait tout juge international, que ces derniers devaient certes respecter les engagements qu'ils avaient souscrits, mais en conformité avec leurs modalités nationales respectives. [...]
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