Forgée par les organes de contrôle de la CEDH, la notion d' « obligation positive » invite à dépasser le clivage artificiel, systématisé par les Pactes de 1966, opéré au sein des droits individuels entre les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels. Outre que la distinction entre les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels, entre « les droits de… » supposant une abstention de l'Etat et « les droits à… » réclamant des prestations de l'Etat, procède d'une terminologie abusivement simplificatrice (nombre de libertés individuelles traditionnelles sont énoncées comme des « droits à » dans les conventions internationales pertinentes : droit à la liberté et à la sûreté, droit à un procès équitable, droit à la liberté d'expression…), il convient de remarquer qu'il n'y a pas d'opposition tranchée entre les deux catégories de droits. Les libertés individuelles ne sont pas irréductibles à l'environnement social : tous les droits sont vécus dans et par la société et sont des droits de l'homme en société (la liberté de communication des informations et des idées est un exemple topique). Les droits économiques, sociaux et culturels ne sont pas moins nécessaires que les droits civils et politiques, ils sont complémentaires : l'absence des premiers compromet l'exercice réel des seconds. Par ailleurs, la distinction « droits de »/ « droits à », abstention/prestations, est démentie par la pratique des droits de l'homme. D'une part, certains droits sont de nature « mixte » et participent à la fois des droits économiques, sociaux et culturels et des droits « classiques », au titre desquels ils vont être garantis : il en est ainsi de la liberté syndicale, essentielle pour protéger les intérêts économiques et sociaux mais aussi variété du droit de réunion et d'association ou du droit à l'éducation, à la fois droit culturel et modalité de la liberté de pensée, de conscience et de religion. D'autre part, les prestations positives ne sont pas absentes des droits civils et politiques les plus classiques et en permettent l'exercice : le droit à un procès équitable ou le droit à l'instruction, par exemple, supposent de telles prestations des pouvoirs publics.
L'étude du fondement (I) et de la portée des obligations positives (II) constituera l'axe principal de notre développement.
[...] D'une manière générale, le contrôle des obligations positives manque néanmoins de rigueur. La Cour européenne ne reprend pas, le plus souvent, la démarche qui est la sienne pour les ingérences actives (consistant à contrôler si l'ingérence est bien prévue par la loi, si elle poursuit un but légitime et si elle est nécessaire dans une société démocratique) et fait l'impasse sur les deux premières conditions, alors que celles-ci paraissent également pertinentes en matière d'ingérences passives (omissions, décisions de refus, mesures insuffisantes). [...]
[...] 675-698 Cohen-Jonathan (Gérard), Flauss (Jean-François) (dir.) La réforme du système de contrôle contentieux de la Convention européenne des droits de l'Homme Bruxelles : Bruylant p., collection Droit et Justice n°61 Cour européenne des droits de l'Homme Dialogue entre juges Strasbourg : Conseil de l'Europe p. De Salvia (Michele) Cour européenne des droits de l'Homme est-elle, par la nature de ses arrêts, un véritable tribunal de pleine juridiction Revue trimestrielle des droits de l'Homme (Bruxelles), 17ème Année, 67, pp. 483-500 Delzangles (Béatrice) rôle du juge national comme garant de la Convention européenne des droits de l'Homme : renforcement ou affaiblissement pp. [...]
[...] L'étude du fondement et de la portée des obligations positives constituera l'axe principal de notre développement. Le fondement des obligations positives Pour des raisons d'effectivité des droits proclamés et de son caractère inhérent les obligations positives furent consacrées par le juge européen L'effectivité des droits garantis : fondement des obligations positives Mettant l'accent sur l'effectivité des droits proclamés, la Cour européenne, dans une audacieuse décision du 9 octobre 1979, Airey Irlande affirme que si la Convention européenne des droits de l'homme énonce pour l'essentiel des droits civils et politiques, nombre d'entre eux ont des prolongements d'ordre économique et social car nulle cloison étanche ne sépare la sphère des droits économiques et sociaux du domaine de la Convention : il s'agit de protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs Le juge européen entend ainsi fournir à l'individu les conditions matérielles à l'exercice effectif de ses droits, en l'espèce le droit d'accès aux tribunaux. [...]
[...] Flauss (Jean-François) "L'histoire dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme" Revue trimestrielle des droits de l'Homme (Bruxelles), 17e année, 65 (1er janvier 2006), pp. 5-22 Flauss (Jean-François) réforme de la réforme - Propos conclusifs sous forme d'opinion séparée”, pp. 167-182, in Cohen-Jonathan (Gérard) et Flauss (Jean-François) (dir.), La réforme du système de contrôle contentieux de la Convention européenne des droits de l'Homme Bruxelles : Bruylant p., collection Droit et Justice 61 Lopez Ostra Espagne, 9/12/1994 Marckx Belgique juin 1979 [3]CEDH juillet 2004 C. [...]
[...] Soit que l'obligation positive soit inhérente à un droit spécifique, et il en va ainsi, particulièrement, du droit au respect de la vie privée et familiale (article 8). Selon la Cour, si l'article 8 a essentiellement pour objet de prémunir l'individu contre des ingérences arbitraires des pouvoirs publics ( il ne se contente pourtant pas d'astreindre l'Etat à s'abstenir de pareilles ingérences : à cet engagement plutôt négatif peuvent s'ajouter des obligations positives inhérentes à un respect effectif de la vie familiale Soit que, plus largement, le juge européen découvre dans l'article 1er de la Convention une obligation positive inhérente à l'engagement général qu'on les Etats de reconnaître à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés consacrés par la Convention. [...]
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