(CEDH 8 novembre 2005, H. F. c/ Slovaquie).
L'appel au droit recommandatoire du Conseil de l'Europe est généralement mis au service d'une interprétation évolutive de la Convention. Ainsi pour actualiser la portée à attribuer au champ d'application du « droit à l'instruction » garanti par l'article 2 du protocole n° 1, la Cour se réfère à plusieurs textes adoptés récemment par le Conseil de l'Europe, et notamment à la recommandation du Comité des ministres R(98)3 sur l'accès à l'enseignement supérieur et à la recommandation de l'Assemblée parlementaire 1353 (1998) portant sur l'accès des minorités à l'enseignement supérieur, qui soulignent le rôle essentiel et l'importance du droit à l'accès à l'enseignement supérieur dans la promotion des droits de l'homme et les libertés fondamentales et le renforcement de la démocratie (CEDH Gde Ch. 10 novembre 2005, Leyla Sahin c/ Turquie). Partant, elle est amenée à conclure que « dans une société démocratique le droit à l'instruction, indispensable à la réalisation des droits de l'homme, occupe une place si fondamentale qu'une interprétation restrictive de la première phrase de l'article 2 ne correspondrait pas au but et à l'objet de cette disposition » (§ 137).
Au fil des années, la Cour européenne a commencé à prêter une attention croissante à la Charte sociale européenne dans le cadre de l'interprétation évolutive de la Convention. Elle n'hésite plus à prendre en compte, de manière explicite, la pratique du Comité européen des droits sociaux (CEDH Gde Ch. 11 janvier 2006, Soerensen c/ Danemark et Rasmussen c/ Danemark). Dans ces affaires, la Cour prend acte de la déclaration selon laquelle la loi danoise relative à l'usage des accords de monopole syndical dans le secteur privé est contraire à l'article 5 de la Charte sociale européenne. A titre confortatif, elle renvoie également à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 décembre 1989, et plus spécialement à l'article 12 qui consacre la liberté de tout employeur et de tout salarié d'adhérer ou de ne pas adhérer à des organisations professionnelles ou syndicales sans qu'il puisse en résulter pour lui un dommage personnel ou professionnel. De surcroît, la Cour en appelle, à titre largement superfétatoire, à l'article 12 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne pour conclure, au terme d'un raisonnement fondé sur la clause horizontale de l'article 53 de ladite Charte (clause du traitement le plus favorable pour l'individu), que le droit à la libre association dans le domaine syndical doit être lu à la lumière de l'article 12 de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs.
L'interprétation triplement croisée d'instruments européens, dépourvus de toute force contraignante, à laquelle se livre la Cour de Strasbourg, est illustrative d'une pratique de plus en plus dynamique (voire activiste) de la méthode comparative dans le contentieux européen des droits de l'homme. Cette dernière demeure toutefois sélective puisque la Cour omet de mentionner la position dissonante du droit de l'Organisation internationale du travail (inscrite dans des instruments à caractère conventionnel).
Interprète du droit de l'Union (pour les besoins largement compris de l'interprétation de la Convention), la Cour européenne confirme aussi son rôle défenseur de la légalité communautaire, via le contrôle exercé sur le respect de l'exigence de la « condition légale » (CEDH 17 janvier 2006, Aristimuno Mendizabal c/ France). En l'espèce, elle rappelle que l'article 8 de la Convention doit être interprété à la lumière des obligations que le droit communautaire impose aux Etats membres en ce qui concerne les droits d'entrée et de séjour des citoyens de l'Union.
[...] Celles-ci sont en effet réputées l'exposer au risque de vengeance des parents ou amis des dissidents tués ou maltraités par la division spéciale présidentielle. En dépit d'un grade subalterne le requérant serait davantage exposé à des risques de violation de l'article 3 (voire de l'article que d'autres catégories de collaborateurs du régime de Mobutu. Rétrospectivement, il apparaît donc que le standard de protection garanti au membre d'une formation tortionnaire est plus favorable que celui qui avait été appliqué à un narcotrafiquant plus ou moins repenti (CEDH 27 avril 1997, HLR France). [...]
[...] L'affaire DD France aurait pu lui donner l'occasion de faire entrer les droits substantiels garantis par la Convention (ou pour le moins certains d'entre eux), dans l'ordre public matériel s'imposant aux juridictions nationales de l'exequatur. Plus radicalement encore, la Cour européenne aurait pu soumettre l'exequatur d'un jugement rendu dans un Etat tiers au respect du droit de la Convention. Le désistement de la requérante a conduit à l'adoption d'un simple arrêt de radiation. Celui-ci n'en revêt pas moins une importance certaine. [...]
[...] L'inapplicabilité de l'article 6-1 de la Convention à des litiges qui en vertu de la jurisprudence Pellegrin n'entrent pas dans le champ d'application du droit à un procès équitable doit-elle faire l'objet d'un relevé d'office de la part de la Cour ? Dans l'absolu, rien n'empêche cette dernière de soulever d'office un motif d'incompétence ratione materiae. Mais, apparemment, il ne semble pas qu'elle se considère comme tenue de le faire dès lors que l'Etat défendeur a omis ou négligé d'exciper de l'irrecevabilité de la requête pour ce motif. [...]
[...] Fidèle à une ligne de conduite imprégnée à la fois d'humanisme et d'humanité, la Cour n'hésite pas à faire état de son scepticisme à l'égard de la fonction punitive susceptible d'être assignée à la privation du droit de vote. La mise en cause de la proportionnalité de la privation automatique du droit de vote donne lieu à une démonstration largement sur le fil du rasoir Certes, la Cour a raison de souligner le caractère tout à fait indifférencié, et même syncrétique, de l'atteinte au droit de vote : la réglementation litigieuse n'accordait aucune considération à la durée de la peine, à la gravité des infractions, et de surcroît n'excluait pas une rupture d'égalité entre condamnés. [...]
[...] Celle- ci répond d'ailleurs à la conception partagée par les instruments universels de protection des droits de l'homme. Pour autant, l'option adoptée par la Cour européenne est-elle pleinement justifiée ? En substance, la réponse est indéniablement affirmative : une différence de traitement reposant exclusivement, ou dans une mesure déterminante, sur l'origine ethnique d'un individu ne peut passer pour objectivement justifiée dans la société démocratique contemporaine (et non simplement européenne fondée sur le principe du pluralisme et de la diversité culturelle. [...]
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