Il y a groupe de sociétés, au sens du droit des sociétés, en présence d'un ensemble de sociétés, ayant chacune une existence juridique distincte, contrôlées majoritairement, directement ou indirectement, par une même société, elle-même non contrôlée majoritairement par une autre société (directement ou indirectement) ; cette dernière société est appelée société-mère ou tête de groupe. Ces grands groupes de sociétés sont nécessaires à la vie des affaires contemporaine, en ce qu'elles sont inspirées par une logique économique.
Ces groupes de sociétés ne peuvent laisser le législateur fiscal indifférent, puisqu'il est nécessaire, pour l'économie du pays, de favoriser la création de telles superstructures. Ainsi, son but est de rechercher une neutralité fiscale, qui empêcherait toute interférence avec les choix juridiques et commerciaux des entrepreneurs. Des régimes fiscaux privilégiés – dits de groupe ou de sociétés-mères/filiales – ont donc été mis en place par les Etats. Nous allons nous pencher plus particulièrement sur deux de ces régimes : le régime anglais et le régime français.
• Le régime anglais : le « group relief ».
Ce régime mis en place par le législateur britannique permet à une société d'un groupe de céder ses pertes à une autre société du groupe, qui peut ainsi les utiliser pour les déduire de son bénéfice imposable. Par conséquent la société cédante perd le droit de les utiliser à des fins fiscales. Le système de dégrèvement de groupe posé à l'article 402 de l'Income and Corporation Taxes Act (ICTA) est cependant soumis à une condition : il faut que la société soit résidente au Royaume-Uni, ou qu'elle exerce une activité commerciale au Royaume-Uni par l'intermédiaire d'une succursale ou une agence.
• Le régime français : l'intégration fiscale.
Ce régime dit d'intégration fiscale, prévu par les articles 223A et suivants du Code Général des Impôts, permet à une société de se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des groupes formé par elle-même et les sociétés dont elle détient au moins 95% du capital. Or, cette possibilité n'est ouverte qu'à des sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés, donc résidant en France.
Ces deux systèmes posent un certain nombre de problèmes au niveau de leur compatibilité avec le droit communautaire. Et notamment celui lié à l'application du principe de territorialité, qui subordonne cette possibilité aux sociétés résidant sur le territoire de leur pays, alors que nombre de leurs filiales sont implantées à l'étranger, surtout dans des Etats membres. Il convient de déterminer si ces dispositions sont conformes à la liberté d'établissement, prévue aux articles 43 et 48 du Traité CE. En effet, en réservant ce régime fiscal privilégié aux sociétés résidant dans leur Etat, les Etats ne cherchent-ils pas à encourager la création de filiales dans leur pays au détriment d'autres Etats membres de la Communauté ?
Un arrêt Marks & Spencer de la Cour de Justice des Communautés Européennes rendu le 13 décembre 2005 à propos du système anglais de group relief autorise le principe d'un tel système, mais condamne le Royaume-Uni en ce qu'il viole le principe de proportionnalité. On s'aperçoit alors que la notion fiscale de groupe européen est relativement limitée (I). En outre par un arrêt LVMH du 16 janvier 2006, le Conseil d'Etat a encore restreint cette notion de groupe européen, en ce qu'il décide que les principes issus du droit communautaire ne s'appliquent dès lors qu'ils ne concernent pas l'application de ce droit (II).
[...] Or, cette possibilité n'est ouverte qu'à des sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés, donc résidant en France. Ces deux systèmes posent un certain nombre de problèmes au niveau de leur compatibilité avec le droit communautaire. Et notamment celui lié à l'application du principe de territorialité, qui subordonne cette possibilité aux sociétés résidant sur le territoire de leur pays, alors que nombre de leurs filiales sont implantées à l'étranger, surtout dans des Etats membres. Il convient de déterminer si ces dispositions sont conformes à la liberté d'établissement, prévue aux articles 43 et 48 du Traité CE. [...]
[...] L'avocat général, quant à lui, a tout d'abord rejeté le premier argument selon lequel il y avait atteinte à la liberté d'établissement en ce que le régime de group relief était accordé aux succursales étrangères et non aux filiales étrangères. Selon lui l'Etat a le droit de ne pas traiter fiscalement de manière identique deux formes d'établissements différents, puisque le régime fiscal britannique repose sur le choix de la forme juridique de l'établissement. Quant au deuxième argument invoqué par la société, il constate en effet une discrimination fondée sur le lieu de résidence de la filiale. [...]
[...] En l'espèce, la société Marks & Spencer, groupe britannique, avait ouvert des filiales dans l'Union Européenne, qui s'étaient révélées être déficitaires. Ayant décidé de les fermer, la société, qui ne pouvait reporter les résultats bénéficiaires sur les exercices futurs dans les lieux d'implantation des filiales, invoqua l'ICTA de 1998 qui permettait aux sociétés déficitaires de céder leurs pertes à une autre société de leur groupe. Malheureusement ce régime était subordonné à un principe de territorialité des sociétés déficitaires, et les Special Commissioners of Income Tax refusèrent d'appliquer ce système aux filiales déficitaires étrangères. [...]
[...] B Les limites intrinsèques de la notion fiscale de groupe européen Il existe deux conditions principales de l'existence d'un groupe européen qui viennent en même temps limiter cette notion. Il faut soit que la filiale non résidente ait épuisé les possibilités de prise en compte des pertes qui existent dans son Etat de résidence au titre de l'exercice fiscal concerné par la demande de dégrèvement ainsi qu'au titre des exercices fiscaux antérieurs. Soit qu'il n'existe pas de possibilités pour que ces pertes puissent être prises en compte dans son Etat de résidence au titre des exercices futurs soit par elle-même, soit par un tiers. [...]
[...] Ces grands groupes de sociétés sont nécessaires à la vie des affaires contemporaine, en ce qu'elles sont inspirées par une logique économique. Ces groupes de sociétés ne peuvent laisser le législateur fiscal indifférent, puisqu'il est nécessaire, pour l'économie du pays, de favoriser la création de telles superstructures. Ainsi, son but est de rechercher une neutralité fiscale, qui empêcherait toute interférence avec les choix juridiques et commerciaux des entrepreneurs. Des régimes fiscaux privilégiés dits de groupe ou de sociétés-mères/filiales ont donc été mis en place par les Etats. [...]
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