La liberté de circulation des capitaux figurait parmi les libertés fondamentales consacrées par le traité instituant la Communauté économique européenne au même titre que la libre circulation des personnes et des services. Toutefois, les dispositions spécifiques qui régissaient cette liberté étaient rédigées de manière particulièrement prudente et apparaissaient, par conséquent, comme étant en retrait par rapport à celles régissant les autres libertés de circulation.
Le Traité sur l'Union européenne, signé à Maastricht le 7 février 1992 et entré en vigueur le 1er novembre 1993, modifie les dispositions relatives à la liberté de circulation des capitaux dans un sens plus libéral par rapport au traité instituant la Communauté économique européenne. La motivation de ce changement de régime tient notamment au fait que les dispositions prévues par ce dernier traité étaient devenues obsolètes par rapport au droit dérivé. En effet, la directive n° 88/361 du 24 juin 1988 pour la mise en œuvre de l'article 67 du traité CEE pose le principe de la libéralisation complète des capitaux à l'intérieur de la communauté. En cela, elle constituait la dernière étape d'un processus évolutif visant à cette libéralisation tel qu'il était prévu par l'article 67 du traité CEE.
Il était donc nécessaire de rendre le texte du Traité sur l'Union européenne conforme au droit dérivé et de consacrer ainsi, dans le droit fondamental de la Communauté, la libre circulation des capitaux et des paiements.
Les nouvelles dispositions sont contenues aux articles 73 A à 73 H du Traité (aujourd'hui aux articles 56 à 60 du Traité). Nous développerons ici les articles les plus importants. L'article 73 B pose le double principe de la liberté complète tant des mouvements de capitaux que des paiements. Cette nouvelle rédaction consacre la liberté fondamentale de circulation des capitaux définie comme l'interdiction, pour les Etats de restreindre ces mouvements. En outre, le législateur communautaire franchit un pas et édicte un principe général d'interdiction des restrictions puisque cette liberté de circulation des capitaux vaut non seulement entre les Etats membres, mais entre les Etats membres et les Etats tiers.
[...] Comment se résout le conflit existant entre la liberté de circulation des capitaux reconnue par le droit communautaire et une mesure de droit pénal interne ? Dans l'arrêt Bordessa, la CJCE affirme qu'une législation subordonnant à une autorisation préalable l'exportation de billets de banque entre Etats membres est incompatible avec la liberté de circulation des capitaux reconnue par le droit communautaire à l'article 67 du traité CEE. Cette liberté étant d'effet direct, un particulier peut s'en prévaloir devant les Juridictions nationales des Etats membres, en vue d'écarter une disposition contraire de droit national. [...]
[...] Dans l'arrêt Bordessa du 23 février 1995, d'une part, la Cour a été saisie de l'affaire suivante : des ressortissants italiens et espagnols se font appréhender à la douane entre la France et l'Espagne avec, dans leur véhicule des sommes importantes en espèce. En l'absence d'autorisation préalable donnée par l'administration pour une telle exportation comme cela était prévu au-delà d'une certaine somme dans la législation espagnole, des poursuites pénales sont intentées contre eux. Le juge espagnol saisi de l'affaire renvoie la question préjudicielle à la CJCE afin de savoir si la législation pénale espagnole était compatible avec la liberté de circulation des capitaux. [...]
[...] Cet article prévoit une interdiction des restrictions de circulation des capitaux entre les Etats membres et les Etats tiers. La Cour affirme, comme dans l'arrêt Bordessa, que la règle est énoncée de manière claire et inconditionnelle et implique, de ce fait une inapplicabilité automatique de la règle pénale contraire. Par conséquent, le fait de soumettre la circulation de monnaies vers un Etat tiers à une autorisation préalable portait atteinte à la liberté communautaire reconnue par le Traité. Mais une difficulté supplémentaire, par rapport à l'arrêt Bordessa, intervenait du fait que ces exportations visaient des pays tiers. [...]
[...] En outre, la Cour a appliqué le principe de la rétroactivité in mitius ce que lui a permis d'admettre la liberté de circulation des capitaux comme référence du contrôle de la norme interne. Sur ce point, Laurence Idot a affirmé dans la chronique de droit communautaire de 1997 que la combinaison du principe communautaire de la primauté et du principe de droit pénal interne de la rétroactivité in mitius peut ainsi conduire à neutraliser un grand nombre d'infractions En effet, le juge doit systématiquement écarter une norme pénale contraire au droit communautaire, et ce, alors même que la liberté communautaire a été reconnue après la commission des faits incriminés. [...]
[...] Sur ce point la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européenne est constante et elle est relayée par les Cours nationales telles que la Cour de cassation. Cette dernière a jugé, dans un arrêt du 29 mars 2000 de Chambre Criminelle que l'obligation de déclarer les importations et exportations de sommes supérieures à francs, posées par l'article 464 du Code des Douanes, n'est pas contraire au droit communautaire. Conclusion Nous avons donc vu que la liberté de circulation des capitaux est d'effet direct en droit interne. Cet effet engendre la neutralisation de la mesure pénale interne non indispensable au sens du droit communautaire. [...]
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