Dès la signature du Traité de Rome, les Etats fondateurs se sont engagés à établir les fondements d'une Union toujours plus étroite entre les peuples européens. Ils ont alors adopté une logique originale pour atteindre cet objectif, à savoir l'institution d'une Communauté économique européenne. L'objet de la liberté de circulation des personnes est donc longtemps resté lié, en droit communautaire, aux activités économiques, l'exercice d'une activité professionnelle conditionnant la mise en ouvre de celui-ci. Cette liberté, tout aussi fondamentale que celle des marchandises, peut-être plus encore, a donc été envisagée sous deux angles particuliers : la libre circulation des travailleurs (article 48 devenu article 39) et le droit d'établissement (article 52 devenu article 45)
Ce n'est que grâce au Traité de Maastricht -sur l'Union européenne- de 1992, que cette liberté va prendre toute sa dimension, celui-ci encourageant « une union sans cesse plus étroite entre les peuples » et « se donnant pour objectif de renforcer la protection des droits et des intérêts des ressortissants des Etats membres par l'instauration d'une citoyenneté de l'Union ». Cette citoyenneté consacre en effet « le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres » (article 8 A-1 du traité CE) , lequel s'exerce « sous réserve des limitations et des conditions » prévues par le traité et ses dispositions d'application. La Cour de justice des Communautés européennes apparaît dès lors comme le garant d'un nouvel ordre juridique, qu'elle doit rendre le plus large et le plus protecteur possible, un citoyen ne pouvant se prévaloir de sa qualité de « citoyen de l'Union » que s'il soulève une question déjà envisagée par le droit communautaire.
Malgré ces avancées, l'Union européenne ne dispose encore que d'une compétence d'attribution et n'est pas dotée de la personnalité juridique internationale. L'article 20 rappelle que « les Etats membres établissent entre eux les règles nécessaires et engagent les négociations internationales requises en vue d'assurer cette protection » : ils restent donc souverains et continuent de disposer d'un pouvoir discrétionnaire d'appréciation, ne serait-ce que dans les conditions d'octroi de la nationalité. L'article 18 § 1 précise en effet qu'il faut entendre par « citoyen de l'Union » toute personne « ayant la nationalité d'un Etat membre ». Les Etats décident donc d'accorder ou non à telle ou telle personne le droit de circuler, de séjourner, de s'installer librement –également de voter et d'être éligible- sur le territoire communautaire. Notons cependant que le processus de construction européenne es un processus « intégrationnel », allant vers une perte de souveraineté progressive des Etats membres.
La libre circulation des personnes concerne donc à la fois les ressortissants d'Etats tiers et ceux des Etats membres et plus généralement les personnes physiques, qu'il faut distinguer des personnes morales. S'appliquant indépendamment de l'exercice d'une activité professionnelle, elle englobe donc les travailleurs comme les personnes non actives, ainsi que les membres de leurs familles. Elle leur confère des droits, que ces derniers soient dépendants d'une activité professionnelle – droit d'accès à l'emploi, droit d'établissement, droit de libre prestation des services -, indépendants d'une telle activité – droit de déplacement, droit de séjour - ; ou « annexes » - droit de disposer d'un bien immobilier, droit d'accéder à l'enseignement et à la formation…-. Dans le premier cas, le régime juridique varie ensuite selon qu'il s'agit d'une activité salariée, indépendante (artisan…) ou réglementée (médecin, avocat…).
Elle se heurte cependant à certaines limites. Selon l'article 39 (ancien article 48) § 3 du Traité sur l'Union européenne, qui évoque l'article 46 § 1 en matière de droit d'établissement, la libre circulation des travailleurs s'exerce « sous réserve des limitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique ». De même, l'article 39 § 4 stipule que « les dispositions de l'article 39 ne sont pas applicables aux emplois dans l'administration publique », ou relatifs à l'exercice de l'autorité publique (renvoi à l'article 45 § 1). Faute d'une réglementation communautaire homogène et générale, les Etats membres disposent encore en effet de compétences résiduelles, et peuvent prendre des mesures, que l'on nommera par la suite « mesures restrictives », qui viennent porter atteinte à ce principe de libre circulation, sous réserve de la validité de leurs invocations.
Les exceptions à la libre circulation des personnes physiques sont donc de deux ordres : elles peuvent être soit liées à des raisons d'ordre public, de sécurité ou de santé publique, soit liées à l'exercice de certaines activités professionnelles ou à des impératifs d'intérêt général.
[...] La participation à l'exercice de l'autorité publique et l'invocation impératifs légitimes relatifs à l'intérêt général Les activités participant à l'exercice de l'autorité publique L'article 45 1 rappelle que ne sont pas concernées par le régime de la liberté d'établissement les activités participant dans un Etat membre à titre même occasionnel à l'exercice de l'autorité publique Car si certaines mesures sont susceptibles de venir restreindre l'accès de ressortissants étrangers à certaines catégories d'activités, elles peuvent également concerner le droit d'établissement, lequel fait référence non pas à la liberté d'aller et venir proprement dite –sauf si celle-ci est envisagée sous l'angle de la liberté du salarié-, mais à la liberté de s'installer dans un Etat membre afin d'y exercer une activité professionnelle. La Cour est venue, dans un arrêt du 21 juin 1974, Reyners préciser la définition de ce type d'activités. [...]
[...] S'appliquant indépendamment de l'exercice d'une activité professionnelle, elle englobe donc les travailleurs comme les personnes non actives, ainsi que les membres de leurs familles. Elle leur confère des droits, que ces derniers soient dépendants d'une activité professionnelle droit d'accès à l'emploi, droit d'établissement, droit de libre prestation des services indépendants d'une telle activité droit de déplacement, droit de séjour - ; ou annexes - droit de disposer d'un bien immobilier, droit d'accéder à l'enseignement et à la formation Dans le premier cas, le régime juridique varie ensuite selon qu'il s'agit d'une activité salariée, indépendante (artisan ) ou réglementée (médecin, avocat Elle se heurte cependant à certaines limites. [...]
[...] Notons que toutes les dispositions de cette directive bénéficient de l'effet direct, depuis l'arrêt Van Duyn de 1974. Ces mesures restrictives des Etats doivent tout d'abord être précisées et justifiées avant d'être encadrées par un régime juridique strict A. Les justifications de ces mesures restrictives Rappelons que les Etats membres conservent aujourd'hui encore une grande part d'autonomie, notamment dans les domaines concernant la souveraineté et l'autorité de l'Etat. Le contrôle des flux migratoires, la politique de l'immigration, même s'ils font actuellement l'objet de nombreuses harmonisations au niveau communautaire, continuent de relever de la compétence de chaque Etat, qui définit ce qu'il entend par atteinte à l'ordre ou à la sécurité publique et qui décide in fine de garder telle ou telle personne sur son territoire. [...]
[...] Un Etat peut ainsi refuser de délivrer ou de renouveler un titre de séjour, interdire une entrée sur le territoire ou encore énoncer une mesure d'expulsion ou d'éloignement du territoire. Le droit communautaire vient cependant encadrer l'exercice de telles prérogatives : la mesure doit respecter de nombreuses garanties, prévues par la directive de 1964. Ainsi, tout Etat doit motiver la mesure qu'il prend sauf lorsque la souveraineté ou la sûreté de l'Etat est en cause-, et cela au moment même de sa notification à l'intéressé (CJCE / 28 octobre 1975 / Rutili). [...]
[...] Ainsi, l'article 39 4 rend inapplicable aux emplois dans l'administration publique les dispositions relatives à la libre circulation des travailleurs. Cet article ne comporte cependant aucune définition précise de la notion administration publique La Cour est alors venue la préciser, et la limiter : craignant qu'en étendant trop la notion administration publique elle risquerait de soustraire à l'application des principes du Traité un nombre considérable d'emplois et de créer des inégalités entre les Etats membres elle a défini les emplois visés comme ceux qui comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de la puissance publique, et aux fonctions qui ont pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'Etat ( De tels emplois supposent de la part de leurs titulaires l'existence d'un rapport particulier de solidarité à l'égard de l'Etat, ainsi que la réciprocité de droits et devoirs qui sont le fondement du lien de nationalité (CJCE / 17 Décembre 1980 / Commission contre Belgique). [...]
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