Les décisions de la CEDH ont une grande influence sur le droit national des pays signataires de la Convention. En France, les décisions de la CEDH sont très souvent citées et utilisées comme bases par les juridictions nationales pour éviter de nouvelles condamnations de l'État. Mais il est des cas dans lesquels les décisions de la CEDH prennent une importance telle qu'elles inspirent les évolutions de certains principes et aboutissent à un remaniement du droit national. C'est le cas pour certaines procédures contraignantes comme la procédure d'expropriation, qui a été récemment retravaillée dans le but de devenir plus conforme aux principes de la Convention Européenne des Droits de l'homme.
Dans son article 2, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 présente le droit de propriété comme un « droit naturel et imprescriptible » de l'homme. Quel que soit son fondement philosophique ou politique, le droit de propriété privée est reconnu tant par les États démocratiques que par l'ordre juridique international comme un des droits fondamentaux de la personne.
La Déclaration Universelle des Droit de l'Homme de 1948 nous dit : « 1. Toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété. 2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété ».
Cependant, ce droit doit aussi s'adapter aux nécessités de la politique d'aménagement du territoire et d'urbanisme dictées par l'évolution de la société. La procédure d'expropriation est la procédure par laquelle l'administration peut pour des raisons d'utilité publiques contraindre quelqu'un à lui céder la propriété d'un immeuble ou à renoncer à des droits réels immobiliers sur cet immeuble.
Elle trouve son fondement dans l'article 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen qui nous précise que : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » et dans l'article 545 du code civil (« Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité »).
A la lecture de l'article 17 de la DDHC, on peut voir se dégager deux principes fondamentaux : l'existence démontrée de l'utilité publique de l'opération envisagée et l'indemnisation juste et préalable de la personne expropriée qui sont au cœur de la procédure d'expropriation.
A première vue, il semble que ce droit peut offrir suffisamment de garanties aussi bien contentieuses (intervention de la juridiction administrative et judiciaire) que non contentieuses (procédures d'enquête publique et d'enquête parcellaire).
Cependant, il convient de s'interroger sur le bien fondé d'une telle affirmation. « Beaucoup pensaient que le droit français de l'urbanisme et de l'expropriation restait un bastion inexpugnable du droit national. Ils se trompaient ». En effet, avant les années 2000, ce n'est que dans l'arrêt Guillemin de 1997 que la CEDH s'est attaquée au droit français de l'expropriation, sanctionnant davantage un dysfonctionnement de procédure que le système lui-même. Mais en 2002 et 2003, la CEDH a frappé 3 fois pour condamner la France et son système d'expropriation dans les arrêts Lallement (CEDH 22 avril 2002), Motais de Narbonne (CEDH, 2 juillet 2002) et Yvon (CEDH 24 avril 2003). Se pose la question de savoir si le droit français de l'expropriation est conforme aux grands principes de la Convention.
Plus précisément, on peut se demander si le droit français de l'expropriation n'est pas mis à l'épreuve par la ConvEDH concernant d'une part, le droit au respect de la propriété privée, garanti par l'article 1er du protocole 1 de la Convention et, d'autre part, les garanties procédurales dont doivent disposer les propriétaires en cas de privation et de limitation apportées à ce droit.
La procédure française de l'expropriation a donc été clairement remise en cause par plusieurs décisions de la CEDH (I) mais on peut également s'interroger sur l'impact de la Cour sur la politique foncière en général et sur d'autres procédures contraignantes (II).
[...] Hostiou, c'est d'ailleurs sous l'angle du droit à un procès équitable qu'il faut examiner les apports de ce décret. Ainsi, dans un souci de soumission du commissaire du gouvernement au respect du contradictoire, celui-ci devra désormais notifier ses conclusions aux parties à l'instance au moins huit jours avant la visite des lieux. Par ailleurs, ce dernier perd le monopole absolu de l'expertise qu'il avait en matière d'évaluation des biens, le juge de l'expropriation étant désormais autorisé à désigner un expert. [...]
[...] En l'espèce, la CEDH condamne le droit de préemption de l'administration fiscale en cas de vente. En effet, l'administration considère que l'insuffisance du prix de vente lui permet de mettre en œuvre la procédure de la préemption. En contrepartie l'acquéreur se voit verser le montant du prix stipulé dans l'acte de vente, une majoration légale de ainsi que les frais dus au contrat. Toutefois, le juge administratif réserve le cas d'une atteinte excessive à l'intérêt général et valide dans ce cas la décision de préemption[5]. [...]
[...] Toutefois, certaines dispositions comprennent des garanties permettant aux expropriés de faire valoir leurs droits et de faire respecter le principe d'égalité. La première garantie offerte par la procédure concerne la conclusion à l'utilité publique qui ne peut être décidée qu'après une stricte procédure faisant intervenir différentes enquêtes (l'enquête préalable ou enquête d'utilité publique et l'enquête parcellaire). Si la déclaration d'utilité publique est cependant annulée par le juge administratif, l'exproprié dispose d'un délai de 2 mois à compter de la notification de cette décision pour saisir a posteriori le juge de l'expropriation. [...]
[...] Dans ce contexte, une modification de la législation nationale s'imposait. La loi du 9 mars 2004 tire les conséquences de cette condamnation et juridictionnalise la contrainte par corps. Désormais le juge de l'application des peines, en cas d'inexécution volontaire d'une ou plusieurs condamnations à une peine d'amende, peut ordonner une contrainte judiciaire consistant en un emprisonnement dont la durée est fixée par un magistrat dans la limite d'un maximum fixé par la loi Une modification des autres procédures contraignantes i. [...]
[...] Cette décision ne sanctionnait en effet pas précisément le système même de l'expropriation mais davantage un dysfonctionnement de cette procédure. En l'espèce, la requérante avait obtenu, suite à l'avis favorable formulé par le commissaire enquêteur, l'annulation de la DUP prise contrairement aux dispositions alors en vigueur, l'annulation de l'ordonnance d'expropriation et enfin l'annulation de la décision fixant le montant de son indemnité. La propriétaire illégalement expropriée avait donc intenté une action afin d'obtenir la remise en l'état des lieux ainsi que l'allocation de dommages-intérêts. [...]
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