Depuis les années 2000, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France à plusieurs reprises pour des revirements de jurisprudence mettant en danger les principes de sécurité juridique et de procès équitable de l'article 6.1 de la Cour européenne des droits de l'homme. Face à ces revirements le justiciable peut avoir un sentiment d'insécurité juridique, de justice arbitraire, car il se voit appliquer une solution qu'il ne pouvait pas connaître. Si la base de la sécurité juridique et de l'égalité de tous devant la loi est que nul n'est censé l'ignorer, comment peut-on parler de sécurité juridique face à une jurisprudence rétroactive et qui peut surprendre le justiciable lors des revirements ?
[...] Une modulation pour une meilleure sécurité juridique Si la jurisprudence n'a en théorie pas la compétence pour émettre des règles de droit, c'est dans la pratique ce qu'elle fait. Elle crée des normes qui seront applicables à l'avenir mais peut décider de les changer pour un cas précis, comme si le juge avait un pouvoir législatif. Le justiciable face à cela a une impression d'arbitraire, ne comprend pas pourquoi la solution change pour lui, il peut être surpris car il ne s'attendait pas à cette nouvelle solution. La loi ne peut pas être rétroactive sauf à certaines exceptions restreintes mais la jurisprudence oui, ce qui peut sembler injuste. [...]
[...] Lorsqu'une loi est incomplète c'est peut-être que l'on a voulu laisser le juge libre de son interprétation, on peut donc penser qu'il est meilleur pour le justiciable de savoir que la jurisprudence peut changer s'il existe une solution mieux adaptée à son cas que celles de la jurisprudence antérieure. Dans son arrêt de la 1ere chambre civile du 9 octobre 2001, la cour de cassation estime qu'il est plus juste pour le malade d'obtenir réparation du préjudice qu'il a subi, même si ce n'est pas ce que la jurisprudence antérieure aurait répondu. Il est normal que la jurisprudence soit rétroactive puisque contrairement à la loi elle est faite pour une situation. [...]
[...] Il faut donc trouver des solutions pour que le justiciable ne soit plus surpris par les revirements de jurisprudence et qu'il ait droit à la sécurité juridique. Les solutions pour moduler les revirements Il faudrait une préparation en amont des revirements de jurisprudence pour que ceux-ci soient moins une surprise pour les justiciables. Pour cela les cours françaises pourraient comme dans d'autres pays plus motiver leurs arrêts, expliquer les raisons pour lesquelles elles interprètent la loi de telle ou telle façon afin qu'on puisse voir que pour une autre situation ou avec un changement des mœurs la solution pourrait changer. [...]
[...] Les juges ont en outre pour fonction d'interpréter la loi lorsqu'elle est obscure ou incomplète. Les solutions qu'ils donnent, bien que prévues pour un cas particulier ont aussi un caractère abstrait et permettent de fixer le droit. Lorsque ces solutions ne sont pas retranscrites dans la loi, les juges ont la possibilité d'en changer lorsqu'ils pensent qu'une autre solution serait mieux adaptée à un cas particulier ou à l'évolution de la société. Le problème est qu'en pratique la solution est appliquée pour tous les litiges et a donc une force normative, mais elle peut quand même changer sans que les justiciables soient prévenus, et ce changement a une portée rétroactive puisque la nouvelle solution s'applique à l'instance en cours et donc à des faits qui ont déjà eu lieu. [...]
[...] Il existe des arguments contre la modulation des revirements de jurisprudence(I) mais aussi des arguments pour tenant au principe de sécurité juridique et poussant à la recherche de solutions(II). Les arguments contre la modulation des revirements de jurisprudence Si la jurisprudence peut changer de solution comme elle le veut c'est parce qu'elle n'est pas une source de droit et qu'elle juge un cas précis. La jurisprudence n'est pas une source de droit : l'interdiction des arrêts de règlement La jurisprudence ne crée pas de norme abstraite, applicable à toutes les situations, générale ou impersonnelle, elle n'est pas une source de droit. [...]
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