UE Union Européenne, droit interne, droit français applicable, OPNI Objet politique non identifié, applicabilité du droit de l'UE, hiérarchie des normes, théorie de la loi-écran, Constitution française, ordre juridique français
« L'Union européenne (ci-après l'UE) est une structure technocratique obèse » déclare Marine Le Pen lors de son passage dans le Grand Entretien de France Inter en novembre 2023. Euro-sceptiques de longue date, le Front National puis le Rassemblement National reprochent une érosion de la souveraineté nationale dès le Traité de Maastricht marquant « la fin de la France, la fin de l'histoire de France, la fin de la souveraineté de la France » appelant à un « Frexit » en 2017 pour permettre à la France de récupérer sa « souveraineté monétaire, économique, législative et territoriale ».
Si les propos de l'extrême droite sont provocateurs et reflètent une position plus que radicale et contestable, ils se fondent et exploitent la réalité de la particulière complexité de l'UE. Qualifiée d'OPNI, « objet politique non identifié », ou s'étant « transformée en une entité sui generis », l'UE a su s'affirmer comme une organisation internationale spécifique, marquée par son « ordre juridique propre intégré au système juridique des États membres » selon la Cour de justice des communautés européennes dans sa décision Van End en Loos en 1963.
[...] Selon cette théorie, le juge n'ayant pour habilitation que la seule application de la loi, en contrôler la conformité avec un traité international reviendrait à se placer en juge de la loi. Parce que la hiérarchie établie entre un traité international et la loi française a un fondement constitutionnel, le Conseil d'État considère que son examen soulève un problème de constitutionnalité sortant de son domaine de compétence, se refusant depuis longtemps à exercer un contrôle de constitutionnalité sur les lois Section 6 novembre 1936 Arrighi). [...]
[...] Une fois édictée, la directive européenne doit être transposée en droit interne dans les délais impartis par une loi ou un règlement de transposition. Entrant dans l'ordre juridique interne français et produisant ses effets juridiques en tant que loi ou règlement, la directive européenne acquiert la même position dans la hiérarchie des normes que son acte de transposition. La question est néanmoins plus épineuse vis-à-vis des directives européennes non transposées dans les délais impartis. La France est connue pour son irrespect de l'obligation de transposition. Le principe fixant ces conséquences est posé en 1989 par la décision Alitalia rendue par le Conseil d'État. [...]
[...] Par cette décision, il énonce que la supériorité des traités européens ne vaut pas en droit interne à l'égard des dispositions de nature constitutionnelle. Il ajoute et précise que l'intégration de la France au sein des communautés européennes « ne saurait conduire, dans l'ordre interne, à remettre en cause la suprématie de la Constitution ». La suprématie de la Constitution française en droit interne est d'autant plus protégée par le Conseil d'État qu'elle est réaffirmée en 2004 par le Conseil constitutionnel dans la décision traitée établissant une Constitution pour l'Europe. [...]
[...] La recherche d'une conciliation des obligations européennes avec les exigences constitutionnelles internes Après avoir résolu la question de la place des directives européennes même non transposées dans l'ordre juridique interne le Conseil d'État s'attache à concilier les exigences constitutionnelles du droit interne avec les obligations découlant du droit dérivé de l'UE A. La place des directives européennes transposées dans les délais ou non dans l'ordre juridique interne Les directives européennes sont, selon l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'UE, des catégories de normes de droit dérivé, car susceptibles d'être édictées par les institutions juridictionnelles ou politiques de l'organisation. [...]
[...] Par cette décision, le Conseil d'État choisit d'opérer une lecture stricte et restrictive de la l'article 55 de la Constitution, une lecture « quasi notariale du texte constitutionnel qui ne saurait être favorable à la norme internationale » selon Louis Dubouis. Si la décision affirme la suprématie de la Constitution sur les traités internationaux, elle n'en fait pas découler l'équivalent pour les traités européens. Le Conseil d'État finit néanmoins par confirmer cette solution en 2001 par la décision Syndicat nationale de l'industrie pharmaceutique dans laquelle il reprend la formule de l'arrêt Saran. [...]
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