Le droit au juge dans la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme

Extraits

[...] Ce droit fondamental est ainsi reconnu tant dans différents textes issus de différents pouvoirs normatifs que dans la ou les jurisprudences issues de ces différents pouvoirs qui appliquent ces différents textes. Tout d'abord en droit interne, malgré certaines limitations et marge d'appréciation admises, ce droit est reconnu tout d'abord par le Nouveau Code de Procédure Civile (N.C.P.C.) qui, dans ses dispositions liminaires, détaille tous les principes directeurs du procès. Or, quel intérêt auraient ces principes directeurs du procès s'ils ne pouvaient pas être appliqués ? [...]

[...] C'est pour cela que la jurisprudence de la Cour ne s'arrête pas là, elle a aussi renforcé le souci d'effectivité du droit d'accès à un juge. L'EFFECTIVITE DU DROIT D'ACCES A UN JUGE Il ne suffit pas de garantir un droit abstrait à un juge qui ne pourrait être exercé, mais il faut en outre que ce droit puisse être effectivement exercé par les justiciables. La Cour de Strasbourg a reconnu l'effectivité de ce droit dans plusieurs arrêts. Cependant, l'on peut souligner que l'arrêt fondateur en la matière est l'arrêt rendu par la C.E.D.H le 9 octobre 1979 Airey contre Irlande En effet, la question était de savoir si, à la lumière de la jurisprudence de la CEDH et de l'article 6 de la Convention, le fait qu'un état inscrive formellement le droit d'accès à un juge suffisait ou bien fallait-il que le pays en question prévoit que les justiciables puissent effectivement exercer ce droit, sans obstacles infranchissables comme par exemple le coût. [...]

[...] Ainsi, la même déduction peut être faite que pour la condition d'indépendance : l'impartialité du juge commande l'impartialité de la décision rendue. Or, pour se conformer aux buts de la convention au nombre desquels se trouve l'équité[8], il est nécessaire que les décisions rendues, c'est-à-dire celle qui doivent être exécutées (comme nous l'avons déjà précisé), soient impartiales et, partant, justes. Ce juge qui doit être indépendant et impartial doit en outre être respectueux de la procédure et des principes directeurs du procès. [...]

[...] Ainsi, pour étudier ce droit au juge dans la jurisprudence de la CEDH, il nous faut répondre à une double question : savoir quel juge ce droit vise, comment exercer ce droit et comment la jurisprudence de la CEDH agence ces différentes règles. Pour répondre à ces questions, nous verrons dans une première partie que le droit au juge est un droit-cadre consacré pour ensuite voir dans une deuxième partie que ce droit vise un droit à un juge approprié I-UN DROIT-CADRE CONSACRE La jurisprudence a en effet consacré ce droit général à un juge avant d'affirmer l'obligation de son effectivité A-UN DROIT GENERAL CONSACRE Ce droit au juge bien que déjà reconnu de façon très forte et très claire par la Convention Européenne des droits de l'Homme en son article la CEDH l'a cependant consacré dans un arrêt très célèbre du 21 février 1975 Golder contre Royaume-Uni» le droit à un juge. [...]

[...] A la vérité, si l'on se place dans l'optique des Professeurs Beignier et Brenner et que l'on adopte le point de vue naturaliste des Droits Fondamentaux, nous pouvons dire que ce droit au juge étant le fondement de l'Etat de Droit, est préexistant aux normes écrites, c'est un droit naturel irriguant et influençant toutes les normes de droit. Ainsi, ce droit au juge se trouverait non pas consacré mais simplement reconnu et replacé dans la hiérarchie des normes internes, communautaires et internationales. Ces textes sont mis en œuvre par les juridictions elles-mêmes qui ainsi appliquent et, dans une certaine mesure, créent le droit au juge dans ces différentes sphères juridiques. [...]