Le traité instituant la Communauté européenne (TCE) constitue, d'après la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE), la « charte constitutionnelle » d'une « communauté de droit ». Cette formule est caractéristique du mouvement dit de « constitutionnalisation du droit communautaire », mouvement qui n'est pas sans effets sur les Constitutions des Etats membres, et a fortiori, sur la Constitution française de 1958.
Apparaît dès lors une difficulté : il faut concilier la primauté reconnue par la CJCE au droit communautaire et la primauté reconnue par le juge constitutionnel, mais aussi par les juges judiciaire et administratif à la Constitution française.
De nombreux problèmes découlent de cette divergence : les risques de conflits entre le droit communautaire et la Constitution ne sont plus hypothétiques en raison de l'accélération des transferts de compétence et de la montée en puissance au niveau communautaire de la question des droits fondamentaux (c'est-à-dire des droits inhérents à la personne qui ont reçu une consécration supérieure à la loi dans certains ordres internes et qui bénéficient ainsi d'une garantie renforcée).
En effet, face au silence du constituant dans le traité de Rome (dans lequel seuls le principe de non discrimination et la liberté de circulation des personnes peuvent se rattacher aux libertés fondamentales), la CJCE a reconnu les droits de l'homme à travers la notion de principes généraux du droit communautaire. Ensuite, avec l'Acte Unique Européen de 1986 et le traité de Maastricht d'abord, mais surtout avec le traité d'Amsterdam, le constituant a procédé à la codification de ces principes jurisprudentiels, notamment aux articles 6, 7 et 49 du TUE et aux articles 127, 136, 141, 255 et 286 du TCE. Enfin, en 2000 a été adopté la Charte fondamentale des droits de l'Union. Elle n'a pour l'instant qu'une valeur politique, mais le projet de traité instituant une constitution européenne intègre cette charte.
Dans la mesure où « la percée du droit international ne marque pas nécessairement un progrès pour le droit des libertés publiques », il convient de s'interroger sur la véracité de ce propos au sujet du droit communautaire.
Quel est l'impact des rapports entre le droit communautaire et la Constitution sur l'effectivité de la protection des libertés fondamentales ?
[...] Ce faisant, c'est bien sur le fondement de la Constitution que semble réglé le problème des rapports entre le droit communautaire et la Constitution. Un tel raisonnement conforte l'idée selon laquelle le juge constitutionnel est l' ultime rempart contre l' invasion européenne Il n'est pas question ici de taxer le juge constitutionnel d'euroscepticisme, mais force est de constater qu'un tel raisonnement ne va pas dans le sens de la protection des libertés fondamentales. Droit communautaire et Constitution : une autonomie dommageable L'amoindrissement de l'effectivité de la protection des libertés fondamentales Si elle n'est pas la seule en cause, la politique jurisprudentielle du Conseil Constitutionnel tend à aggraver les conséquences de l‘autonomie du droit communautaire et de la Constitution en matière de droits fondamentaux Le refus du juge constitutionnel d'insérer les principes généraux du droit communautaire dans le bloc de constitutionnalité Le juge constitutionnel refuse de procéder à des révisions implicites de la Constitution par l'insertion dans le bloc de constitutionalité des principes généraux du droit communautaire. [...]
[...] De cette concurrence entre les juges découlent des risques de conflits entre le droit communautaire et la Constitution, conflits qui ne se soldent jamais dans le sens d'une meilleure protection des droits fondamentaux Les risques de concurrence entre les juges communautaire et constitutionnel On a vu que ce n'est pas parce qu'il admet la constitutionnalisation de l'ensemble du droit communautaire que le juge constitutionnel reconnaît la primauté du droit communautaire, loin s'en faut. Pourtant, la protection des libertés fondamentales ne saurait être effective tant que cette concurrence persiste. Les risques de conflit entre le droit communautaire et la Constitution sont très élevés pour deux raisons. En premier lieu, la CJCE n'est pas une cour constitutionnelle européenne. Malgré une jurisprudence constructive et parfois audacieuse, celle-ci ne peut imposer le respect des principes qu'elle édicte aux juridictions nationales. [...]
[...] Toutefois, la constitutionnalisation du droit de l'Union n'entraîne pas supériorité de ce droit sur la Constitution française En l'espèce, le juge a reconnu la spécificité du droit communautaire dans l'ordre interne : il considère toujours que la norme au sommet de la hiérarchie de cet ordre est la Constitution. Il faut noter que si en théorie l'intégration du droit communautaire dans le bloc de constitutionnalité peut également revêtir la forme d'une révision implicite de la Constitution, par l'insertion dans le bloc de constitutionnalité des principes généraux du droit communautaire, le Conseil Constitutionnel refuse d'opérer de telles révisions. Les normes communautaires qui sont devenues normes de référence pour le juge constitutionnel ne le sont que parce qu'elles sont visées expressément par la Constitution. [...]
[...] Le droit communautaire est le droit de la Communauté européenne. Il se compose du droit primaire c'est à dire des traités constitutifs-, du droit dérivé règlements, décisions, directives, avis et recommandations- , des accords externes, des accords interétatiques et de la jurisprudence de la CJCE. Le droit communautaire se caractérise par les notions d'immédiateté, d'applicabilité directe et de primauté. La Constitution du 4 octobre 1958 institue la Vème République. C'est une constitution de type rigide dans la mesure où l'élaboration et la modification de l'ensemble des règles déterminant la forme de l'Etat, la dévolution et l'exercice du pouvoir obéissent à une procédure différente de la procédure législative ordinaire. [...]
[...] Enfin, les risques de conflits entre le droit communautaire et la Constitution peuvent également survenir en raison du refus du juge constitutionnel de poser des questions préjudicielles à la CJCE. En effet, le Conseil constitutionnel, à l'instar des cours constitutionnelles italiennes et espagnoles, ne s'estime pas justiciable de l'article 177TCE. Il estime que son contrôle, exclusivement abstrait et renfermé dans des délais, n'est pas compatible avec la procédure de renvoi préjudiciel. Cette position est regrettable dans la mesure où une telle procédure permettrait d'établir un dialogue entre les juges et permettrait de promouvoir la protection des droits fondamentaux. [...]
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