principe de primauté, système juridictionnel européen, UE Union Européenne, CJUE Cour de Justice de l'Union Européenne, arrêt Costa contre ENEL, TFUE Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne
Le principe de primauté, s'il n'est pas consacré textuellement, est un concept né de la jurisprudence créatrice de la Cour de justice de l'Union européenne. Aussi, notion prétorienne, il a fait l'objet d'une reconnaissance progressive, si bien dans l'ordre juridique international que dans les ordres juridiques internes. Au départ désigné sous le terme de prééminence, le principe de primauté signifie, de façon classique, que les législations nationales sont tenues de respecter le droit communautaire, de sorte qu'en cas de conflit, c'est le second qui primera. Malgré sa reconnaissance certaine désormais, son affirmation n'a été que graduelle et n'a acquis une force réelle qu'à l'issue d'une longue construction jurisprudentielle.
[...] Ainsi, dans l'ordre juridique français, l'attitude du juge est paradoxale. S'il a la charge de garantir l'effectivité du droit de l'UE, motivée par la spécificité de l'Union européenne, il œuvre en faveur du primat du droit interne dès lors que la Constitution est en jeu. C'est notamment cette ambivalence que soulignaient Terry Olson et Paul Cassia, remarquant que la situation française oscillait eu égard à une combinaison complexe des deux ordres juridiques en cause dictée par le monisme français. Cette ambivalence néanmoins conduit l'Union à relativiser le principe de primauté sur lequel elle repose, le délitement de celui-ci ne pouvant qu'être constaté en France face à la norme constitutionnelle. [...]
[...] Le juge national en vertu de l'article 325 TFUE est obligé, au même titre que les États membres, de veiller à l'effectivité et à l'intégration réelle du droit de l'Union européenne dans l'ordre juridique interne, de sorte que les intérêts, d'abord financiers de l'Union bénéficient d'une protection équivalente à celle des intérêts étatiques (CJUE, Gr. Ch décembre 2017, M.A.S. et M. B.). Le juge national, devenu juge communautaire de droit commun, a la charge de garantir le respect et l'application du droit communautaire afin de permettre la constitution d'une union, économique d'abord, de droit ensuite, politique enfin. Effectivement, il découle du principe de primauté un contrôle délégué aux juridictions nationales de la conformité des législations internes au droit communautaire. [...]
[...] En outre, la mobilisation de l'identité nationale pour justifier la suprématie de la Constitution a conduit le juge français en pratique à la concevoir dans un aspect lato sensu afin de paralyser, quand il l'estimera opportun, le droit de l'Union. Le juge a entendu intégrer dans l'identité nationale de l'État plusieurs notions qui ont concouru à créer une supériorité de fait des dispositions nationales. D'abord, en vertu du principe de subsidiarité, le juge national a tenu en échec l'application du droit communautaire au motif d'une protection plus grande et, a fortiori plus efficace de droits fondamentaux. [...]
[...] Effectivement, les systèmes judiciaires internes sont garants de l'efficacité et de l'intégration des normes européennes en droit national, l'exercice de celles-ci ne pouvant être rendu excessivement difficile ou impossible. Il découle de ces engagements contractuels une primauté naturelle du droit de l'Union, d'abord affirmée dans sa dimension « internationale » (CJCE Humblet) avant d'être consacrée dans sa dimension « interne » (CJCE mars 1978, Simmenthal). L'ensemble du droit de l'Union doit ainsi primer le droit interne. Cette conception maximaliste emporte ensuite des effets sur la hiérarchisation de deux ordres initialement distincts. [...]
[...] La Cour de justice tend régulièrement à favoriser l'autonomie procédurale nationale au détriment de sa primauté, une obligation minimaliste de l'obligation du relevé d'office étant retenue (CJCE juillet 1991, Verholen). Le juge jouit en réalité d'une simple possibilité de soulever d'office un moyen tiré de la violation du droit de l'Union. De fait, le droit national demeure largement appliqué en cette hypothèse, a contrario des dispositions européennes, portant un coup décisif au principe de primauté. Si l'applicabilité de telles dispositions dépend de son opportunité appréciée par le juge national, il faut convenir que la primauté est davantage relative qu'absolue s'agissant de sa protection juridictionnelle concrète. [...]
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