Le Commissaire du gouvernement est un personnage-clé de la juridiction administrative française. Son origine est ancienne : cette institution date d'une ordonnance du 12 mars 1831. Au départ, comme son nom l'indique, elle était conçue pour représenter le point de vue du gouvernement mais, très rapidement, au plus tard en 1852, cette fonction disparut. Le titre est resté, mais est trompeur. L'institution est devenue depuis l'une des originalités les plus marquantes de la juridiction administrative française, notamment parce que le commissaire du gouvernement s'est rapidement affirmé comme un magistrat totalement indépendant des parties. Il existe un commissaire du gouvernement non seulement devant le Conseil d'Etat, mais aussi devant les autres juridictions administratives (tribunaux administratifs et cours administratives d'appel) ainsi que devant le Tribunal des conflits.
Or, depuis un récent arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme, le rôle du Commissaire du gouvernement se voit remis en cause.
On peut s'interroger sur les conséquences qu'aura l'arrêt Kress sur cette institution symbolique de notre juridiction administrative : dans quelle mesure cette institution est-elle menacée ?
[...] Comme le souligne Bruno Genevois, il s'agit simplement d'un membre de la juridiction qui est associé au processus d'élaboration de la décision contentieuse dès la séance d'instruction. Cette association trouve son illustration la plus tangible au cours de l'audience publique et se prolonge lors du délibéré, même si à ce stade ultime le rôle du commissaire est très réduit. Il faut aussi ajouter que le commissaire du gouvernement joue un rôle traditionnellement très important dans la formation de la jurisprudence administrative : la plupart des grandes innovations jurisprudentielles sont intervenues à la suite de conclusions célèbres du commissaire du gouvernement. [...]
[...] Certes, il s'agit d'une décision prévisible au regard des arrêts antérieurs rendus par la CEDH. En effet, c'est surtout l'arrêt Borgers[3], adopté en séance plénière à une majorité de 19 voix contre qui a réellement ouvert de nouvelles perspectives. Dans cet arrêt par lequel elle a rompu avec sa jurisprudence antérieure, la Cour a estimé que l'intervention du parquet de la Cour de cassation belge constituait une violation de l'article 6 de la Convention, et ce, pour deux motifs cumulatifs : tout d'abord le fait qu'aucune note ne soit reçue après que le ministère public eut présenté ses conclusions, et celui que ce même ministère public avait le droit d'assister au délibéré. [...]
[...] Par là, en empêchant le commissaire de prendre la parole au cours du délibéré, le gouvernement juge avoir pris la mesure d'exécution adéquate. Or, comme le juge Hélène Tigroudja[8], les mesures adoptées par le président de la section du contentieux ne sont pas propres à satisfaire à l'obligation d'exécution de l'arrêt. Ce n'est pas tant la nature juridique de la mesure d'exécution qui pose problème ( Son contenu est davantage problématique en ce qu'il se contente de recommander aux commissaires de s'abstenir de prendre l'initiative de demander la parole au délibéré Toute participation au délibéré n'est donc pas exclue, dans la mesure où le commissaire du gouvernement pourra être amené à répondre aux questions des juges Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, quant à lui, a également estimé que le gouvernement français n'avait pas pris les mesures d'exécution adéquates. [...]
[...] Ainsi, le grief principal de la requête est donc écarté par la Cour Européenne des Droits de l'Homme, ce qui a d'ailleurs été salué par la doctrine. Comme le souligne Bruno Genevois[2] : À cet égard, l'arrêt de la Cour est rassurant, car une solution autre, empreinte de formalisme, aurait eu pour conséquence d'obérer gravement le bon fonctionnement de la justice administrative en France Nous allons voir que c'est sur un autre point soulevé par la requérante que l'arrêt, de façon inattendue, a eu le plus de retentissement. [...]
[...] Au départ, comme son nom l'indique, elle était conçue pour représenter le point de vue du gouvernement, mais très rapidement, au plus tard en 1852, cette fonction disparut. Le titre est resté, mais est trompeur. L'institution est devenue depuis l'une des originalités les plus marquantes de la juridiction administrative française, notamment parce que le commissaire du gouvernement s'est rapidement affirmé comme un magistrat totalement indépendant des parties. Il existe un commissaire du gouvernement non seulement devant le Conseil d'Etat, mais aussi devant les autres juridictions administratives (tribunaux administratifs et cours administratives d'appel) ainsi que devant le Tribunal des conflits. [...]
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