La libre prestation de services est la liberté de fourniture d'un service, dans un autre Etat membre, autre que salarial moyennant rémunération. L'article 50 du traité de la communauté européenne (TCE) énonce une liste de ces activités mais celle-ci n'est pas limitative. En principe, le prestataire de service et le bénéficiaire ne résident pas dans le même pays, et la prestation peut intervenir sans déplacement de personnes. A ce propos, la Cour de justice a rendu l'arrêt Alpine Investment à commenter du 10 mai 1995. Il s'agit d'une société établie au Pays-Bas et spécialisée dans les contrats à terme de marchandises. Le ministre des finances néerlandais a posé une interdiction générale aux intermédiaires financiers proposant des placements dans le commerce à terme et hors bourse de marchandises de contacter des clients potentiels par « cold calling », c'est-à-dire en leur téléphonant, suite aux nombreuses plaintes qu'il avait reçues d'investisseurs ayant faits des placements malheureux dans ce domaine. Cette interdiction a été étendue aux services offerts dans d'autres Etats à partir des Pays-Bas afin de préserver la réputation du secteur financier néerlandais. Une exception a cependant été admise : il est possible de se mettre en relation avec des clients potentiels par téléphone, si ceux-ci ont autorisé de manière expresse et par écrit un tel contact. La société Alpine Investment a remis en cause la conformité d'une telle interdiction à l'ancien article 59, devenu l'article 49 TCE qui dispose que « dans le cadre des dispositions visées ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation ». Le Collège van Beroep a donc saisi la Cour de trois questions préjudicielles sur le fondement de l'ancien article 177, devenu l'article 234 TCE. Cet article permet à la Cour se prononcer notamment sur l'interprétation du traité et en l'espèce l'article 49 TCE.
La première consiste à savoir si l'article 49 TCE vise-t-il également les prestations de services que le prestataire offre par téléphone à partir de l'Etat membre dans lequel il est établi à des clients établis dans un autre Etat membre et exécute sans se déplacer. La seconde vise à reconnaître ou non l'existence d'une restriction à la libre prestation de services car les entraves ne s'appliquent pas ou dans différentes conditions à ceux qui assurent des prestations de services similaires et sont établis dans cet autre Etat membre. La troisième ne se pose que si la Cour reconnaît l'existence de la restriction à la libre prestation de services. Elle tend à montrer les raisons impératives d'intérêt général qui justifieraient l'entrave reconnue et si l'interdiction doit être considérée comme objectivement nécessaire pour protéger les intérêts et proportionnée au but poursuivi.
L'intérêt de ces questions réside dans le fait de savoir si l'interdiction du cold calling relève du champ d'application de l'article 49 TCE et si oui, si cette interdiction peut être justifiée.
La Cour de justice a répondu que l'article 49 TCE vise une telle situation, que l'interdiction du cold calling constitue bien une restriction à la libre prestation de services, mais que celle-ci était justifiée car elle protège la confiance des investisseurs dans les marchés financiers nationaux.
Ainsi, il convient de voir tout d'abord l'existence d'une restriction à la libre prestation de services (I), puis sa conformité au droit communautaire (II).
[...] En effet, seules les prises de contact par téléphone avec de potentiels clients sont interdites, mais les autres techniques ne le sont pas. De plus, cette mesure n'affecte pas les relations avec les clients existants qui peuvent consentir par écrit à être contactés par téléphone. Enfin, cette restriction est limitée au marché des contrats à terme des marchandises. La Cour répond donc à la troisième question en considérant que l'interdiction du cold calling ici n'est pas contraire au droit communautaire car elle est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général et est objectivement nécessaire et proportionnée au but poursuivi. [...]
[...] Cette forme de libre prestation de service est d'ailleurs nommée active car le prestataire de services va rechercher lui- même des clients étrangers. Ensuite, il s'agit de savoir si cet article concerne les services qu'un prestataire offre par téléphone à des personnes établies dans un autre Etat membre et qu'il fournit sans se déplacer à partir de l'Etat membre dans lequel il est établi Pour la Cour, la réponse est évidente. En effet, elle estime qu'il découle des termes mêmes de l'article 49 qu'il s'agit, de ce fait, d'une prestation de services au sens de cette disposition Elle en conclut que l'article 49 TCE doit être interprété en ce sens qu'il concerne les services qu'un prestataire offre par téléphone à des destinataires potentiels établis dans d'autres Etats membres et qu'il fournit sans se déplacer à partir de l'Etat membre dans lequel il est établi répondant ainsi à la première question préjudicielle posée. [...]
[...] La société Alpine Investment a remis en cause la conformité d'une telle interdiction à l'ancien article 59, devenu l'article 49 TCE qui dispose que dans le cadre des dispositions visées ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation Le Collège van Beroep a donc saisi la Cour de trois questions préjudicielles sur le fondement de l'ancien article 177, devenu l'article 234 TCE. Cet article permet à la Cour se prononcer notamment sur l'interprétation du traité et en l'espèce l'article 49 TCE. [...]
[...] En somme, la Cour estime que le maintien de la bonne réputation du secteur financier national peut donc constituer une raison impérieuse d'intérêt général susceptible de justifier des restrictions à la libre prestation de services financiers La réglementation de l'Etat néerlandais ne vise pas en l'espèce à favoriser ses entreprises nationales puisqu'elle limite les modalités de prise de contact avec les clients potentiels. A contrario, elle favorise un autre objectif: celui de la bonne réputation de son marché financier. On remarque ici que l'intérêt général national est favorisé par rapport au droit communautaire. [...]
[...] Tout d'abord, elle s'est demandée si le fait que les prestataires de services établis dans d'autres Etats membres où résident des destinataires potentiels ne sont pas nécessairement soumis à la même interdiction ou pas selon les mêmes modalités montre que l'interdiction du ministre des finances néerlandais est une restriction à la libre prestation de services. Pour la Cour, cet élément seul ne suffit pas à caractériser la restriction. Cependant, elle précise que l'interdiction prive les opérateurs d'une technique rapide et directe de publicité et de prise de contact avec des clients potentiels se trouvant dans d'autres Etats membres donc elle est susceptible de constituer une restriction. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture