Dans l'arrêt Handyside C/ Royaume-Uni du 7 décembre 1976, la Cour européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Cour EDH) considère que « la liberté d'expression constitue l'un des fondements essentiels de pareille société, l'une des conditions de son progrès et de l'épanouissement de chacun ».
A travers cette affaire, la Cour EDH a été amenée à montrer son attachement profond à la préservation de la liberté d'expression quelle que soit la manière dont elle s'exprime. Elle adopte une position relativement large du respect de la liberté d'expression qui a notamment pu nourrir les controverses doctrinales. Nous serons ainsi amenés à nous poser la question suivante : la Cour européenne des droits de l'Homme est-elle la garante intransigeante de la liberté d'expression ?
La Cour EDH statue sur des sujets relatifs aux libertés fondamentales qui peuvent être divers et variés. Instituée par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (article 19 à 51), elle a pour mission première d'interpréter et d'appliquer la convention qui lui a donné corps. C'est une juridiction spécialisée dont les décisions couvrent l'ensemble des branches du droit, de sorte qu'elles ont un vaste rayonnement, qui leur permet d'atteindre les ordres juridiques internes, européen ou même international.
Elle a été amenée à de nombreuses reprises à rendre des arrêts en matière de litiges relatifs à la liberté d'expression. Elle a pu offrir des solutions controversées en ce domaine, notamment parce qu'elles ont pu paraître à certains égards contradictoires. Pour savoir si elle peut véritablement être perçue comme la garante de la liberté d'expression, il convient d'étudier, à travers sa jurisprudence, si elle se pose véritablement en tant que responsable de la préservation de la liberté d'expression à l'échelle européenne, si elle s'engage à faire respecter ce principe, et enfin si elle répond des responsabilités qui lui incombent en ce domaine. Elle se doit d'assurer la prééminence de l'article 10 de la CEDH, qui garantit la liberté d'expression, en droit interne, notamment lorsque des requérants invoquent sa violation.
La liberté d'expression à ce titre comporte deux aspects : d'une part, celui que l'on est amené à percevoir dans le langage courant, et d'autre part, celui que l'on invoque traditionnellement dans le paysage juridique. La liberté d'expression est communément perçue comme une certaine autonomie, une indépendance dans l'émanation, l'extériorisation ou la manifestation d'une idée, d'un sentiment, ou d'une opinion. C'est lorsque l'on peut exprimer une pensée sans être sous la dépendance de quelqu'un. Il s'agit alors de pouvoir agir sans contrainte (...)
[...] Elle est intransigeante, et inflexible alors qu'il s'agit d'une question relativement sensible puisqu'il est tentant d'opposer à leur liberté d'opinion un devoir de réserve plus ou moins rigoureux, ou même une obligation de loyauté vis-à- vis du gouvernement. L'arrêt du 26 septembre 1995 Vogt c/Allemagne est un exemple topique: la Cour EDH juge que la révocation d'une enseignante membre du parti communiste allemand à titre de sanction disciplinaire pour manquement à son obligation de loyauté politique constitue une ingérence disproportionnée dans l'exercice de la liberté d'expression. Elle considère que la liberté d'expression est absolue, en ce sens que chacun doit pouvoir penser ce qu'il veut. [...]
[...] Ainsi, quel que soit parfois le contenu des articles journalistiques la liberté d'information est consacrée, tout comme celle de diffuser des messages publicitaires. La liberté d'information concerne non seulement le message, mais son support qu'ils s'agissent de la parole, de l'écrit, du son ou de l'image, et quel que soit le procédé technique utilisé: presse, radio, télévision, supports électroniques. La liberté d'information est consacrée par la Cour EDH à travers la protection du contenu des messages, y compris les messages publicitaires comme elle a pu l'illustrer avec l'arrêt Groppera Radio AG c/Suisse du 28 mars 1990, mais également par leur mode de diffusion (CEDH, Autronic 22 mai 1990). [...]
[...] Même si elle a récemment infléchi sa jurisprudence, la Cour EDH est intransigeante en matière de liberté d'expression aux dépens d'autres exigences, notamment le droit au respect de la vie privée, de respect de la réputation d'un individu, ou de la présomption d'innocence. Elle a pu jugé dans l'affaire Sunday Times du 26 avril 1979 qu'était jugée contraire à l'article 10 de la CEDH, l'interdiction faite à un journal de publier des informations sur des procès en cours. Était en jeu pourtant le caractère effectif d'une bonne administration de la justice puisque la publication de l'ensemble de ces éléments d'information pouvait avoir pour conséquence une pression médiatique plus forte préjudiciable au bon déroulement du procès. [...]
[...] L'intransigeance pratique de la Cour EDH ne peut aller au delà des limites et restrictions posées par les textes eux mêmes. Nous constatons également une souplesse de la Cour EDH dans sa volonté de préserver la liberté d'expression en raison de circonstances contextuelles spécifiques dont il faut nécessairement prendre en compte les caractéristiques. B-Une souplesse exigée par les circonstances contextuelles La Cour EDH reconnaît des limites à la préservation de la liberté d'expression lorsqu' entrent en compte des considérations religieuses, terrain relativement sensible sur lequel elle admet certaines restrictions, et lorsque des obligations constitutionnelles empêchent le libre exercice de la liberté d'expression. [...]
[...] Il ne s'impose qu'en raison de contraintes techniques particulières notamment en matière de radiodiffusion, ou de télévision. Cet article réserve ainsi aux Etats la possibilité de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisation Ainsi, la CEDH peut être amené à constater la mise en oeuvre de restrictions par les Etats à la liberté d'expression sans qu'elle puisse intervenir puisqu'il s'agit là d'une possibilité offerte aux Etats par les textes européens. Un encadrement de l'exercice de la liberté d'expression s'illustre également en matière de préservation de l'ordre public. [...]
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