Le droit communautaire garantit la libre prestation de services ainsi que la libre circulation des travailleurs, ce qui incite au développement de prestations de services transnationales, donc au détachement de travailleurs d'un Etat vers un autre Etat. L'article 2 de la directive 96/71 du 16 décembre 1996 relative au détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services définit le détachement comme le fait, « pour tout travailleur, pendant une période limitée, d'exécuter son travail sur le territoire d'un Etat membre autre que l'Etat sur le territoire duquel il travaille habituellement ». La notion de détachement peut recouvrir trois situations différentes : il peut s'agir d'un détachement dans le cadre d'une prestation de services opérée par l'employeur dans un Etat membre, d'un détachement dans une entreprise ou un établissement appartenant à un groupe, ou de la mise à disposition de travailleurs auprès d'une entreprise utilisatrice dans un Etat membre, étant entendu qu'il doit toujours y avoir maintien de la relation de travail avec l'entreprise d'envoi. Ainsi un travailleur portugais qui travaille habituellement au Portugal peut être envoyé en France pour trois mois pour y effectuer des travaux sur un chantier.
Toute prestation de services transnationale soulève donc un problème de conflit de lois dans l'espace, puisqu'il faut savoir quelle(s) est (sont) la (les) loi(s) qui régi(ssen)t le contrat de travail du travailleur détaché, problème auquel la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles, adoptée le 19 juin 1980 et entrée en vigueur le 1er avril 1991, apporte une première solution, en orientant généralement la solution vers l'application de la loi du lieu de travail habituel.
Or il peut être tentant pour un employeur de s'installer dans un Etat dont les règles sociales sont peu contraignantes pour lui (dans notre exemple le Portugal), puis d'envoyer ses salariés travailler, sous l'empire de sa loi (donc la loi portugaise), en France, alors que la loi du pays de détachement (ici la France) serait plus protectrice des salariés et donc plus contraignante pour l'employeur. Les disparités sociales et économiques entre les différents Etats membres, accentuées par le récent élargissement de l'Union Européenne, sont ainsi susceptibles de créer un risque de dumping social et de concurrence déloyale entre les entreprises. Assez rapidement, la Cour de Justice des Communautés Européennes est donc intervenue pour ouvrir la faculté aux Etats membres de s'écarter des rattachements prévus à l'article 6 de la Convention de Rome, afin d'appliquer les prescriptions impératives de la loi du lieu de détachement (CJCE, 27 mars 1990, Rush Portuguesa). Puis les autorités communautaires ont voulu aller plus loin, en transformant cette faculté en une obligation : c'est dans ce contexte qu'a été adoptée, non sans difficulté, la directive 96/71 du 16 décembre 1996 relative au détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services.
La Convention de Rome et la directive 96/71 sont parfois amenées à régir toutes deux la même situation, ce qui soulève le problème de leur articulation : quelles sont donc les différentes lois applicables au contrat de travail d'un travailleur détaché dans le cadre d'une prestation de services transnationale ?
L'analyse des articles 6 et 7 de la Convention de Rome et de l'article 3 de la directive 96/71 permet dans un premier temps de dégager les différentes lois qui sont susceptibles d'être appliquées au contrat de travail d'un travailleur détaché (I). Il est ensuite possible, dans un second temps, de déterminer la ou les loi(s) impérative(s) à appliquer (II).
[...] La priorité de la directive 96/71 sur la Convention de Rome Les textes en cause sont l'article 20 de la Convention de Rome et le considérant 11 du préambule de la directive 96/71, qui posent le principe de la priorité du droit communautaire, donc de la directive 96/71, sur la Convention de Rome en cas de contradictions. Or les articles 3 de la directive 96/71 et 6 et 7 2 de la Convention de Rome se contredisent, puisque le premier vise les dispositions impératives de la loi du lieu détachement alors que les articles 6 et 7 2 visent les dispositions impératives de la loi du lieu de travail habituel. [...]
[...] En outre, l'article 3 de la directive concrétise l'article 7 de la Convention de Rome dans un domaine précis : alors que l'article 7 vise les lois de police pour tous les contrats internationaux, l'article 3 de la directive vise les lois de police pour les contrats de travail internationaux de travailleurs détachés. Ici la loi d'un seul Etat est concernée (contrairement à la Convention de Rome) : la loi du lieu de détachement. On peut donc parler d'un rattachement territorial. En effet, en vertu de l'article 3 de la directive, il faut obligatoirement appliquer aux travailleurs détachés certaines règles concernant les conditions de travail et d'emploi de la loi du lieu de détachement, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail. [...]
[...] La Convention de Rome et la directive 96/71 sont parfois amenées à régir toutes deux la même situation, ce qui soulève le problème de leur articulation : quelles sont donc les différentes lois applicables au contrat de travail d'un travailleur détaché dans le cadre d'une prestation de services transnationale ? L'analyse des articles 6 et 7 de la Convention de Rome et de l'article 3 de la directive 96/71 permet dans un premier temps de dégager les différentes lois qui sont susceptibles d'être appliquées au contrat de travail d'un travailleur détaché Il est ensuite possible, dans un second temps, de déterminer la ou les loi(s) impérative(s) à appliquer (II). I. Les différentes lois susceptibles d'être appliquées au contrat de travail d'un travailleur détaché A. [...]
[...] Il faut savoir que les domaines qu'entend régir la directive ont fait l'objet, pour la plupart, d'une harmonisation européenne (voir notamment la directive 93/104 du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et la directive 94/33 du 22juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail). On trouvera donc dans ces matières à peu près les mêmes planchers dans l'ensemble des Etats membres de l'Union Européenne. Ce qui a pour principale conséquence que c'est seulement si les règles du pays où s'exécute la prestation de services sont plus favorables aux salariés que l'on appliquera la directive. [...]
[...] Dans ce cas c'est la Convention de Rome qui s'appliquerait prioritairement à la directive. Il existe en outre quelques dérogations au principe énoncé précédemment. Ainsi pour les travaux de montage et de première installation lors d'un détachement de moins de huit jours, la directive est inapplicable pour ce qui est du salaire minimum et de la durée des congés payés annuels, sauf dans le domaine de la construction. Il existe également une possibilité pour les Etats membres d'exclure l'application de la directive, en ce qui concerne le taux de salaire minimum, pour les détachements de moins d'un mois, sauf en cas de mission de travail temporaire ou intérimaire, et pour les travaux de faible ampleur, mais seulement pour les salaires et périodes maximales de travail et minimales de repos. [...]
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