Le droit français de l'expropriation est considéré comme « un héritage de famille », caractérisé par une très grande stabilité de ses fondements ainsi que de ses structures, selon le professeur Hostiou.
En effet, cette stabilité est nécessairement issue de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en son article 17 et du Code Civil en son article 545. Le droit français est très fortement marqué, depuis la loi du 8 mars 1810, par le dualisme juridictionnel. Ce droit est souvent présenté comme « l'archétype » de ce que le système français peut offrir de meilleur en matière de protection des droits et libertés individuelles dans la mesure où il associe garanties non contentieuses (articulées autour des procédures d'enquête publique et d'enquête parcellaire) et de garanties contentieuses.
Mais au-delà de cette vision du droit français, on peut constater que la Convention européenne des droits de l'Homme exerce une influence sur ce droit. En effet, cette dernière a été signée à Rome le 4 novembre 1950, ratifiée par une quarantaine de pays dont la France. La Cour européenne des droits de l'Homme a ,elle, été créée en 1959. Depuis 1981, les citoyens français disposent d'un droit de recours individuel qui leur permet, après épuisement de l'ensemble des voies de recours internes, de saisir directement les instances de Strasbourg. S'agissant du droit de l'expropriation pour cause d'utilité publique, la France n'a toutefois été sanctionnée qu'une seule fois, notamment dans l'arrêt Guillemin contre France rendu le 21 février 1997 par la Cour Européenne des droits de l'Homme. La Cour, cependant, ne dispose d'aucun pouvoir d'autosaisine et elle ne peut se prononcer, en conséquence, que sur les litiges qui lui sont déférés. De plus, les cas dans lesquels cette dernière a eu à connaître du droit français de l'expropriation ont été jusqu'à présent très peu nombreux.
Dès lors, quelle est l'influence de la Convention et de jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme sur le droit français de l'expropriation ?
[...] On peut constater que ce droit au respect de la propriété privée se trouve mieux protégé par l'influence qu'a la Convention et la Cour européenne des Droits de l'Homme sur le droit français de l'expropriation. Mais en dehors de ce principe, on peut relever également la consécration du principe du droit à un procès équitable. II. La conformité obligatoire du droit français au principe du droit à un procès équitable Cette conformité se perçoit par l'obligation d'impartialité et d'indépendance du tribunal et d'« égalité des armes Mais on peut notamment noter les incidences de la conception européenne du droit à un procès équitable sur le droit français : le droit à un délai raisonnable en faveur de l‘exproprié A. [...]
[...] Pour Bruno Genevois, l'individu devrait plutôt rechercher à légitimer sa propre législation. Cependant, on peut constater que la transposition de principes relevant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme au droit français, est de nature à soulever un certain nombre de difficultés et à générer parfois quelques incertitudes. Ces principes sont en tout au nombre de deux. Ils concernent les conditions même du recours à l'expropriation, ainsi que le déroulement de la procédure susceptible d'être appliquée à cette dernière ; en référence à l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention et de l'article 6 paragraphe premier de la Convention elle-même. [...]
[...] Pour cela, la loi du 2 février 1995 et les nouvelles dispositions de l'article L.12-5 alinéa du Code de l'Expropriation viennent résoudre le problème. Il s'agit ici du problème des conséquences du dualisme juridictionnel en matière d'expropriation. On considérait, en effet, que l'annulation par les juridictions administratives de la déclaration d'utilité publique ou de l'arrêté de cessibilité était dépourvue d'incidences sur la validité du transfert de propriété ; le dualisme juridictionnel conduisant en définitive à entériner le fait qu'une opération d'expropriation illégale puisse néanmoins être irrévocable. Cette situation a fait l'objet de nombreuses critiques. [...]
[...] - La mise en évidence des exigences issues de la Convention européenne des Droits de l'Homme ouvre des perspectives non négligeables quant à l'évolution à court terme du droit français de l'expropriation. Comme le met en avant le professeur René Hostiou, il serait du plus grand intérêt de pouvoir faire état de l'analyse portée par la Cour européenne, par exemple sur les dispositions régissant l'évaluation des biens au regard du principe de proportionnalité de l'ingérence Mais ce principe qui inspire la jurisprudence de la Cour se prête mal à la systématisation et risque de conférer à toute transposition un caractère hautement spéculatif selon le professeur René Hostiou. [...]
[...] Elle retient qu'en faisant partir le délai de recours contre un tel acte à compter de la date de publication, le droit français était en contradiction avec le principe du droit à un procès équitable, selon un arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme du 28 décembre 1992, de Geouffre de la Pradelle. - Quant au droit au respect de délais raisonnables, l'arrêt Guillemin contre France a pour la première fois, donné l'occasion à la Cour européenne de sanctionner certaines des dérives affectant le droit français de l'expropriation. En effet, en l'espèce, lorsque l'expropriée saisira enfin les instances européennes, elle obtiendra la condamnation de l'Etat français en raison du retard apporté par la commune à répondre aux sollicitations qui lui avaient été présentées. [...]
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