La Cour autorise les Etats à apporter des restrictions à la manifestation de la liberté de religion au nom de la laïcité alors que ce terme n'apparaît nullement dans l'article 9. Il semble être conféré à la sphère étatique. Cependant, la Cour elle-même se prononce à ce sujet en reconnaissant le principe de la laïcité au niveau interne. Les Etats, sous le contrôle de la Cour peuvent ainsi mener une politique de neutralisation. L'actualité bouleverse et fait songer à un phénomène européen de sécularisation. L'arrêt Lausti contre Italie, relatif à l'interdiction de la présence de crucifix dans les salles d'écoles publiques, pose manifestement la question d'une convergence européenne vers une neutralisation limitatrice de la manifestation de la religion. La question de la formation d'une laïcité européenne se posera ainsi au cours de notre étude. Malgré la diversité que connaît l'Europe des droits de l'Homme, est-ce que la Cour peut consacrer une conception européenne de la laïcité ?
L'éventuelle influence du droit communautaire avec l'entrée en vigueur de la Charte des droits fondamentaux sur le droit européen, inclus dans le Traité de Lisbonne, ne sera pas traitée. Notre étude portera en effet sur le droit relatif aux convictions religieuses ou liées à la religion en droit européen compte tenu du large domaine d'application de celui-ci sur cette question.
Nous nous attacherons à présenter comment en protégeant la liberté religieuse des individus (I), la Cour est venue consacrer une conception de la laïcité, entendue comme principe général d'organisation de cette liberté spécifique dans les sociétés démocratiques (II).
[...] L'article 9 touche à des fondements de l'histoire des Etats qui ont parfois déterminé leur système juridique. A cela s'ajoute la présence de différents régimes cultuels sur un même territoire. La France admet ainsi une diversité de régimes, puisqu'elle accepte une certaine atténuation de la laïcité, avec le régime départemental confessionnel de Guyane[44] et le droit cultuel local d'Alsace Moselle[45]. L'organisation constitutionnelle des Etats est également source de divergences au sein du même Etat comme le montre l'exemple allemand ou les Länder catholiques du sud n'ont pas la même sensibilité à ces questions que les Länder du Nord, dichotomie illustrée notamment par le débat récent sur les crucifix dans les écoles bavaroises.[46] Ainsi, au sein de l'espace juridique européen, entre les Etats, et même parfois entre les territoires d'un même Etat, de nombreux régimes cultuels cohabitent ce qui semble rendre impossible une harmonisation des droits en matière de liberté religieuse. [...]
[...] Au premier abord, nous serions en droit de penser que la reconnaissance d'une religion majoritaire sous forme de religion officielle serait contraire à la laïcité et à la démocratie. A contrario, la reconnaissance d'une religion minoritaire serait l'expression même de la liberté de religion. Pourtant la Cour s'en tient à vérifier l'égalité de traitement des communautés religieuses, c'est une conséquence de la liberté de religion pour tous et du droit de chaque religion à la reconnaissance, elle va de pair avec le pluralisme des sociétés démocratiques. [...]
[...] Mais ce pouvoir discrétionnaire est soumis au contrôle d'un juge, qui in fine soumet ces mesures à son propre pouvoir d'appréciation. Ainsi, la Cour a côté de son contrôle classique sur les actes juridiques et les comportements de l'exécutif, va également contrôler la validité et la qualité de la loi, ainsi que les décisions des juges nationaux. Dans l'affaire Hassan et Tchaouch, après avoir statué sur l'existence de l'ingérence, la Cour vérifie si cette ingérence est prévue par la loi La Cour déclare : l'expression ‘'prévues par la loi'' figurant aux articles 8 à 11 de la Convention non seulement exige que la mesure incriminée ait une base en droit interne, mais vise aussi la qualité de la loi en cause. [...]
[...] Un patrimoine commun à l'Europe Projet n°240, 1994-1995, p7-15. Du même auteur : Europe et religions-Les enjeux du XXI e siècle, Fayard, Bibl. de culture religieuse, les Dieux dans la Cité p 44-52. Alain Garay, article cité. La commission nationale consultative des droits de l'homme énonce à ce titre dans le chapitre précité (note 63) que l'image d'une France îlot de laïcité dans un océan clérical relève de la caricature engendrée par l'ignorance de l'étranger Arrêt CEDH février 2001, Dahlab Suisse (req. [...]
[...] Il paraît en effet douteux de considérer cette interdiction comme la conséquence d'une tendance actuelle, au regard des législations de divers Etats membres.[114] Cette harmonisation peut être discutée et laisse planer l'inquiétude selon laquelle la Cour aurait au service de la formation d'une laïcité européenne fait œuvre d'uniformisation volontariste. La Cour serait allée au-delà du rôle qui lui est assigné. Dossier Courier international, de la Suisse en particulier et de l'Islam européen en général n997, du 10 au 16 décembre 2009. Un minaret est un élément architectural d'une mosquée. [...]
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