Le Comité de Groupe Européen (CGE) a très vite trouvé sa raison d'être depuis les années 1980, dans les grands groupes de dimension communautaire. Leur présence devenait nécessaire pour de multiples raisons telles qu'une meilleure vision des salariés de ce qu'est leur entreprise mais également leur permet une meilleure information sur la marche générale de leur entreprise. C'est justement, en l'espèce ce dont quoi il va s'agir dans ces deux décisions. La première est une ordonnance de référés délivrée par le Président du TGI de Nanterre le 4 avril 1997. La seconde est l'Appel sur lequel a abouti cette 1re ordonnance datant du 7 mai 1997, rendu par la Cour d'Appel de Versailles.
Dans les faits, la société française Renault a créé, par un accord du 5 avril 1995, un comité de groupe Européen dans un but expérimental et ce, pour une durée de deux ans. Un accord du 5 mai 1995 a repris ce CGE en y précisant les modalités de fonctionnement qui s'y rattachent. Cet accord faisant référence très nette à la directive Européenne du 22 septembre 1994 faisant obligation aux grands groupes Européens d'instaurer des CGE.
Le 27 février 1997, le PDG de Renault annonce publiquement la fermeture d'un des sites du groupe situé en Belgique : Vilvoorde.
Une réunion avec le CGE est alors organisée le 11 mars de la même année.
Le CGE Renault demande au juge d'intervenir pour faire cesser ce qu'il considère comme un trouble manifestement illicite puisque la direction n'a pas respecté son obligation d'information et de consultation du CGE avant de prendre sa décision de fermeture.
[...] En effet, cette directive de 1994 étant, comme vu précédemment peu précise lorsqu'elle fait mention de l'obligation d'information et de consultation, le juge français avait toute liberté d'opérer l'interprétation qui lui plaisait. Il a alors préféré semble-t-il faire primer quoi qu'il arrive les droits sociaux accordés aux travailleurs et ce, à travers leur représentation au sein de l'entreprise en allant jusqu'à créer une possibilité d'antériorité obligatoire de consultation et d'information alors qu'elle n'est mentionnée à aucun moment dans les textes. [...]
[...] Elle va cependant réformer l'ordonnance de référés en précisant que l'antériorité de la consultation n'est pas automatique et ne doit intervenir que pour les décisions ayant un impact important sur l'emploi. Elle va également balayer la question de la compétence territoriale abordée par la défense et décider le juge français compétent du fait de la nationalité française de la société. La Cour d'Appel va donc baser son raisonnement sur deux éléments : sur le manquement effectif de la direction à son obligation découlant de l'accord de 1995 mais également que ce manquement est d'autant plus important du fait de son impact social. [...]
[...] Elle considère ainsi que la loi de transposition de la directive est en ce sens bien différente de la consultation préalable du Comité d'Entreprise prévue par le Code du travail français et que le magistrat a en l'espèce opéré une confusion grossière. De ce fait, la périodicité annuelle des réunions avec le CGE a justifié l'étude de sujets passés telle que l'annonce de fermeture et la direction s'est tenue quitte de son obligation par la réunion du 11 mars 1997. Même si ces arguments peuvent être entendus, du fait du manque de précision de la directive de 1994, le manquement de la direction au deuxième volet de la directive peut paraitre plus difficilement défendable. [...]
[...] C'est la directive européenne du 22 septembre 1994 créée sous impulsion de la Charte Communautaire des Droits Sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 décembre 1089, qui instaure ces CGE. L'entreprise Renault n'a pas attendu cette directive et a mis à jour par un accord qualifié alors d'accord d'anticipation le 5 avril 1993 son propre Comité de Groupe de façon expérimentale pour deux ans. Cet accord a été repris le 5 mai 1995, les parties vont alors y préciser le fonctionnement de ce CGE et l'inscrire dans une perspective très nette d'une transposition nationale de la directive européenne précédemment citée. [...]
[...] En l'espèce, la direction n'a pas répondu à cette obligation qui lui incombait et va le justifier par les circonstances exceptionnelles. C'est alors très justement que le juge des référés mais également la Cour d'Appel va considérer ce manquement comme trop important et les circonstances n'étaient pas en l'espèce de nature exceptionnelle pour justifier ce manquement. Si l'on prend du recul vis-à-vis des textes, la mauvaise foi de la direction de Renault étant largement palpable, la décision des juges de constater un trouble manifestement illicite aux droits fondamentaux qui incombent aux travailleurs par le biais de leur représentation parait largement compréhensible et moralement juste. [...]
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