CJUE 2 mai 2018, affaire Mauro Scialdone, interprétation du droit de l'UE, TVA impayée, Etats membres, article 325 du TFUE, principe d'effectivité, recettes fiscales, sanction pénale, commentaire d'arrêt
En l'espèce, à la suite d'un contrôle fiscal, l'administration italienne relève que la société Siderlaghi a omis de verser 175 272 euros de TVA au titre de la déclaration annuelle pour l'exercice fiscal de 2012. Quand bien même la société Siderlaghi s'est engagée à régulariser la situation en s'acquittant de la TVA impayée (ainsi que les intérêts de retard et l'amende équivalent à 30% de la somme due), le 29 mai 2015, le procureur de la République saisit le Tribunal de Varèse en vue de poursuivre pénalement Monsieur Scialdone, en sa qualité d'administrateur unique. En effet, à cette date, l'omission de versement de la TVA de la société Siderlaghi dépasse le seuil d'incrimination de 50 000 euros. Néanmoins, le 22 octobre 2015, la législation italienne évolue en matière fiscale. Ainsi le seuil d'incrimination pour l'omission de versement de TVA est modifié par le décret législatif n° 158/2015, en passant de 50 000 euros à 250 000 euros.
[...] À ce titre, c'est aux tribunaux nationaux, dont le Tribunal de Varèse (Italie), qu'il revient en premier la mission d'exécuter le droit de l'Union. Pour cela et tel est le cas en l'espèce, la question préjudicielle (qu'elle soit en interprétation ou en validation) joue un rôle crucial dans la bonne application du droit de l'Union européenne. En effet, cette dernière permet d'instaurer un dialogue de juge à juge entre la Cour de justice de l'Union européenne et les juridictions des États membres. [...]
[...] S'agissant de l'importance similaire, la Cour souligne qu'il est plus difficile pour l'administration fiscale de déceler l'omission de versement des tiers payeurs que celui de l'assujetti. C'est pourquoi ces deux infractions ne sauraient être considérées comme étant d'une nature et d'une importance similaires . En conséquence, compte tenu de la marge de manœuvre des États dans la fixation du régime de la sanction, ces derniers ne sont pas tenus de prévoir un régime identique pour ces deux infractions. Finalement, en ce qu'il fixe des seuils d'incrimination différents pour ces deux infractions, le décret législatif n° 158/2015 est bien compatible avec le droit de l'Union européenne. [...]
[...] Il convient donc d'affirmer comme l'a évoqué l'Avocat général (Michal Bobek) dans ses conclusions que le droit de l'Union s'intéresse au résultat concret : des mesures effectives, proportionnées et dissuasives qui assurent l'exacte perception et évitent la fraude . Finalement, la Cour se penche de manière furtive, mais très importante pour l'avenir, sur le destinataire des sanctions en matière d'omission de versement de TVA. En effet, elle affirme que de telles sanctions (administratives) préservent leur caractère dissuasif et effectif aussi bien lorsqu'elles sont infligées à une personne morale qu'à ses dirigeants. Là encore, elle laisse une grande autonomie aux États dans la détermination des destinataires de telles sanctions. [...]
[...] Pour finalement vérifier le destinataire de la sanction en vue d'affirmer l'effectivité du droit national italien en matière fiscale. Pour ce faire, la Cour s'active à définir le principe d'effectivité aux points 29 et 34 de l'arrêt Scialdone. Lequel précise que le principe d'effectivité exige des États membres la mise en place de sanctions effectives et dissuasives pour lutter contre les violations des règles harmonisées en la matière et protéger les intérêts financiers de l'Union, sans toutefois imposer, en principe, que ces sanctions soient d'une nature particulière . [...]
[...] Ainsi, il est à relever que la Cour éparpille les règles du droit de l'Union au sein même du corps de l'arrêt. Ce qui à la fois porte à confusion dans la compréhension dudit arrêt, mais rend logique le raisonnement de la Cour. Autrement formulé, ce paradoxe renvoie au constat que la Cour, évoquée dans la partie réservée au cadre juridique du litige des règles juridiques précises, pour finalement revenir aux principes du droit de l'Union dans le corps de l'arrêt (entonnoir inversé). [...]
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