Cour de Justice européenne, grande chambre, 15 janvier 2014, Association de médiation sociale, conditions d'invocabilité, disposition nationale non conforme, droit européen, question préjudicielle, tribunal d'instance, Cour européenne, article 27 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, arrêt Marshall, État défendeur, litige, particuliers, Pfeiffer, dommage
La grande chambre de la Cour de Justice de l'Union européenne a rendu un arrêt le 15 janvier 2014 et répond à une question préjudicielle relative aux conditions d'invocabilité d'une disposition nationale non conforme au droit européen.
L'association de médiation sociale (AMS) avait saisi le tribunal d'instance de Marseille afin de contester la désignation du nouveau représentant de sa section syndicale au motif qu'avec un effectif inférieur à 11, elle n'est pas soumise à l'obligation de mesures représentation des travailleurs prévus par l'article L. 1111-3 Code du travail français.
Le tribunal d'instance (TI) de Marseille a posé une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation française concernant la conformité à la Constitution de l'article précité. La Cour de cassation a alors saisi le Conseil Constitutionnel qui a considéré ce texte comme constitutionnel. En revanche, les parties défenderesses (notamment l'Union locale des syndicats CGT) ont estimé cet article comme non conforme au droit européen. C'est en partie pour cette même raison que le TI a débouté la partie de requérante (l'AMS).
Ainsi, l'AMS a formé un pourvoi en cassation devant la Cour de cassation française qui a saisi la grande chambre de la Cour européenne pour lui poser deux questions préjudicielles.
[...] De plus, ce n'est pas une juridiction européenne, mais la juridiction nationale qui doit “assurer ( ) le droit des consommateurs lésés à obtenir réparation.” (même arrêt de 94). Reste à savoir si cette obligation s'applique à tous les domaines et notamment celui de la protection sociale. La réponse serait a priori positive puisque dans notre arrêt commenté, la Cour ne s'attarde pas sur les conditions de cette réparation ; conditions qui seraient donc identiques à la jurisprudence précédente. [...]
[...] Mais une norme européenne simplement mal transposée dans le droit national peut aussi faire l'objet de cette non-invocabilité comme c'est le cas dans l'arrêt commenté. Quant à la non-conformité de l'article L. 1111-3 du Code du travail français, la Cour a tranché sans hésitation puisque “la directive ( ) ayant défini ( ) le cadre des personnes à prendre en considération lors du calcul des effectifs de l'entreprise, les États membres ne sauraient exclure dudit calcul une catégorie déterminée de personnes entrant initialement dans ce cadre”. [...]
[...] Une autre précision est apportée d'ailleurs quant à la détermination de “particuliers” par la décision commentée ici : il s'agit de la qualification de l'Association de médiation sociale. Elle "est une association de droit privé, même si elle a une vocation sociale” selon l'arrêt. Il en ressort que la bascule la plus importante de cet arrêt est la qualification de la nature juridique des parties et qui plus est des requérants au principal (l'AMS) dont la qualification n'était pas si évidente. [...]
[...] Ainsi, les juridictions nationales doivent, d'une part – selon finalement le respect de la hiérarchie des normes – prendre en compte l'ensemble de l'état du droit national. D'autre part, l'interprétation du droit national doit se faire par les juges nationaux de telle sorte qu'ils aboutissent à une solution la plus proche de la directive concernée. La Cour exige de se rapprocher le plus que possible de la directive, mais elle aurait aussi pu dire du “droit européen” dans son ensemble. En fin de compte, cette obligation de résultat se rapproche de l'objectif principal des défendeurs, à savoir la non-application des dispositions nationales. [...]
[...] Selon elle, en effet, cela peut être “lorsque [l'État] c'est abstenu de transposer dans les délais la directive en droit national, soit lorsqu'il en a fait une transposition incorrecte”. Dans les arrêts du 6 novembre 2018 (C-569/16 et C-570/16) et du 19 janvier 2010 (C-555/07), l'invocabilité de la norme européenne n'a pas été retenue non plus. Et pourtant la première affaire concernait "'impossibilité d'interpréter une réglementation nationale telle que celle en cause au principal de manière à en assurer la conformité [à une directive européenne]” et la seconde concernait une transposition tardive d'une directive européenne par l'Allemagne. [...]
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