La question des rapports entre l'ordre juridique communautaire et les ordres juridiques nationaux est l'une des questions clés du droit communautaire. Elle commande l'autorité dont jouira le droit communautaire au sein des différents États membres. Ainsi, la question de l'applicabilité directe du droit communautaire a déjà été posée dans l'affaire « Van gend en loos » en 1963 qui fut l'arrêt fondateur avec l'affaire « Costa/ENEL » en 1964 du principe de primauté du droit communautaire sur des dispositions législatives antérieures contraires. Pourtant, la question se corse en ce qui concerne des dispositions législatives postérieures contraires au droit communautaire. C'est ce qui s'est passé dans l'affaire « Simmenthal » en 1978.
Dans le dispositif de cet arrêt, la Cour de justice a notamment dit pour droit que les contrôles sanitaires, systématiques ou non, opérés à la frontière à l'occasion de l'importation des animaux ou des viandes destinés à l'alimentation constituent des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives au sens de l'article 30 du traité et que sont, en principe, à considérer comme des taxes d'effet équivalant à des droits de douane les charges pécuniaires imposées, pour des raisons de contrôle sanitaire, aux produits importés à l'occasion de leur passage à la frontière.
[...] Nettement plus efficace et plus importante serait la déclaration d'illégalité constitutionnelle de la disposition législative: elle serait apte à garantir, in concreto, erga omnes, donc plus largement que ne le ferait la non-application de la part du seul juge, le respect du droit communautaire. L'incompatibilité d'une disposition de droit interne avec les règles communautaires, même si la règle communautaire a déjà été interprétée par la Cour de justice, pourrait s'avérer discutable du fait que l'appréciation et l'éventuel contrôle de la règle de droit interne ne sont pas de la compétence en interprétation préjudicielle de la Cour de justice; reconnaître, dans ce cas, à chaque juge national le pouvoir de ne pas appliquer une disposition de droit interne reviendrait à lier le respect du droit communautaire aux appréciations variables et contingentes de chaque juge interne, aux différents degrés de juridiction, sans qu'existât pour autant aucune garantie d'application uniforme effective du droit communautaire. [...]
[...] La Cour devrait donc dire pour droit que le juge national ne peut pas appliquer des règles de droit interne contraires au droit communautaire et que l'élimination de cette contradiction doit se faire par les moyens et selon les procédures prévues par l'ordre juridique national. Ainsi, les questions posées par le Pretore de Susa pourraient recevoir les réponses suivantes: Les dispositions communautaires ayant effet direct ne peuvent être affectées par des dispositions législatives nationales contraires, qu'elles soient antérieures ou postérieures. [...]
[...] En l'espèce, le 26 juillet 1973, la société anonyme Simmenthal, ayant son siège à Monza, a importé de France, via Modane, un lot de viande bovine destinée à l'alimentation humaine. Cette importation a été assujettie au paiement de droits de contrôle sanitaire pour un montant de lires. Le contrôle est prévu par l'article 32 du texte unique des lois sanitaires italiennes. Les conditions d'application de cette disposition sont déterminées à l'article 45 du règlement de police vétérinaire. Le tableau des droits applicables en 1973 a été fixé par la loi 1239, du 30 décembre 1970. [...]
[...] De toute évidence, l'efficacité des dispositions communautaires directement applicables, qui accordent aux particuliers des droits que les juges sont tenus de sauvegarder, ne saurait non plus être compromise ou mise en échec par des dispositions contraires de droit interne. En l'occurrence, la solution dégagée par la Cour dans cette affaire serait, en cas d'incompatibilité entre une disposition interne postérieure et le droit communautaire, d'attribuer au juge ordinaire national, en l'espèce le Pretore de Susa, le pouvoir de ne pas appliquer ladite disposition sans attendre l'abrogation par le législateur national ou la déclaration de l'inconstitutionnalité par la Cour constitutionnelle italienne. Pourtant, le juge constitutionnel italien ne reconnaît pas cette compétence du juge ordinaire. [...]
[...] Dans son arrêt du 9 mars 1978, La Cour de justice répond par la positive en affirmant le principe de l'applicabilité directe du droit communautaire sur les dispositions internes contraires mêmes postérieures et en dégageant la solution de la non-application par le juge ordinaire national de la loi incompatible avec le droit communautaire. L'incompétence de l'organe constitutionnel nationale pour l'élimination de la loi contraire postérieure au droit communautaire dans l'ordre juridique interne La société Simmenthal, partie défenderesse au principal, expose, dans ce contexte, l'évolution de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle italienne qui revendique l'abrogation par voie législative ou la déclaration de l'inconstitutionnalité par l'organe constitutionnel de la loi contraire postérieure au droit communautaire.(A) Cependant, cette jurisprudence est confrontée à celle de la Cour de justice.(B) La jurisprudence de la Cour constitutionnelle italienne prônant sa compétence La jurisprudence de la Cour constitutionnelle italienne, telle qu'elle se traduit en particulier dans l'arrêt 183 du 27 décembre 1973, l'arrêt 232 de 1975, l'arrêt 205 et l'ordonnance 206 de 1976, suggère des solutions possibles, en cas de conflit normatif, qui se réduiraient actuellement à l'alternative entre l'abrogation, par voie législative, de la norme nationale incompatible avec les dispositions communautaires antérieures et sa déclaration d'inconstitutionnalité par la Cour constitutionnelle. [...]
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