Depuis son adhésion à l'Union européenne, le juge français se doit de se soumettre aux règles imposées par le juge communautaire. Une exigence qui engendre ainsi de nombreux litiges, comme l'illustre l'arrêt rendu par la Cour de Justice des Communautés Européennes le 30 septembre 2003 Köbler.
En l'espèce, M Köbler, qui était lié depuis le 1er mars 1986 à l'Etat autrichien par un contrat de droit public lui octroyant la qualité de professeur d'université titulaire, avait sollicité l'attribution de l'indemnité spéciale d'ancienneté des professeurs d'université, par lettre du 28 mars 1996, adressée à l'autorité administrative compétente. Pour cela, il se prévalait de ses quinze ans d'ancienneté en tant que professeur titulaire auprès d'universités de divers Etats membres de la CEE, notamment en Autriche. Suite au rejet de sa demande, fondée sur l'article 50 bis de la loi salariale de 1956 qui imposait une telle ancienneté uniquement dans le cadre d'un enseignement auprès d'universités autrichiennes, M Köbler a formé un recours devant le Verwaltungsgerichtshof. Il faisait valoir par ce biais que les conditions d'ancienneté requises par ladite loi, pour bénéficier de l'indemnité en cause, créaient une discrimination indirecte, contraire au principe de la libre circulation des travailleurs, garanti par l'article 48 du TCE (devenu art 39 CE) et par le règlement nº 1612/68 du Conseil en date du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté.
[...] En effet, le dégagement du principe de la responsabilité de l'État du fait d'une décision d'une juridiction suprême violant le droit communautaire est la construction logique d'une jurisprudence de 1991. Ce principe était même déjà amorcé par l'arrêt Brasserie du pêcheur & Factortame dans lequel la Cour reconnaissait implicitement l'extension du principe de la responsabilité de l'État du fait du législateur dans l'ordre juridique communautaire, à celle émanant de l'activité juridictionnelle, et par là, des juridictions de dernier ressort. Ainsi, le juge des communautés européennes ne pouvait que raisonner de la sorte, poursuivant sa construction prétorienne de 1991. [...]
[...] Parmi les cinq questions préjudicielles posées à la Cour de Justice des Communautés Européennes, se pose essentiellement la question de savoir si la responsabilité d'un État membre peut être engagée, pour violation du droit communautaire découlant d'une décision d'une juridiction statuant en dernier ressort. Le juge communautaire répond en l'espèce par l'affirmative, concluant expressément au principe de responsabilité de l'État membre pour violation du droit communautaire, et ce, quel que soit l'organe auteur Une affirmation qu'il prend le soin d'encadrer dans des conditions précises, afin d'en assurer une effectivité certaine (II). [...]
[...] La CJCE affirme elle-même expressément que ces dernières sont loin d'être une innovation et représentent au contraire l'achèvement d'une jurisprudence existante. C'est pour cela qu'elle cite notamment l'arrêt Haim dans lequel figurait déjà ce considérant. C'est donc une preuve de la véritable volonté du juge communautaire : celle d'aboutir à un mécanisme de responsabilité clair, unifié et complet. Preuve d'autant plus remarquable qu'en l'espèce le juge communautaire approfondit l'interprétation de l'une de ces conditions : celle de l'exigence d'une violation suffisamment caractérisée. [...]
[...] De plus, la CJCE rappelle clairement en l'espèce que la juridiction statuant en dernier ressort est l'ultime instance devant laquelle le particulier peut faire valoir les droits que lui reconnaît le droit communautaire. Reconnaître ainsi la possible responsabilité de l'État du seul fait de la violation du droit communautaire par cet organe parait donc être une construction logique et garante de la protection des droits des particuliers. Comment pourrait-on refuser à l'individu d'être protégé par le droit communautaire ? Les particuliers ne sauraient être privés de la possibilité d'engager la responsabilité de l'État afin d'obtenir par ce biais une protection juridique de leurs droits. 36). [...]
[...] Un système dans lequel il est clairement précisé que la règle de l'épuisement des voies de recours internes implique que la décision de justice litigieuse émane d'une juridiction suprême. L'effectivité du principe mis en place par cet arrêt Köbler reste donc encore bien incertaine comme nous venons de l'étudier. [...]
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