En l'espèce, la juridiction de renvoi demandait à la Cour si la réglementation autrichienne sur le prix des livres importés avait pour objectif « une formation des prix (des livres) qui tienne compte de la spécificité du livre en tant que produit culturel, de l'intérêt du consommateur à des prix du livre raisonnables et des réalités économiques de la librairie ».
Au préalable, le gouvernement autrichien souligne qu'en l'absence d'une telle réglementation découlerait une baisse des prix qui aurait pour conséquence une diminution des marges bénéficiaires ce qui évincerait les petites librairies autrichiennes au profit des grandes. Pour le gouvernement autrichien cette mesure lui apparaît justifiée au regard des objectifs d'intérêt général et proportionné (attendu 31). Mais la décision de la Cour est tout autre.
[...] On notera à cet égard que la Cour ne répond pas à cette question, dans la mesure où cette question n'est posée que dans l'hypothèse où la réglementation nationale ne constitue pas une MEERQ. A cet égard, la réglementation autrichienne en cause étant dans le présent arrêt est une MEERQ (cf. la Cour a jugé à bon droit d'exclure cette question préjudicielle. Néanmoins, on peut rajouter que l'Avocat général a tenu toutefois à rappeler dans ses conclusions les principaux fondements et la portée de cette obligation de loyauté, dans le cas où ladite réglementation n'aurait pas constitué une MEERQ. [...]
[...] En l'espèce la question est de savoir si la protection des livres en tant que bien culturel est digne d'être protégée par une réglementation sur les prix, qui ferait obstacle à la liberté des marchandises. Plusieurs exigences ont pu être listées par la jurisprudence de la Cour, dont la protection du cinéma (arrêt Cinétech juil. 1985), la protection de l'environnement (arrêt Commission Danemark sept. 1988). Néanmoins, l'encadrement des mesures doit être très strict et suppose un contrôle approfondi, ce qui suppose le respect de certains principes inhérents au droit de l'Union. [...]
[...] Pour le gouvernement autrichien cette mesure lui apparaît justifiée au regard des objectifs d'intérêt général et proportionné (attendu 31). Mais la décision de la Cour est toute autre. Les exceptions prévues à l'article 30 TCE En effet, plus globalement, le gouvernement autrichien considérait que les objectifs, notamment ceux concernant la protection du livre en tant que bien culturel justifiaient les mesures d'effet équivalent à des restrictions quantitatives au sens de l'article 30 TCE protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique, archéologique Or, pour la Cour, la protection de la diversité culturelle, telle que la protection du livre, n'entre pas selon elle dans le champ d'application de cet article. [...]
[...] Aucun de ces critères (non cumulatifs) étant rempli en l'espèce, c'est à bon droit que la Cour a considéré la réglementation autrichienne illégitime. Par conséquent, la philosophie de la Cour étant la liberté de circulation des marchandises à tout prix, les exceptions prévues respectivement aux articles 30 et 151 TCE (attendus 32 et 33) ainsi que la notion d'exigence impérative d'intérêt public sont interprétées très strictement, quel que soit le motif invoqué et ce à l'appui des principes de nécessité, de proportionnalité et de non-discrimination. [...]
[...] En outre, la Cour tient à citer l'arrêt Association des Centres distributeurs Édouard Leclerc et Thouars Distribution en date du 10 janvier 1985, dans lequel elle avait jugé d'interprétation stricte l'article 30 TCE : Ni la défense des consommateurs, ni la protection de la diversité culturelle dans le domaine du livre ne figurent parmi les raisons citées dans cet article ( ) On peut s'interroger dès lors sur la raison qui a poussé la Cour à rester vigilante et suivre sa jurisprudence antérieure, alors qu'elle a pu souvent faire preuve d'audace dans l'interprétation des textes du traité, notamment en les complétant. Or, ici, elle ne le fait pas, probablement afin de maintenir sa fermeté quant au respect du principe de liberté de circulation des marchandises au sein du marché intérieur de l'Union. La Cour pose ainsi en filigrane la volonté de maintenir le champ de l'article 30 à son seul contenu. Les exceptions prévues à l'article 151 TCE L'interprétation par la Cour de l'article 151 TCE sur la protection des cultures dans l'action de la Communauté est également très restrictive. [...]
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