Le droit communautaire est obligatoire et directement applicable dans l'ordre juridique des Etats membres, mais il est susceptible d'entrer en conflit avec les normes nationales. Les traités institutifs ne font pas référence au principe de primauté du droit communautaire. De ce fait, et afin d'éviter les conflits entre le droit des Etats membres et le droit communautaire, la Cour de justice des Communautés Européennes a, par cet arrêt de principe Costa contre ENEL en date du 15 juillet 1964, affirmé le principe de la primauté du droit communautaire sur celui des Etats membres.
A la suite d'une loi du 6 décembre 1962, la République italienne procéda à la nationalisation de son système de production et de distribution d'électricité en créant ENEL à qui elle transféra le patrimoine des entreprises électriques. Flaminio Costa, actionnaire alors privé de ses dividendes, refusa de payer sa facture d'électricité, et engagea alors une procédure devant le Guidice conciliatore du tribunal de Milan, plaidant que la loi de nationalisation et les décrets présidentiels la complétant étaient contraires aux articles 37, 53, 93 et 102 du traité CEE. Demandant que cela soit confirmé, le Guidice a saisi la Cour de justice des communautés européennes par le mécanisme de la question préjudicielle. Le gouvernement italien a conclu à une « irrecevabilité absolue », soulignant que le juge national est tenu d'appliquer la loi nationale.
Les juges de la Cour de justice des Communautés Européennes avaient donc à répondre à deux questions : d'une part, doit-on considérer que le droit des communautés européennes prime sur le droit des Etats membres ? D'autre part, les dispositions des Traités communautaires font-elles naître des droits à l'égard des ressortissants des Etats membres qu'ils peuvent invoquer devant les juridictions nationales ?
[...] C'est en réponse à cet argument que la Cour consacra la primauté du droit communautaire. La Cour rappelle en effet que les Etats membres avaient signé un traité par lequel ils acceptaient de transférer une partie de leurs attributions au profit des Communautés européennes. Ce faisant, le traité a institué un ordre juridique propre, intégré au système juridique des Etats membres et s'imposant à leurs juridictions. De ce fait, les Etats membres ne sauraient faire prévaloir de normes nationales ultérieures sur le droit communautaire sans remettre en cause la spécificité de celui-ci. [...]
[...] Bien qu'entretenant des relations étroites, la primauté du droit communautaire et l'effet direct ne se confondent pas. II. Un effet direct conditionnel des dispositions des traités Par l'arrêt Costa ENEL, la CJCE attribue un effet direct aux dispositions des traités créant des droits à l'égard des ressortissants des Etats membres, mais pas à celle ne liant que les Etats membres entre eux (A'). Nous verrons également que les notions de primauté et d'effet direct du droit communautaire sont autonomes l'une de l'autre, bien qu'étroitement liées (B'). [...]
[...] En réalité, la primauté est autonome dans son principe par rapport à l'effet direct, et c'est ce qui fait de la primauté une source d'obligation pour les juridictions nationales. L'effet direct permet principalement à la primauté du droit communautaire de s'affirmer en interdisant la préservation de toute norme nationale contraire à celui-ci tout en encourageant la substitution de la règle communautaire à celle nationale (dans la mesure où elle remplit les critères établis à cette fin). J.-V. [...]
[...] En revanche, les articles 102, visant un rapprochement des législations et disposant que les Etats s'engagent à consulter la commission dans le cas d'adoption d'une disposition législative susceptible de provoquer une distorsion et 93, contraignant les Etats membres à soumettre les aides publiques accordées aux entreprises au contrôle de la Commission lors de leur instauration ou de leur modification, n'engendrent pas de droit dans le chef des justiciables Ils lient seulement les Etats membres. Primauté et effet direct : deux notions autonomes Bien qu'elles entretiennent des relations étroites, la primauté et l'effet direct du droit communautaire ne se confondent pas. [...]
[...] La primauté du droit communautaire procède donc de la nature particulière de l'ordre juridique communautaire, de son intégration dans les ordres juridiques nationaux et du transfert d'attributions réalisé par les Etats membres au profit de la communauté. Notons que le terme de primauté n'apparaît pas dans l'arrêt Costa ENEL. En effet, la Cour se réfère à un transfert opéré par les Etats, de leur ordre juridique interne au profit de l'ordre juridique communautaire Bien que nulle part mentionnée dans les traités, la primauté constitue la poutre maîtresse de l'édifice. Elle constitue une condition essentielle du droit communautaire et un facteur puissant de sa pénétration dans l'ordre juridique des Etats membres. [...]
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