C'est dans un contexte toujours marqué par les discussions autour de la proposition de directive de 2008 sur les droits des consommateurs qu'il faut accueillir un nouvel arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) concernant le droit de rétractation du consommateur prévu par l'article 6 de la directive n° 97/7 sur la vente à distance.
En l'espèce, nous sommes face à un litige opposant une société spécialisée dans la vente par correspondance et une association de consommateurs de droit allemand. Les conditions générales de vente de ladite société prévoient que le consommateur supporte à titre de frais d'expédition, un forfait de 5 euros environ. Cette somme devant resté acquise au fournisseur en cas de rétractation.
C'est ainsi que l'association a engagé conte la société une action en cessation visant à obtenir que cette dernière renonce à imputer au consommateur, en cas de rétractation, les frais d'expédition des marchandises. La juridiction de première instance de droit allemande fait droit à la demande de l'association. La société de vente par correspondance ne souhaite pas en rester là. Cependant l'appel interjeté a été rejeté par l'équivalent de la cour d'appel allemande.
Saisi d'un recours en révision par la société, la cour de cassation allemande (BGB) constate que, de manière explicite, le droit allemand ne confère à l'acheteur aucun droit au remboursement des frais d'expédition de la marchandise commandée. Toutefois, si la directive 97/7 devait être analysée comme s'opposant à l'imputation des frais d'expédition des marchandises au consommateur en cas de rétractation de ce dernier, les dispositions pertinentes du BGB devraient être interprétées d'une manière conforme à cette directive, en ce sens que le fournisseur serait alors tenu de rembourser au consommateur de tels frais.
Quoi qu'il en soit, la cour de cassation allemande considère qu'elle a un problème pour trancher cette question. C'est ainsi qu'elle se tourne vers la cour de justice de l'union européenne. Dans ces conditions, le BGB a décidé de surseoir à statuer et de pose à la Cour la question préjudicielle suivante : les dispositions de l'article 6 de la directive doivent-elles être interprétées en ce sens qu'elles font obstacle à une réglementation nationale conformément à laquelle les frais d'expédition des marchandises peut être facturés au consommateur même lorsqu'il exerce son droit de rétractation ?
La CJUE va répondre par l'affirmation. Elle va faire une analyse du droit communautaire ainsi que du droit allemand pour rendre ses observations. Il en résultera que l'article 6 de la directive 97/7 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale qui permet au fournisseur, dans un contrat conclu à distance, d'imputer les frais d'expédition des marchandises au consommateur dans le cas ou ce dernier exerce son droit de rétractation.
La cour fait donc le choix d'une protection toujours plus accrue du consommateur. L'association a donc bien fait de demander l'annulation des conditions générales de vente de la société, telle qu'elles étaient dans l'Etat.
C'est donc la question des conséquences juridiques de l'exercice du droit de rétractation qui est au cœur de notre arrêt HEINE du 15 avril 2010. La CJUE répondra à cette question en rappelant le refus du législateur communautaire de faire payer quoi que ce soit à un consommateur qui utiliserait son droit de rétractation. Et de ce fait confirmer la quasi-gratuité du droit de rétractation.
[...] C'est donc la question des conséquences juridiques de l'exercice du droit de rétractation qui est au cœur de notre arrêt HEINE du 15 avril 2010. La CJUE répondra à cette question en rappelant le refus du législateur communautaire de faire payer quoi que ce soit à un consommateur qui utiliserait son droit de rétractation Et de ce fait confirmer la quasi- gratuité du droit de rétractation (II). I : Le refus du juge communautaire de l'imputabilité des frais de réexpédition au consommateur. [...]
[...] La solution apparaît une nouvelle fois commandée par l'objectif de la directive sur les contrats à distance, à savoir encourager les consommateurs à employer les techniques de vente à distance, point d'orgue de la réalisation du marché européen des biens et services. B : Une protection du consommateur qui semble ne pas avoir de limites. --Cet arrêt met une nouvelle fois la Cour aux prises avec deux conceptions radicalement opposées du droit de la vente dans les rapports entre professionnels et consommateurs. Celle portée par la législation allemande est particulièrement favorable au vendeur. [...]
[...] --Ensuite, elle mettrait à mal une répartition équilibrée des risques entre le professionnel et le consommateur en faisant peser sur ce dernier les frais de livraison des marchandises. --Enfin, la solution peut trouver une justification dans le fait que l'article 6 de la directive n'établit aucune distinction entre le prix du bien et les frais de livraison lorsqu'il aborde les conséquences de la rétractation. La cour rend ainsi une décision toutefois peu innovante. En effet, il s'agit une décision en faveur du consommateur qui confirme une jurisprudence récente. [...]
[...] En effet, un arrêt Messner du 3 septembre 2009 a tranché la question de savoir si le libellé de la directive autorise une réglementation nationale - déjà le droit allemand - à prévoir la possibilité pour le vendeur de réclamer une indemnité compensatoire pour l'utilisation du bien livré jusqu'à la rétractation du consommateur et le retour incident des marchandises au professionnel. Cour de justice a condamné la réglementation prévoyant de manière générale le versement d'une telle indemnité. Pour autant, elle n'en exclut pas totalement le versement, lorsque le consommateur a fait un usage prolongé du bien contraire à la bonne foi ou susceptible de constituer un enrichissement sans cause. En se prononçant contre une législation prévoyant par principe le versement d'une telle indemnité, la Cour de justice consacrait la quasi-gratuité de la rétractation. [...]
[...] ] gouvernement allemand a tenté de démontrer que la directive ne couvre pas la question de l'imputation des frais d'expédition en cas de rétractation du consommateur. Ainsi, ce point relèverait des «autres conditions et modalités consécutives à l'exercice du droit de rétractation Les frais d'expédition étant versés antérieurement et indépendamment de l'exercice du droit de rétractation, les Etats membres conserveraient la liberté de prévoir dans leur législation qu'ils restent imputables au consommateur en cas de rétractation. Ainsi, l'obligation de restitution à la charge du fournisseur du bien ou du service ne porterait que sur le prix de vente. [...]
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