La problématique de la combinaison de l'Europe sociale et de l'Europe économique est au cœur des arrêts Viking et Laval rendus respectivement les 11 et 18 décembre 2007 et qui ont conduit la Cour de justice des communautés européennes à se prononcer pour la première fois sur des actions collectives menées par des organisations syndicales dans des conflits transnationaux afin de lutter contre des pratiques de dumping sociales.
En l'espèce, les deux arrêts sont relatifs à un litige concernant à l'exercice d'actions collectives qui a pour conséquence de restreindre les libertés économiques garanties par le traité CE. Dans l'affaire « Viking », la société Viking Line veut délocaliser dans le but d'obtenir une main-d'œuvre moins chère et des conditions de travail moins contraignantes. Pour cela, elle aspire à ce que l'un de ces ferries battant pavillon finlandais et respectant les conditions de travail finlandaises puisse battre pavillon estonien afin de conclure une nouvelle convention collective avec les syndicats locaux. Pour que le changement ne se réalise que sous réserve de la conclusion d'une convention collective maintenant l'application du droit finlandais et assurant les membres de l'équipage d'une absence de licenciements, le syndicat finlandais de travailleurs FSU qui est affilié à l'ITF fait pression en menaçant de faire grève.
Dans la deuxième affaire, il s'agit pour l'entreprise Lettonne Laval d'effectuer un chantier en Suède. C'est la filiale suédoise de Laval qui se charge du chantier avec des travailleurs de nationalité lettone qui sont détachés en Suède. Les syndicats suédois réclament donc que l'entreprise lettone suive la pratique suédoise et entame des négociations sur les salaires minimums et sur le taux des rémunérations. Face à l'échec des négociations, le syndicat suédois du bâtiment effectue un blocus de l'ensemble des chantiers Laval en Suède pour contraindre la société Laval à adhérer à la convention collective qu'il lui soumet.
[...] De plus, malgré ce qu'on pourrait croire le droit fondamental de mener des actions collectives n'est pas tout puissant. En effet, la CJCE prend soin dans les mêmes arrêts qui l'ont consacré de préciser que Le caractère fondamental s'attachant au droit de mener une action collective ( ) n'est toutefois pas de nature à faire à faire échapper une telle action ( ) au champ d'application du droit communautaire Ainsi malgré son caractère de principe général, le droit de mener une action collective reste soumis au champ d'application du droit communautaire. [...]
[...] La reconnaissance dans les arrêts Viking et Laval du droit fondamental de mener des actions collectives comme principe général du droit communautaire constitue une avancée essentielle pour la construction d'une Europe sociale. Toutefois, la finalité économique de l'Europe ne demeure pas loin. À l'origine le Traité de Rome, qui a crée la Communauté économique Européenne était surtout un projet de marché commun au sein duquel il n'existe pas de référence aux droits sociaux qui étaient de la seule compétence des États. [...]
[...] C'est la filiale suédoise de Laval qui se charge du chantier avec des travailleurs de nationalité lettone qui sont détachés en Suède. Les syndicats suédois réclament donc que l'entreprise lettone suive la pratique suédoise et entame des négociations sur les salaires minimums et sur le taux des rémunérations. Face à l'échec des négociations, le syndicat suédois du bâtiment effectue un blocus de l'ensemble des chantiers Laval en Suède pour contraindre la société Laval à adhérer à la convention collective qu'il lui soumet. [...]
[...] En l'espèce, l'action collective a pour but de faire adhérer l'entreprise Laval à une convention collective dont les dispositions vont au-delà de celles prévues dans le noyau dur des règles de protections minimales des travailleurs détachés instauré par la directive 96/71/CE. Et ceci, d'autant plus que les dispositions auxquelles le syndicat veut faire adhérer l'entreprise Laval s'inscrivent dans un contexte national marqué par l'absence de dispositions C'est ainsi que la CJCE conclut que l'action collective engagée par les syndicats dans l'affaire Laval n'est pas justifiée. Le raisonnement peut laisser perplexe. L'action syndicale menée pour améliorer la protection minimale des travailleurs détachés prévue par la directive 96/71/CE et qui génère une restriction de la libre prestation de service est injustifiée. [...]
[...] Ces références au Traité CE et à la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne sont une véritable consécration du droit fondamental de mener des actions collectives reconnue d'abord dans l'arrêt Viking le 11 décembre 2007 puis confirmée dans l'arrêt Laval le 18 décembre 2007. C'est d'ailleurs la toute première fois que la Charte est utilisée de façon directe pour la reconnaissance d'un principe général C'est donc un signe fort qui est envoyé par la CJCE, car c'est aussi la première fois qu'un droit social communautaire est consacré comme droit fondamental. [...]
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