Arrêt Kokkinakis contre Grèce du 19 avril 1993, Cour européenne des droits de l'Homme, question du prosélytisme, article 9 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'Homme, témoins de Jéhovah, liberté de religion, ingérences étatiques autorisées, article 13 de la Constitution hellénique, article 4 de la loi n°1363/1938, prosélytisme non caractérisé, manifestation de foi, arrêt Giniewski, commentaire d'arrêt
La question du prosélytisme peut être définie comme le zèle ardent pour recruter des adeptes, tenter d'imposer ses idées et de rallier à une doctrine ; elle soulève d'autres problématiques. Dans un arrêt du 19 avril 1993, Kokkinakis contre Grèce, la Cour européenne des droits de l'Homme vient préciser ce qu'est le prosélytisme ainsi que son rapport avec l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'Homme. M. Kokkinakis ainsi que son épouse se rendent au domicile d'une personne afin de présenter leur doctrine et la pensée des témoins de Jéhovah. Avertie par le mari de cette dernière, la police les arrête, les requérants seront présentés devant le Tribunal correctionnel pour infraction à la loi ayant défini le prosélytisme. Le Tribunal les condamne, aux motifs qu'ils "ont tenté directement et indirectement de pénétrer dans la conscience religieuse de chrétiens orthodoxes, dans le but d'altérer cette conscience, en abusant de leur inexpérience, leur faiblesse intellectuelle et leur naïveté".
Après appel, la femme du requérant est relaxée, le pourvoi en cassation du requérant enfin sera rejeté. Après extinction des voies de recours internes, le requérant saisit la Commission européenne des droits de l'Homme le 22 août 1988 aux motifs que sa condamnation pour prosélytisme méconnaissait les articles 7, 9 et 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme. L'article 9 de la Convention européenne des droits de l'Homme protège la liberté de pensée, de conscience et de religion, elle n'est cependant pas absolue puisque son paragraphe 2 prévoit des ingérences actives, L'État est donc autorisé à entraver dans certaines situations cette liberté. Dans cet arrêt, la Cour s'attèle donc à qualifier la "manifestation" de la liberté puis ensuite vient vérifier si l'entrave de l'État grec peut être considérée comme une ingérence ou non.
[...] C'est sur cette loi que se fonde l'argumentaire des juges de la Cour, tout en limitant au cas d'espèce la notion de prosélytisme abusif. II- Les limites éventuelles prévues par les ingérences actives autorisées L'arrêt reprend les ingérences actives autorisées par l'article 9 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'Homme mais n'interdit pas cette forme de prosélytisme non abusive Une condamnation injustifiée par les conditions de l'article 9 paragraphe 2 Le requérant se prévaut de la violation de l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'Homme et que son arrestation pour avoir partagé sa foi relève d'une restriction de l'exercice de sa liberté de religion. [...]
[...] La Cour européenne des droits de l'Homme admet quant à elle qu'un tel pouvoir d'appréciation était nécessaire afin d'éviter une “rigidité excessive” du droit. Quant à savoir si cette ingérence a un but légitime, brièvement la Cour répond par la positive. Seulement, sur le point de savoir si cette immixtion de l'État était nécessaire dans une société démocratique, la Cour intervient enfin en faveur du requérant. Le requérant estimant que ”interdire la parole d'un concitoyen” est contraire à cette condition. [...]
[...] Certes, si le fait de répondre sa foi était interdit, cela pourrait constituer une atteinte au but même de la liberté de religion, mais la limite entre partage et volonté d'influencer est parfois très faible. M. le Juge Valticos, dans son opinion dissidente très critique, constate que les Témoins de Jéhovah sont une secte, et que leurs pratiques sont “un effort systématique de conversion, et par conséquent d'une atteinte aux croyances religieuses des autres”. La volonté de la Cour de différencier le prosélytisme “simple” du prosélytisme abusif est superfétatoire. [...]
[...] “ ARRÊT KOKKINAKIS c. GRÈCE OPINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE VALTICOS ARRÊT KOKKINAKIS c. GRÈCE OPINION DISSIDENTE DE M. [...]
[...] La liberté de religion, nécessaire dans une société démocratique La liberté de pensée, de conscience et de religion protégée par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'Homme est également protégée par l'article 13 de la Constitution hellénique. La liberté de pensée, de conscience et de religion consacrée par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'Homme est une des assises d'une “société démocratique” au sens de la Convention européenne des droits de l'Homme. Elle est essentielle pour les croyants, mais également pour les athées, agnostiques, sceptiques ou indifférents, au regard du respect du pluralisme. [...]
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