Rendu le 18 février 1999 par la Cour Européenne des Droits de l'Homme (ci-après Cour Européenne), présidée par Luzius Wildhaber, l'arrêt Waite et Kennedy contre Allemagne répond à la question de l'incompatibilité entre l'immunité de juridiction dont jouissent les Organisations Internationales et les droits énoncés par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (ci-après CEDH). Ainsi, la Cour s'interroge sur la valeur du droit d'accès à un tribunal posé par la CEDH et sur la question de la proportionnalité des restrictions apportées à l'encontre de ce droit fondamental.
En l'espèce, les requérants avaient justement invoqué ce droit découlant de l'art 6§1 de la CEDH à l'encontre des juridictions allemandes les ayant déboutés sans connaître du fond du litige. En effet, Richard Waite et Terry Kennedy, ressortissants britanniques, ont collaboré avec l'ESOC (centre européen d'opérations spatiales) géré par l'organisation internationale Agence Spatiale européenne et située en Allemagne. Cette collaboration se fit par l'intermédiaire de différentes sociétés privées anglo-saxonnes desquelles ils furent d'abord employés jusqu'en 1982 puis associés, ces changements n'ayant « aucune répercussion sur les services que les requérants prêtaient à l'ESOC ». En 1990, le contrat conclu entre deux de ces sociétés ne fut pas renouvelé mettant ainsi fin à la collaboration entre les requérants et l'ESOC. Messieurs Waite et Kennedy saisirent alors sans succès le tribunal local du travail allemand, le Tribunal régional du travail de Francfort et enfin la Cour fédérale du travail à l'encontre de l'ASE. En effet, ces trois juridictions jugèrent irrecevable leur demande en raison de l'immunité de juridiction dont jouissait l'ASE en vertu de son traité constitutif. Selon les requérants, les juridictions allemandes auraient donc méconnu leurs droits en refusant d'examiner le bien-fondé de leurs griefs. Ils saisirent donc en 1994 la Cour européenne par l'intermédiaire de la Commission européenne des Droits de l'Homme pour manquement de l'État allemand aux exigences de l'article 6§1 de la CEDH et la Cour se saisit de la requête en vertu de la déclaration allemande de reconnaissance de juridiction obligatoire.
[...] Il s'agit donc, pour la Cour européenne des Droits de l'Homme, de déterminer la place de l'immunité de juridiction des organisations internationales et celle du droit d'accès à un juge énoncé à l'article de la CEDH dans l'ordre juridique international, afin de déterminer s'il est possible d'établir une hiérarchie entre ces normes apparemment incompatibles. Il faut ainsi, dans un premier temps, comprendre pourquoi la Cour considère l'immunité de juridiction des organisations internationales comme un but légitime de restriction à l'article de la CEDH concernant le droit à un procès équitable Dans un second temps, il s'agit de s'interroger sur la place que souhaite accorder la Cour à cette primauté sur les droits de l'Homme, primauté non absolue La protection des organisations internationales, un but légitime de restriction à l'article de la CEDH Il s'agit donc de comprendre comment la Cour, tout en confirmant le caractère concret et effectif du droit d'accès aux tribunaux consacre les immunités de juridictions des organisations internationales comme un moyen indispensable à leur bon fonctionnement deux normes pourtant très souvent en opposition. [...]
[...] Cet examen de proportionnalité. En l'espèce, la Cour confirme les conclusions du gouvernement affirmant que la limitation est proportionnée au but poursuivi, qui est de permettre aux organisations internationales d'exécuter efficacement leurs fonctions Ainsi, la Cour n'a pas hésité à se livrer à un véritable contrôle de proportionnalité et n'a conclu au constat de non-violation qu'après s'être assuré de l'existence d'autres voies de droit qui s'offraient aux requérants. B. Une contrepartie à l'immunité juridictionnelle ou l'indispensable accès à une autre voie de recours La Cour exige la possibilité d'accès à un organe juridictionnel mais pas nécessairement à un tribunal national La question est donc de savoir si les requérants disposaient d'autres voies raisonnables pour protéger efficacement leurs droits garantis par la Convention européenne des Droits de l'Homme. [...]
[...] En outre, la Cour souligne la possibilité pour les requérants d'obtenir un contrôle juridictionnel ce qui remplit bien l'obligation énoncée à l'article de la CEDH, mais au moyen de procédures adaptées aux particularités d'une organisation internationale et, dès lors, différentes des recours disponibles en droit interne Cette affirmation de principe semble pourtant être bien illusoire et peu contrôlable. En effet, la Cour, tout en posant le principe, ne s'attache pas à contrôler l'effectivité des voies de recours alternatives et leur impartialité. En outre, l'immunité des organisations internationales a une base conventionnelle. Celle accordée en l'espèce à l'Agence spatiale européenne trouve son fondement dans un accord conclu postérieurement à la Convention européenne des Droits de l'Homme. [...]
[...] Ceci s'explique peut être par le nombre de litiges portés devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme invoquant l'article règle de droit international la plus souvent invoquée. La restriction apportée à l'article résulte également d'une volonté de protéger les organisations internationales et d'assurer leur bon fonctionnement B. Les immunités de juridiction des organisations internationales, un moyen indispensable à leur bon fonctionnement Dans cette affaire est soulevée la question de la compatibilité de l'article avec l'immunité dont bénéficient les organisations internationales, en l'espèce l'Agence spatiale Européenne, en vertu de leurs instruments conventionnels fondateurs. [...]
[...] En effet, ces trois juridictions jugèrent irrecevable leur demande en raison de l'immunité de juridiction dont jouissait l'ASE en vertu de son traité constitutif. Selon les requérants, les juridictions allemandes auraient donc méconnu leurs droits en refusant d'examiner le bien-fondé de leurs griefs. Ils saisirent donc en 1994 la Cour européenne par l'intermédiaire de la Commission européenne des Droits de l'Homme pour manquement de l'État allemand aux exigences de l'article de la CEDH et la Cour se saisit de la requête en vertu de la déclaration allemande de reconnaissance de juridiction obligatoire. [...]
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