Le droit d'accès à un tribunal est garanti en matière civile et en matière pénale par l'article 6§1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (Convention EDH). Ce droit peut souffrir des restrictions, décidées par les Etats, sous contrôle a posteriori de la Cour Européenne (Cour EDH).
En l'espèce, les requérants sont des ressortissants français. Suite à la décision d'une Cour d'Appel concernant leur affaire et les condamnant au paiement d'une certaine somme, ils se pourvoient en cassation.
Cependant, dans le cadre de l'article 1009-1 du Code de procédure civile, le Premier Président de la Cour de cassation décide de radier l'affaire du rôle de la Cour de cassation. Cette procédure qui a lieu à la demande du défendeur au pourvoi est considérée comme une mesure visant à la bonne administration de la justice car elle permet à la Cour de cassation de rayer de son rôle les affaires où les condamnés en appel n'auraient pas exécuté les décisions prononcées. C'est ici ce que relève le Premier Président de la Cour de cassation pour justifier le retrait du rôle. Il fait valoir que les demandeurs n'ont pas commencé à exécuter le jugement qui était rendu à leur encontre et que de ce fait, leur pourvoi ne pouvait être reçu.
En effet, la formulation d'un pourvoi en cassation n'étant pas suspensive, les demandeurs devaient rapporter la preuve d'un commencement d'exécution pour que leur recours puisse être admis.
[...] C'est donc ce processus d'analyse par faisceau d'indices que la Cour EDH va mettre en œuvre pour vérifier la compatibilité entre l'article 1009-1 du Code de procédure civile et l'article de la Convention EDH. B. Légitimité du retrait du rôle de la Cour de cassation au regard de l'article de la Convention EDH L'article 1009-1 du Code de procédure civile française prévoit la possibilité pour le défendeur devant la Cour de cassation de demander au Premier Président de rayer l'affaire du rôle de la Cour, car le demandeur n'aurait pas exécuté la décision de condamnation prise par les juridictions ayant précédemment statué. [...]
[...] Cependant, la Cour EDH, dans l'arrêt Annoni di Gussola ne remet pas en cause, à aucun moment, la validité de l'article 1009-1 du Code de procédure civil à l'égard de l'article de la Convention EDH. La Cour rappelle ainsi sa jurisprudence antérieure : Edificaciones March Gallego S.A c. Espagne et M. c. France Dans cette dernière jurisprudence la Cour avait en effet relevé qu'« un système peut subordonner l'accès à une juridiction de recours au versement d'une certaine somme due au titre de l'arrêt d'appel [mais que cela peut] soulever un problème au regard de l'article de la Convention. [...]
[...] La Cour semble donc vouloir étudier chaque situation au cas par cas en matière de retrait du rôle du pourvoi. Ainsi dans l'arrêt Annoni di Gussola revient-elle à plusieurs reprises sur la situation de RMIste et les revenus inexistants des requérants pour faire valoir que leur situation leur empêchait tout commencement d'exécution. Il faut donc craindre que la Cour EDH, qui souligne dans cet arrêt que la Cour de cassation ne remédie que provisoirement à son encombrement par les mesures de retrait du rôle, risque elle aussi de se voir encombrées par ce type de procédure si elle compte étudier chaque situation au cas par cas. [...]
[...] Cependant, la Cour EDH admet que cette possibilité pour tous d'accéder à un tribunal peut être limitée par les États dans le cadre d'une bonne administration de la justice. Ces limitations sont qui plus est contrôlées par la Cour EDH afin de s'assurer que les États ne limitent pas trop sévèrement l'accès à un tribunal. Ainsi la jurisprudence de la Cour EDH statue-t-elle au cas par cas afin de dégager les grandes limites aux limites imposées par les États en matière d'accès au juge. [...]
[...] Ainsi, en l'espèce, la Cour EDH précise-t-elle qu'au regard de sa jurisprudence les États peuvent limiter dans certaines conditions l'accès à un tribunal. Elle rappelle ainsi l'arrêt Edificaciones March Gallego S.A c. Espagne où elle précisait que les limites prévues par les États afin de limiter l'accès à un tribunal pour les justiciables devaient être proportionnées avec le but visé, et sont possibles si elles ne touchent pas à la substance même du droit et si elles poursuivent un but légitime. [...]
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