Conseil d'Etat, Code général des impôts, principe de liberté d'établissement, optimisation fiscale, évasion fiscale, régime fiscal avantageux, prestataire, salaire, cachet, associé, administrateur délégué, actionnaire, prestations de service, revenus, article 155 A du Code général des impôts, Etat membre, convention franco-luxembourgeoise, juges du Palais Royal, double imposition, intérêts nationaux, principes européens
« Rent a star company ». Derrière ses apparences de slogan publicitaire, cette formule évoque un mécanisme artificiel : lorsque certains abordent l'idée telle une optimisation fiscale , d'autres crient à l'évasion . Ce phénomène, bien connu de nombreux artistes et sportifs, vise à créer une société dans un État étranger, au régime fiscal avantageux, qui va percevoir l'intégralité des sommes du prestataire. Par la suite, elle lui en reverse une faible partie sous forme de salaire. La majorité du cachet perçue échappe ainsi à l'impôt français quand bien même l'artiste, associé majoritaire de cette société, en profite aisément. Afin de contrer cette méthode, qui s'est muée et proliférée bien au-delà des sphères du show-biz, le législateur a mis en place une « pièce d'artillerie » sur mesure : l'article 155 A du Code général des impôts. C'est dans ce contexte qu'il faut situer l'arrêt M. et Mme Piazza rendu le 20 mars 2013 par le Conseil d'État.
[...] Cette décision illustre la difficulté d'articuler les intérêts nationaux avec les principes européens. En affirmant la compatibilité de la disposition nationale et du principe communautaire, le Conseil d'État joue d'une argumentation ambivalente afin de lutter contre l'évasion fiscale. Alors que la juridiction administrative confirme la compatibilité de l'article 155 A du CGI au principe communautaire de la liberté d'établissement son raisonnement rencontre des failles, s'éloignant de la vision communautaire, lorsqu'il écarte la double imposition en l'espèce afin de lutter contre la fraude fiscale (II). [...]
[...] Il n'est dès lors pas nécessaire qu'une volonté de fraude soit présente pour que l'article 155 A du CGI s'applique. La volonté de contourner une législation fiscale, par la caractérisation d'une société fictive par exemple, n'a pas à être démontrée. L'application de ce texte n'est donc pas entièrement conforme à la jurisprudence communautaire puisque cette dernière est plus stricte souhaitant, outre le montage artificiel, que les fins poursuivies soient purement fiscales. Face à de tels débats entourant l'article 155 A du CGI, il paraît étrange que le Conseil d'État n'ait pas souhaité poser une question préjudicielle à la CJUE. [...]
[...] Néanmoins, questionner le but de la société et la véracité de ses prestations revient à remettre en cause, indirectement, la société. En effet, selon un tel raisonnement, la personne morale n'est pas une personne juridique à part entière, qui est animée par un intérêt social propre, mais simplement une marionnette contrôlée par les associés. La lecture du raisonnement du Conseil d'État suggère alors la notion de société-écran qui ne sert qu'à dissimuler des transactions financières. Pourtant, ici, le Conseil d'État ne remet pas en cause l'existence de la société. [...]
[...] En outre, les époux se prévalent également de la convention franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 en estimant que l'application dudit article aboutit à une double imposition. Le Conseil d'État était ainsi confronté à un problème engendré par l'intégration européenne : l'article 155 A du Code général des impôts est-il compatible avec le principe de la liberté d'établissement ? En outre, les juges du Palais Royal étaient également amenés à se prononcer sur la double imposition que les circonstances de l'affaire laissaient transparaître. Entachée d'une irrégularité de forme, la décision rendue par la Cour d'appel est annulée par le Conseil d'État. [...]
[...] En effet, l'un des cas d'application de l'article joue lorsque les personnes résidant en France n'établissent pas que la personne domiciliée ou établie hors de France exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services. Ainsi, dès lors que la personne établie dans un pays étranger, et qui perçoit la rémunération d'un service réalisé par une personne domiciliée en France, exerce de manière prépondérante une prestation de service, l'article est applicable. Pourtant, la Cour de justice de l'Union européenne avait déjà jugé que dans le cadre d'un dispositif anti-abus la charge de la preuve pèse sur l'Administration. [...]
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