L'absence de communication des conclusions de l'Avocat Général près de la Cour de Cassation à une partie non représentée par un conseil constitue-t-elle une violation du droit à un procès équitable ?
La CourEDH retient, en l'espèce, une violation de l'article 6§1 de la Convention. Elle considère que le requérant n'a pas pu bénéficier, devant la Cour de Cassation, d'un examen équitable de sa cause. La Cour généralise la pratique de la communication des conclusions de l'Avocat Général près de la Cour de Cassation aux parties même non représentées par un avocat spécialisé (I) en s'appuyant sur le respect du principe du contradictoire (II).
[...] Généralement, on rapproche ce principe de celui de l'égalité des armes, ces deux principes étant souvent confondus. Que signifie ce principe du contradictoire ? La Cour de Strasbourg précise qu'il implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la place pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (CEDH octobre 2004). Il implique l'idée qu'il faut que les parties soient sur un pied d'égalité, qu'il ne faut pas une partie faible et une partie forte même si cela est difficile à réaliser en pratique. [...]
[...] Par exemple, le Ministère Public, qui agit en tant que partie poursuivante n'a pas à communiquer ses réquisitions aux avocats des parties, il plaide directement à l'audience, pourtant, ses conclusions se situent à l'intérieur des débats. D'autres, en revanche, considèrent que la communication des conclusions est utile. Toutefois, ce monopole de représentation n'est pas absolu. En effet, l'article 973 du Nouveau Code de Procédure Civile admet que des dispositions contraires à l'obligation de constituer avocat devant la Cour de Cassation puissent être prises. [...]
[...] La Cour de Strasbourg s'est certainement rendu compte que limiter l'accès aux conclusions de l'Avocat Général aux parties non représentées était source d'injustice pour elles, c'est pourquoi, par cet arrêt, elle a complété sa jurisprudence antérieure. Une position suivie Cette solution n'a pas été sans incidence en droit français car des mesures ont été prises au sein de la Cour de Cassation pour mettre la procédure en conformité avec la jurisprudence européenne. Cependant, la France continue à faire l'objet de condamnations sur le fondement d'une violation du principe du contradictoire pour défaut de communication des conclusions de l'Avocat Général aux parties non représentées. [...]
[...] Ce n'est donc pas une obligation pour le Commissaire du Gouvernement contrairement à l'Avocat Général. Elle estime que cette procédure offre suffisamment de garanties au justiciable, que le principe du contradictoire est tout à fait respecté. En l'espèce, l'argument reposant sur la non- communication des conclusions du Commissaire du Gouvernement invoqué par la requérante représentée par un avocat spécialisé devant le Conseil d'Etat a été rejeté. Toutefois, dans un arrêt Fretté France rendu le 26 février 2002, elle a considéré que le requérant qui n'avait pas constitué avocat devant le Conseil d'Etat, n'avait pas pu prendre connaissance, avant l'audience, du sens général des conclusions du Commissaire du Gouvernement. [...]
[...] Cependant, elle ajoute que le droit à une procédure contradictoire au sens de l'article de la ConventionEDH implique que les parties aient accès aux pièces présentées au juge même par un magistrat indépendant pour pouvoir les discuter et constate, en l'espèce, que le requérant n'a pas obtenu la communication des conclusions de l'Avocat Général. Elle juge que le respect du droit à un procès équitable a été méconnu. Par cette décision, elle étend donc le domaine d'application de la pratique. Certains auteurs critiquent cette interprétation extensive faite par la Cour EDH en disant qu'elle n'a pas à se prononcer sur la compatibilité à la Convention Européenne des droits de l'Homme d'une pratique interne. [...]
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