Question prioritaire de constitutionnalité, Cour de justice, Primauté, droit de l'Union Européenne, Melki et Abdeli, renvoi préjudiciel, Conseil constitutionnel, Principe d'interprétation conforme
En l'espèce, il était question de deux ressortissants étrangers en situation irrégulière qui sont contrôlés en France en application de l'article 78-2 du Code pénal. Ils font alors l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière et d'une décision de maintien en rétention. Ces derniers soulèvent alors devant le juge des libertés et de la détention l'inconstitutionnalité de l'article 78-2 du Code pénal, qui transmet alors la question devant la Cour de cassation par une ordonnance du 25 mars 2010.
Devant la Cour de cassation les requérants soulèvent que l'article litigieux est contraire à la Constitution, et plus particulièrement à son article 88-1 faisant état de l'engagement de la République française au terme duquel elle participe à l'Union Européenne, conférant ainsi selon eux, une valeur constitutionnelle au traité de Lisbonne, et donc à l'article 67§2 TFUE assurant l'absence de contrôle des personnes au sein des frontières intérieures de l'Union.
[...] Or, on l'a vu ces conditions sont très proches du contenu de la décision du Conseil Constitutionnel précité. De cette manière la Cour, sans véritablement se contredire se prononce de manière implicite en faveur de la compatibilité du système français de la question prioritaire de constitutionnalité avec le droit de l'Union. Pour autant, la Cour de cassation, ainsi éclairée par la Cour de Justice, seule compétente pour prononcer la validité de la disposition litigieuse ou non, au regard du droit de l'Union, a malgré tout considéré ce système comme étant incompatible, et a écarté conformément à la jurisprudence Simmenthal l'ordonnance faisant état de ce mécanisme. [...]
[...] Ainsi serait incompatible avec les exigences inhérentes à la nature même du droit de l'Union toute disposition d'un ordre juridique national ou tout pratique législative, administrative ou judiciaire, qui aurait pour effet de diminuer l'efficacité du droit de l'Union par le fait de refuser au juge compétent pour appliquer ce droit, le pouvoir de faire, au moment même de cette application, tout ce qui est nécessaire pour écarter les dispositions législatives nationales formant éventuellement obstacle à la pleine efficacité des normes de l'Union Or, d'après l'interprétation de la Cour de cassation s'agissant de l'article 78-2 du Code pénal, le fait que celui-ci pose un problème de compatibilité avec l'article 67 TFUE, et de constitutionnalité au regard de l'article 88-1 de la Constitution, l'application du mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité s'oppose au principe de primauté tel qu'énoncé ci-dessus. En effet, ce mécanisme imposerait au juge national de transmettre la question au Conseil constitutionnel et de surseoir à statuer le temps que celui-ci rende sa réponse. [...]
[...] De cette manière la Cour de Justice a considéré le renvoi comme recevable. Ensuite, se posait à elle une seconde difficulté. En effet, tout en sachant l'état du droit français au sujet de la question prioritaire de constitutionnalité, notamment en ayant connaissance de la décision du Conseil constitutionnel précitée, elle devait pour autant se prononcer sur l'interprétation erronée de la Cour de cassation, et donc prononcer à juste titre l'incompatibilité de l'exception d'inconstitutionnalité du système français avec le droit de l'Union. [...]
[...] De cette manière on voit que la position de la Cour de Justice est plutôt nuancée. De quelle manière la Cour de Justice se prononce-t-elle implicitement en faveur de la question prioritaire de constitutionnalité française ? En effet, si elle semble dans un premier temps se prononcer dans le sens de l'incompatibilité du mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité française, tel que présenté par la Cour de cassation elle constate pour autant, au regard des circonstances entourant l'affaire, de manière implicite la compatibilité de la question prioritaire de constitutionnalité française avec le droit de l'Union européenne (II). [...]
[...] En ce sens, la question prioritaire de constitutionnalité est donc contraire au principe de primauté du droit communautaire. Aussi si l'application du droit de l'Union est compromise par la violation du principe de primauté, la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'interprétée par la Cour de cassation a également pour effet de contrevenir à l'efficacité du droit communautaire dans le sens où elle paralyse le mécanisme du renvoi préjudiciel B Une atteinte à l'efficacité du droit de l'Union par un renvoi préjudiciel rendu impossible Le renvoi préjudiciel est un mécanisme de coopération entre la Cour de Justice et les juridictions nationales, défini au sein de l'article 267 TFUE qui attribue la compétence à la Cour de Justice pour se prononcer sur l'interprétation des traités ou les actes pris par les Institutions, organes ou organismes de l'Union, ainsi que sur leur validité, pour guider les juges nationaux. [...]
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