La liberté contractuelle est l'un des principes directeurs du droit civil des obligations. Pourtant en se bornant à appliquer celui-ci à la lettre, il arrive qu'en rendant sa décision, le juge accentue les inégalités qui existent déjà de facto entre les contractants. En effet, en dépit du principe posé par la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789: « les hommes naissent libres et égaux en droit », il serait naïf de penser, dans le contexte socio-économique actuel, qu'une telle égalité puisse exister entre les contractants et notamment dans les conventions entre salariés et employeurs ou entre professionnels et consommateurs. C'est dans cette situation de «déséquilibre contractuel» que nous allons analyser cette décision de la 1ère chambre civile.
En l'espèce, La cliente d'un établissement bancaire a loué à celui-ci deux chambres fortes dont les contrats de location, conclus le 29 décembre 1987 et le 3 février 1989, n'ont pas de durée déterminée. Ceux-ci prévoient la fixation du prix par la banque à chaque période de location et sont résiliables à tout moment par n'importe laquelle des parties sous réserve d'un préavis d'au moins un mois.
Le 18 Juin 1996, soit prés de neuf ans après la conclusion du premier contrat, la banque informe sa cliente de l'augmentation du loyer, prétextant une augmentation des charges de ses installations: De 54000 francs, le loyer passe désormais à 145000 francs. Suite à cette forte augmentation des tarifs pratiqués par sa banque, la cliente proteste et se voit accorder une remise. Suite à cela, elle décide de reconduire le contrat sous réserve. Aussi, elle assigne l'établissement bancaire en dommages et intérêts pour abus de droit dans la fixation du loyer.
Le 24 octobre 2000, la Cour d'appel donne raison à la cliente, en déclarant que la banque n'a pas justifié cette hausse de prix. L'établissement se pourvoi alors en cassation.
Le bailleur qui augmente le prix de location d'une chambre forte sans en motiver les raisons commet-il un abus de droit ?
Les juges de la cour de cassation répondent par la négative, estimant que sur le fondement du principe de liberté contractuelle, la banque était en droit de fixer le prix de location des coffres comme elle le souhaitait, et que de son côté la cliente était libre de résilier son contrat si celui-ci ne la satisfaisait plus, à condition qu'elle émette un préavis d'un mois.
Si la cour de cassation défend le principe de liberté contractuelle, en ne tenant pas compte de l'absence de motivation de la banque concernant la hausse du prix, elle tolère un abus de droit, et rend la situation du contractant faible encore plus délicate.
[...] C'est l'une des raisons pour lesquelles la cour de cassation a donné raison au bailleur. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'elle statuait dans le sens d'un établissement bancaire. En effet, dans l'arrêt Bechtel Cofratel du 1er décembre 1995, constituée en assemblée plénière, elle estimait que la partie la plus puissante pouvait fixer le prix de location de façon unilatérale. Une partie de la doctrine semble également partager la décision de la cour de cassation. C'est le cas de Valérie Avena-Robardet qui estime qu' «une banque peut augmenter ses tarifs, même de façon substantielle, pourvu que ses clients ne soient pas tenus de souscrire aux nouvelles conditions contractuelles. [...]
[...] Commentaire d'arrêt: 1ère chambre civile Juin 2004, Bull. n°190 La liberté contractuelle est l'un des principes directeurs du droit civil des obligations. Pourtant en se bornant à appliquer celui-ci à la lettre, il arrive qu'en rendant sa décision, le juge accentue les inégalités qui existent déjà de facto entre les contractants. En effet, en dépit du principe posé par la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789: les hommes naissent libres et égaux en droit il serait naïf de penser, dans le contexte socio-économique actuel, qu'une telle égalité puisse exister entre les contractants et notamment dans les conventions entre salariés et employeurs ou entre professionnels et consommateurs. [...]
[...] Le bailleur qui augmente le prix de location d'une chambre forte sans en motiver les raisons commet-il un abus de droit ? Les juges de la cour de cassation répondent par la négative, estimant que sur le fondement du principe de liberté contractuelle, la banque était en droit de fixer le prix de location des coffres comme elle le souhaitait, et que de son côté la cliente était libre de résilier son contrat si celui- ci ne la satisfaisait plus, à condition qu'elle émette un préavis d'un mois. [...]
[...] Dans le cadre de cet arrêt, la cliente est en droit de résilier son contrat à n'importe quel moment à condition d'émettre un préavis d'un mois. La cour de cassation en a donc conclu que puisque rien ne l'obligeait à contracter de nouveau, il n'y avait pas d'abus de droit. En réalité, le simple fait pour le contractant faible de résilier le met dans une situation délicate: il faut que celui-ci trouve, dans le laps de temps accordé par le préavis, un nouvel établissement bancaire susceptible de lui proposer des services équivalents. Aussi, rien ne garantit l'existence d'une telle configuration chez la concurrence. [...]
[...] La liberté pour le cocontractant de ne pas conclure. Si le principe de liberté contractuelle suppose la liberté pour les contractants d'aménager leur contrat, elle suppose aussi la liberté de choisir son cocontractant ainsi que celle de conclure ou non avec celui-ci. En l'espèce, les deux contrats qui ont été conclus entre le bailleur et la locataire prévoient la résiliation par n'importe lequel des contractants, de façon unilatérale et à n'importe quel moment (à condition d'avoir émis un préavis d'au moins un mois). [...]
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