Les recours contre les institutions de l'Union européenne forment une nébuleuse de voies de droit complexes et variées, dont la confusion a souvent été appréhendée au sein même de cette structure communautaire. L'arrêt du 15 février 2001 « Nachi Europe » illustre parfaitement cette difficulté, notamment en ce qui concerne la notion d'exception d'illégalité, sur laquelle il faudra se pencher plus particulièrement. En l'espèce, le Conseil avait imposé à travers un règlement un droit antidumping définitif sur les importations de certains roulements à billes provenant du Japon. Le droit antidumping permet d'éviter de vendre sur les marchés extérieurs des produits ou services à des prix inférieurs que ceux pratiqués sur le marché national (donc permet globalement d'éviter l'éviction de la concurrence). À la suite d'une procédure de réexamen, le règlement 2849/92 est venu modifier les droits définitifs existants. Menacées de subir un préjudice, les entreprises NTN et Koyo Seiko ont alors intenté un recours en annulation devant le Tribunal de première instance. Le Tribunal a annulé l'article premier du règlement, étant donné que ce dernier « impose un droit antidumping aux requérants ». Après confirmation de la Cour de justice en date du 10 février 1998, Nachi Europe (filiale d'une des entreprises requérantes précitées) demande le remboursement des droits antidumping au motif qu'elle peut se prévaloir de l'illégalité du règlement tiré des décisions antérieures. La demande ayant été refusée, elle intente alors un recours auprès du Finanzgericht. Le juge national, en vertu de ses pouvoirs conférés par l'article 234 CE, interroge la Cour de justice sur les effets des arrêts rendus par cette dernière à l'égard de Nachi Europe. Il demande si l'article 1er, point 2, du règlement 2849/92 est invalide, et si oui, à quelle date cette invalidité prend-elle effet au profit de la demanderesse. Ce n'est pas simplement les questions du juge national allemand qui feront l'objet de cette étude, mais plutôt les précisions apportées par la Cour de justice de Luxembourg dans ce type de recours particulier.
A travers ce renvoi préjudiciel, c'est en réalité une double difficulté qui se soulève devant le juge communautaire : la requérante peut-elle se prévaloir des arrêts de 1995 et 1998, dans l'espoir de bénéficier de leurs effets en matière de droit antidumping ? En cas de réponse négative, les juges devront se prononcer sur une autre problématique : la requérante peut-elle invoquer l'invalidité du droit antidumping à l'occasion d'un litige devant une juridiction nationale, en l'absence d'un recours principal ?
La société Nachi Europe, n'ayant pas jugé utile de demander une annulation du règlement dans les délais légaux, se retrouve donc forclose, mais semble pourtant décider à contourner cet état de fait. La démarche de la Cour suit une argumentation logique divisée en deux parties distinctes mais interdépendantes, qu'il faudra analyser successivement, puisque de la première problématique dépend la seconde. Son raisonnement consiste dans un premier temps à écarter l'application des arrêts NTN et Koyo Seiko de 1995 et 1998 en contestant les effets de ces derniers sur l'invalidité du droit antidumping invoquée par la requérante (I). Puis, dans un second temps, la Cour va se prononcer sur l'autre voie ouverte à Nachi Europe : mais là aussi, la CJCE va contester le droit d'invoquer l'invalidité du règlement devant une juridiction nationale en l'absence d'un recours principal (II).
[...] CJCE 15 février 2001 Nachi Europe GmbH Hauptzollamt Krefeld Les recours contre les institutions de l'Union européenne forment une nébuleuse de voies de droit complexes et variées, dont la confusion a souvent été appréhendée au sein même de cette structure communautaire. L'arrêt du 15 février 2001 Nachi Europe illustre parfaitement cette difficulté, notamment en ce qui concerne la notion d'exception d'illégalité, sur laquelle il faudra se pencher plus particulièrement. En l'espèce, le Conseil avait imposé à travers un règlement un droit antidumping définitif sur les importations de certains roulements à billes provenant du Japon. [...]
[...] Ayant ignoré (probablement volontairement) ce droit dont elle disposait, Nachi Europe se trouve donc forclose à juste titre. A la lumière de cette étude, il ressort de cette décision que les arrêts précités de 1995 et 1998 NTN et Koyo Seiko n'ont pas eu pour effet d'affecter la validité de l'article 1er du règlement, et donc Nachi Europe ne peut s'en prévaloir. La seule voie de droit lui étant offerte était l'invocation d'invalidité de ce droit antidumping devant une juridiction nationale, dans les délais prévus par le Traité. [...]
[...] La société Nachi Europe, n'ayant pas jugé utile de demander une annulation du règlement dans les délais légaux, se retrouve donc forclose, mais semble pourtant décider à contourner cet état de fait. La démarche de la Cour suit une argumentation logique divisée en deux parties distinctes mais interdépendantes, qu'il faudra analyser successivement, puisque de la première problématique dépend la seconde. Son raisonnement consiste dans un premier temps à écarter l'application des arrêts NTN et Koyo Seiko de 1995 et 1998 en contestant les effets de ces derniers sur l'invalidité du droit antidumping invoquée par la requérante Puis, dans un second temps, la Cour va se prononcer sur l'autre voie ouverte à Nachi Europe : mais là aussi, la CJCE va contester le droit d'invoquer l'invalidité du règlement devant une juridiction nationale en l'absence d'un recours principal (II). [...]
[...] Dans l'affaire Nachi Europe, c'est pourtant un règlement qui est au cœur du problème. Ce type d'acte étant normatif et de portée générale, le principe est donc la non-recevabilité du recours. Malgré l'exigence de ce principe, et comme le rappelle la Cour dans son attendu 21, une jurisprudence constante a fait du droit antidumping une exception. Autrement dit, en ce qui concerne les règlements antidumping, la Cour accepte de considérer que le requérant puisse se prévaloir d'un lien individuel, en raison de l'hybridité de ce type d'acte dans ce contexte. [...]
[...] Si la demande de la société requérante avait été acceptée par la Cour, c'est la sécurité juridique qui aurait été mise en danger, puisque dans un tel contexte cela aurait permis de remettre en cause un acte communautaire devenu pourtant définitif. La CJCE part du principe qu'il existe pour chaque particulier, en théorie, un droit de recours permettant d'annuler un acte communautaire. Le droit d'invoquer l'exception est ouvert à toutes les parties à l'action sur laquelle l'exception vient se greffer. Cette possibilité est logiquement encadrée par un délai posé par le Traité. Ce délai étant de deux mois à partir de sa publication, ou, à défaut, de sa notification au requérant. [...]
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