Une société anonyme d'alimentation est composée de 3 personnes dans lesquelles se trouve une société qui a fait apport de son patrimoine. Une tierce société a conclu à l'annulation du contrat de société instituant la SA au motif que la constitution de cette dernière serait dépourvue de cause juridique, entachée de simulation et serait intervenue en fraude des droits des créanciers de la société associée.
La société attaquée conteste cette conclusion en invoquant que la liste limitative des cas de nullité des sociétés anonymes d'une directive ne fait pas figurer l'absence de cause juridique parmi ces cas.
La juridiction espagnole, chargée de régler le litige, a rappelé que l'Etat espagnol était tenu de mettre la directive en vigueur dès son adhésion, transposition qui n'avait pas encore eu lieu au jour de l'ordonnance de renvoi. Considérant que le litige soulevait un problème de droit communautaire, elle a posé une question préjudicielle à la CJCE. Cette dernière, a énoncé que le juge national était tenu d'interpréter le droit national à la lumière du texte et de la finalité de cette directive. De ce fait, le sens de l'expression « objet de la société » utilisée dans l'une des causes de nullité des sociétés doit être entendu comme visant exclusivement l'objet de la société tel qu'il est décrit dans l'acte de constitution ou dans les statuts. La CJCE rappelle que chaque motif de nullité prévu par la directive est d'interprétation stricte.
Cet arrêt s'inscrit dans la lignée des arrêts fondateurs conférant au droit communautaire les caractères de primauté, d'effet direct, d'applicabilité direct et d'invocabilité directe tels que les arrêts de la CJCE, Costa c/ ENEL, 15 juillet 1964, Van Gend et Loos, 5 février 1963 et 9 mars 1978, Simmenthal. Ces arrêts ont fait du juge national le juge naturel du droit communautaire, et la Cour de justice la garante de son interprétation. A ce titre, elle “dit pour droit” dans le cadre du renvoi préjudiciel, en ce sens qu'elle ne statue qu'en droit, se prononçant sur l'interprétation ou sur la validité du droit communautaire, et laisse le juge national en tirer les conséquences.
En outre, cet arrêt, suivant l'interprétation de la directive en question, redéfinit le sens de la notion « d'objet de la société ». En effet, l'objet illicite d'une société est une des causes de nullité. Les juridictions nationales considéraient auparavant l'activité réelle et effective de la société alors que la CJCE préconise la prise en compte de l'objet mentionné dans les statuts.
En premier lieu, il faut donc souligner l'importance de cet arrêt pour le droit communautaire (I) et en second lieu le fait qu'il apporte une redéfinition du sens de l'expression « objet de la société » (II).
[...] L'objet de la société, objet social, est le genre d'activité que la société se propose d'exercer en vue de faire des bénéfices ou de réaliser des économies. Cet objet doit être déterminé dans les statuts comme l'énonce l'article L.210-2. Le problème réside dans la discordance entre l'objet social statutaire et l'activité réelle c'est-à-dire l'objet social effectif. Serait illicite toute activité contraire à l'ordre public ou aux bonnes mœurs (art.6). La société illicite est frappée d'une nullité absolue qui peut être invoquée par tout intéressé. [...]
[...] En effet, pendant longtemps ils ont pris en considération l'activité effectivement menée par la société pour déterminer si son objet est licite. Mais, dans un arrêt de la Cour d'appel de Paris rendu le 21 septembre 2001, la jurisprudence française s'incline devant cette jurisprudence et s'en tient à l'activité décrite dans les statuts et non à l'activité réelle de la société à l'instar de la jurisprudence européenne. Cette nouvelle définition, d'interprétation stricte, paraît néanmoins critiquable. Une position ambiguë La CJCE a jeté un certain trouble avec l'arrêt d'espèce, en décidant que l'expression l'objet de la société doit être interprétée en ce sens qu'il vise exclusivement l'objet statutaire de la société et que la déclaration de nullité de la société ne pourrait pas résulter de l'activité effectivement poursuivie. [...]
[...] Depuis l'arrêt de la CJCE du 13 novembre 1990, la licéité de l'objet doit s'apprécier à partir de l'objet indiqué dans les statuts et non pas à partir de l'activité réellement exercée. Ainsi, la nullité de la société ne peut pas résulter de l'activité effectivement poursuivie. Cette solution est-elle cependant admise par les juges nationaux ? Alors que la CJCE s'arrête sur les statuts, les juges français regardent l'objet pratique de la société. Cette jurisprudence européenne a beaucoup de mal à être accueillie par les juges français qui ont tenté d'y résister. [...]
[...] Ces droits seront librement opposables devant le juge national en raison de l'absence de transposition de la directive. En effet, une directive ne sera jamais, avant d'être transposée et si le délai n'est pas expiré, à l'origine d'obligations pour les particuliers. Il parait légitime que le défaut de transposition et donc la faute de l'Etat ne puisse que bénéficier aux particuliers, c'est-à-dire leur conférer des droits, et non leur nuire leur imposant des obligations. De plus, à la différence de l'invocabilité de substitution, qui vient pallier l'absence de textes nationaux en la matière, cette invocabilité d'interprétation, qui obligent les juridictions nationales à interpréter des textes nationaux à la lumière d'une directive portant sur le même sujet, n'est pas limitée aux litiges entre particuliers et un Etat membre, mais s'étend aussi aux litiges entre particuliers, avant et après l'expiration du délai de transposition. [...]
[...] C.J.C.E novembre 1990, Marleasing Une société anonyme d'alimentation est composée de 3 personnes dans lesquelles se trouve une société qui a fait apport de son patrimoine. Une tierce société a conclu à l'annulation du contrat de société instituant la SA au motif que la constitution de cette dernière serait dépourvue de cause juridique, entachée de simulation et serait intervenue en fraude des droits des créanciers de la société associée. La société attaquée conteste cette conclusion en invoquant que la liste limitative des cas de nullité des sociétés anonymes d'une directive ne fait pas figurer l'absence de cause juridique parmi ces cas. [...]
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