Le recours en manquement, prévu par les articles 226 à 228 du Traité communautaire et visant à constater qu'un État membre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du Traité, occupe une place essentielle dans le système juridique communautaire.
Il apparaît comme une voie de droit originale, reflétant les caractéristiques de l'ordre juridique communautaire. Il confirme notamment le rôle important dévolu à la Commission en tant que gardienne du droit communautaire.
Le droit dérivé alimente la majeure partie des recours en manquement, en particulier, la transposition et l'application des directives communautaires. En effet, il arrive fréquemment que les États transposent une directive en violant ses objectifs. Or, une directive n'a pas d'effet direct horizontal. Par conséquent, le recours en manquement concerne les directives de manière spéciale. Il permettra à la Commission de vérifier leur transposition correcte et uniforme.
Parmi les États membres, l'Italie détient le record du nombre de recours en manquement, avec en moyenne près de 45 procédures l'impliquant annuellement.
Dans un arrêt rendu par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) le 10 avril 2008, la République italienne est à nouveau poursuivie pour manquement à ses obligations communautaires après avoir transposé tardivement et de façon incorrecte une directive.
[...] Comme le précise la CJCE, si elle tolérait ce genre de pratique, cela aboutirait à une autorisation implicite de report de délai de transposition et à une remise en cause du caractère impératif des objectifs de la directive. Or, la transposition doit impérativement respecter les objectifs de la directive, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. La Cour ayant en effet conclu que République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 à 14 de la directive 1999/31. Aucune des causes d'exonération qu'elle a pu avancer n'a été accueillie par la Cour, confirmant l'appréciation restrictive des causes exonératoires et surtout le refus catégorique des justifications relatives aux retards de transposition. [...]
[...] Les autorités italiennes ont délibérément choisi de violer les dispositions communautaires concernées. Elles le reconnaissent et justifient l'établissement de ce régime dérogatoire par des raisons exclusivement techniques et administratives en rapport avec leur retard dans la transposition de la directive (sécurité juridique, nécessité de ne pas rompre l'égalité entre les opérateurs, difficultés pratiques . La Cour rappelle alors il ressort d'une jurisprudence constante qu'un État membre ne saurait exciper de la mise en oeuvre tardive d'une directive, de sa part, pour justifier l'inobservation ou le retard dans l'exécution d'autres obligations imposées par cette même directive (arrêts du 13 avril 2000, Commission/Espagne, C-274/98 et du 8 novembre 2001, Commission/Italie, C-127/99) Elle ajoute, en se fondant une fois encore sur une jurisprudence antérieure (arrêt du 9 août 1994, Bund Naturschutz in Bayern e.a., C-396/92), que lorsqu'une directive, telle que celle qui est concernée en l'espèce, édicte des obligations non équivoques à la charge des autorités nationales compétentes, les États membres n'ayant pas transposé cette directive ne peuvent se considérer dispensés du respect de ces obligations après l'expiration du délai de transposition et ne peuvent exclure, par une disposition transitoire, l'application des dispositions de ladite directive. [...]
[...] On l'a vu, la Cour rejette l'exception d'irrecevabilité tirée de l'irrégularité de la procédure pré-contentieuse. Elle refuse également la fin de non-recevoir invoquée par l'Italie qui faisait observer que l'éventuelle constatation du manquement ne lui permettrait pas de prendre les mesures nécessaires pour se conformer à la directive, dès lors que l'arrêt de la Cour interviendra après l'expiration du délai fixé. La cour rappelle ici que, selon une jurisprudence constante, l'existence d'un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l'État membre telle qu'elle se présentait au terme du délai fixé dans l'avis motivé. [...]
[...] L'avis donne un délai à l'Etat pour mettre fin au manquement. Si ce délai n'est pas respecté, la Cour peut être saisie par la Commission. En l'espèce, la Commission a envoyé à la République italienne une lettre de mise en demeure dans laquelle elle a signalé que des doutes nouveaux pouvaient apparaître ultérieurement quant à la conformité à la directive 1999/31 de la législation nationale transposant cette dernière. Elle a ensuite adressé à l'Italie une lettre de mise en demeure complémentaire, assortie d'un délai de deux mois pour présenter ses observations, dans laquelle elle a repris ses griefs et en a ajouté d'autres. [...]
[...] L'Italie reproche à la Commission d'avoir modifié les griefs invoqués. Selon elle, l'insertion de la mention précitée permettrait à la Commission de modifier les griefs invoqués à l'encontre d'un État membre, selon ses exigences et sans qu'elle soit tenue d'entamer une nouvelle procédure en manquement. L'extension de la mise en demeure complémentaire à de nouveaux griefs comporterait une violation du devoir de coopération loyale visé à l'article 10 CE. La CJCE tient alors à rappeler que, selon une jurisprudence constante, la régularité de la procédure pré-contentieuse constitue une garantie essentielle voulue par le traité CE, non seulement pour la protection des droits de l'État membre en cause, mais également pour assurer que la procédure contentieuse éventuelle aura pour objet un litige clairement défini. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture