Dans cette affaire la Commission poursuit la France pour violation du traité CEEA. Elle lui reproche d'avoir méconnu les dispositions sur l'approvisionnement en matières nucléaires en refusant de lui communiquer les rapports annuels prévus par l'article 70 et en concluant des contrats dans des conditions contraires aux prérogatives de l'Agence instituée par le traité.
Pour sa défense, la France soutient, outre l'irrecevabilité de l'action engagée contre elle (l'action en manquement prévue par l'article 141 CEEA), que les dispositions qu'elle aurait violées sont devenues caduques ou, à défaut, que le prétendu manquement pour lequel elle est poursuivie n'est pas établi.
Après avoir admis la recevabilité de la requête de la Commission, contestée par la France pour son caractère tardif (les faits reprochés duraient depuis 1965), au motif que le traité ne prévoit pas de délai pour engager l'action, la Cour se prononce sur l'existence du manquement allégué.
Elle condamne la France, rejetant tant la thèse de la caducité des dispositions violées que les justificatifs invoqués à l'appui de son comportement.
Pour la France, les dispositions en cause ne sont plus en vigueur en raison du fait qu'elles auraient dû, en vertu de l'article 76, être soit confirmées soit remplacées par le Conseil au bout de sept ans d'application ; à défaut, elles doivent être considérées comme caduques.
Pour la Cour, au contraire, « la caducité des dispositions du traité ne se présume pas » ; leur maintien en vigueur, même si elles ne sont pas utilisées, découle du caractère irréversible des engagements des Etats membres, qui « ont convenu d'instituer une Communauté de durée illimitée, dotée d'institutions permanentes investies de pouvoirs réels, issus d'une limitation de compétences ou d'un transfert d'attributions ».
Cet arrêt présente un grand arrêt car il permet d'apporter des précisions sur la nature particulière des traités communautaires (I) et sur les conditions d'exercice de l'action en manquement (II).
[...] Cette possibilité d'abrogation par désuétude d'un traité devenu inadapté est écartée par la Cour pour des motifs évidents : outre qu'elle se heurte aux dispositions des traités eux-mêmes, qui prévoient les procédure d'adaptation nécessaires[2], elle contrevient à l'esprit des traités qui jettent les bases d'une construction européenne appelée à se développer progressivement selon un processus considéré comme irréversible (pour la même raison, les traités ne contiennent pas de clause de dénonciation unilatérale). En revanche, le même principe, dans la mesure où il fait partie des principes coutumiers du droit international public auxquels est normalement soumise la Communauté européenne en tant qu'organisation internationale peut constituer une norme de référence pour le juge appelé à vérifier la validité d'un règlement. La rigidité des traités communautaires La rigidité des traités communautaire intervient non seulement dans le cadre du changement fondamental de circonstances, mais aussi dans le domaine de la modification par la coutume. [...]
[...] L'arrêt Commission des Communautés européennes République française du 14 décembre 1971 Dans cette affaire la Commission poursuit la France pour violation du traité CEEA. Elle lui reproche d'avoir méconnu les dispositions sur l'approvisionnement en matières nucléaires en refusant de lui communiquer les rapports annuels prévus par l'article 70 et en concluant des contrats dans des conditions contraires aux prérogatives de l'Agence instituée par le traité. Pour sa défense, la France soutient, outre l'irrecevabilité de l'action engagée contre elle (l'action en manquement prévue par l'article 141 CEEA), que les dispositions qu'elle aurait violées sont devenues caduques ou, à défaut, que le prétendu manquement pour lequel elle est poursuivie n'est pas établi. [...]
[...] La nature de l'action en manquement La Cour, enfin, précise la nature d'une action qui est à la fois proche et différente de l'action en responsabilité susceptible d'être engagée en droit international contre l'Etat dont la violation des obligations est source de dommage. Contrairement à la responsabilité internationale, l'action en manquement ne vise pas à réparer un préjudice, mais à sanctionner la violation de l'ordre public communautaire institué par les traités. L'absence de dommage causé aux autres Etats membres ou à la Communauté n'est pas un obstacle à son exercice, l'action pouvant être engagée, par la Commission (art 169 CEE/226CE) ou un Etat membre (art 170CEE/227CE) pour faire condamner par la Cour de justice l'Etat membre qui méconnaît ses obligations. [...]
[...] II) L'exercice de l'action en manquement Nous étudierons dans cette partie la finalité de l'action en manquement ainsi que la nature de l'action en manquement La finalité de l'action en manquement La Cour confirme d'abord qu'en l'absence de délai fixé par les traités, la Commission est libre de déclencher l'action en manquement quand elle le juge opportun ; elle dispose en la matière d'un pouvoir entièrement discrétionnaire, du choix du moment où elle engagera l'action à la décision de l'engager ou non. La Cour, ensuite, définit la finalité d'une action qui doit permettre à la Cour d'interpréter et de dissiper, dans l'intérêt des institutions comme des Etats membres, les situations juridiques équivoques et de régler ainsi les divergences d'interprétation des traités ou des actes pris pour leur application. [...]
[...] Après avoir admis la recevabilité de la requête de la Commission, contestée par la France pour son caractère tardif (les faits reprochés duraient depuis 1965), au motif que le traité ne prévoit pas de délai pour engager l'action, la Cour se prononce sur l'existence du manquement allégué. Elle condamne la France, rejetant tant la thèse de la caducité des dispositions violées que les justificatifs invoqués à l'appui de son comportement. Pour la France, les dispositions en cause ne sont plus en vigueur en raison du fait qu'elles auraient dû, en vertu de l'article 76, être soit confirmées soit remplacées par le Conseil au bout de sept ans d'application ; à défaut, elles doivent être considérées comme caduques. [...]
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