Dans l'arrêt du 14 juillet 1994 Paola Faccini Dori c/ Recreb Srl, la Cour de Justice des communautés européennes se trouve confronté au problème de l'application des directives dans le droit national et de son effectivité auprès des particuliers. En effet, un tribunal italien a saisi la cours par le biais d'une question jurisprudentielle prévue à l'article 234 du TCE, en lui soumettant le problème de l'interprétation de la directive 85/577/CEE du Conseil concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux.
Le cas à juger est le suivant : la société de droit italien Interdiffusion Srl. a conclu un contrat avec la dénommée Faccini Dori pour un cours d'anglais par correspondance dans la gare de Milan, donc en dehors de son établissement commercial, sans que Paola Faccini Dori l'ait au préalable sollicité. Revenant sur sa décision, la cliente informe quelques jours plus tard la société qu'elle annule sa demande, par une lettre recommandée. Cependant, la société Interdiffusion avait entre temps cédé sa créance à la société Recreb Srl. ; Mlle Faccini Dori confirme par écrit à cette dernière l'annulation de sa commande et invoque en particulier le bénéfice de la faculté de renonciation prévue par la directive 85/577/CEE sur les contrats négociés en dehors des établissements commerciaux. Or, la directive en question n'avait pas encore fait l'objet de mesure de transposition en droit national par l'Etat italien au moment des faits, bien que le délai de transposition soit expiré (L'Italie ne la transposera qu'en 1992, alors que le délai avait expiré en décembre 87). La société Recreb ayant engagé une procédure judiciaire à l'encontre de la cliente, cette dernière est condamnée par le Giudice conciliatore di Firenze, juge unique, au paiement des sommes convenues. Mlle Faccini Dori s'oppose alors à cette condamnation en s'appuyant sur le droit de renonciation prévu dans la directive 85/577/CEE. Le juge d'appel italien est ainsi amené à interroger la CJCE sur l'invocabilité de la directive mise en cause et des ses effets sur les rapports entre particuliers, mais pose en même temps la question plus largement, en demandant si la directive est assez précise pour être appliqué à l'Etat italien et aux particuliers.
La question principale est celle de l'invocabilité d'une directive dans un litige entre un commerçant et un particulier ; il s'agit donc ici de la question d'un effet direct horizontal d'une directive. La directive est-elle invocable par les particuliers pour se prévaloir de droits, alors que cette directive n'a pas encore été transposée dans le droit interne? La CJCE répond en confirmant solennellement son refus d'admettre cette invocabilité, mais rappelle l'obligation pour le juge nationale de faire prévaloir la directive, et notamment quand elle est aussi précise que celle invoquée, et en conséquence, d'interpréter la norme nationale à la lumière de la directive, qui lui est supérieure.
[...] De plus la Cour estime elle-même que, si l'Etat n'a pas usé de sa marge d'appréciation inhérente à la directive, n'exclut pas de déterminer des droits minimaux La directive est donc applicable sans l'être réellement, puisque c'est au juge d'apprécier ces droits minimaux. Un droit de moins en moins transparent La Cour pense contribuer au respect de la clarté du droit communautaire en maintenant coûte que coûte la distinction fondamentale entre Règlements et Directives par leur différenciation sur l'effet direct horizontal. Cette intention est louable. [...]
[...] L'arrêt CJCE, Faccini Dori La question de la place des directives dans la hiérarchie du droit communautaire fait débat. Ces directives, qui sont des textes adoptés par le Conseil, souvent en coopération avec le Parlement, et censées être transposées dans un délai défini par les Etats Membres dans leur ordre juridique national. Dans l'arrêt du 14 juillet 1994 Paola Faccini Dori Recreb Srl, la Cour de Justice des communautés européennes se trouve confronté au problème de l'application des directives dans le droit national et de son effectivité auprès des particuliers. [...]
[...] La Cour va statuer ici en formation plénière pour donner une certaine solennité à cette décision. L'importance de l'enjeu est également marquée par l'attitude des Etats membres puisque la majorité d'entre eux ont présenté des observations dans cette affaire. Cet intérêt et cette solennité sont révélateurs de la controverse qui entoure les directives et la question de leurs effets dans le droit interne. La question principale est celle de l'invocabilité d'une directive dans un litige entre un commerçant et un particulier ; il s'agit donc ici de la question d'un effet direct horizontal d'une directive. [...]
[...] Il ne peut créer le droit, il ne peut toujours faire des tours de passe-passe, il sera obligé d'appliquer son droit interne, alors que si l'affaire avait concerné un particulier contre son Etat, il aurait pu appliquer la directive. Le droit de réparation à l'encontre de l'Etat défaillant paraît lui aussi présenter quelques lacunes, car il est assez restrictif, soumis à 3 conditions (droits au profit des particuliers, droits clairement identifiables, lien de causalité entre le manquement de l'Etat et le dommage subi par les personnes lésées). De plus la mise en œuvre des responsabilités renvoie au droit national, ce qui entraîne des différenciations entre les citoyens. [...]
[...] l'interprétation conforme Pour justifier sa position, la CJCE s'appuie une nouvelle fois sur sa jurisprudence, qu'elle met ainsi en valeur. Ainsi, elle rappelle que dans l'Arrêt Von Colson et Kamann, du 10 avril 1984, elle a imposé au juge national de mettre en œuvre l'obligation générale de coopération qu'impose l'article 10 TCE à toutes les autorités nationales. Il doit ainsi interpréter son droit national à la lumière du texte et de la finalité de la directive pour atteindre le résultat visé par l'article 249, Formulée dans le cadre d'une affaire où la directive concernée avait été transposée, cette obligation ne se limite pas l'hypothèse où le juge doit interpréter les mesures de transposition ; la Cour se réfère en effet, en termes plus généraux, au droit national, et notamment les dispositions d'une loi nationale spécialement introduite en vue d'exécuter la directive envisageant ainsi l'ensemble des règles internes qui seraient affectées directement ou indirectement par la directive. [...]
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