L'arrêt rendu le 15 juillet 1964, par la Cour de Justice des communautés européennes, Costa/Enel, l'un des plus célèbres de la jurisprudence de la Cour, doit sa réputation à l'affirmation qu'il contient de la supériorité ou de la primauté du droit communautaire sur le droit national. Même si elle constituait une arrière-pensée des promoteurs de la construction européenne (R. Schuman, déclaration du 9 mai 1950), cette primauté n'est pas passée en termes explicites dans les dispositions des traités qui ne contiennent aucune règle de principe à cet égard. Seul le « postulat fédéraliste » pouvait, en effet, laisser entendre que le droit communautaire primerait sur le droit local. Mais il s'agissait d'un postulat plus politique que juridique et, comme tel, susceptible de soulever autant d'espérances que de résistances. Aussi bien, n'est-ce pas sous cet angle que la Cour a traité la question. Elle ne part pas d'un postulat, elle administre une démonstration dont l'argumentation est si claire et la démarche si cohérente que la conclusion s'en impose à l'esprit comme une évidente nécessité.
Les faits ne sont pas explicitement relatés dans l'arrêt, il convient toutefois de les énoncer. En effet, en l'espèce, en 1962, l'Italie avait nationalisé la production et la distribution de l'électricité, et avait transféré le patrimoine des entreprises électriques à la société ENEL. En tant qu'actionnaire de la société concernée par la nationalisation, M. Costa s'était alors vu privé de ses dividendes. En signe de protestation, il refuse de payer ses factures d'électricité. Il s'adresse, ainsi, au juge de paix de Milan, le giucide conciliatore, faisant valoir que cette nationalisation était, en outre, contraire au traité de Rome.
Le giucide conciliatore de Milan saisit alors la Cour de Luxembourg par le mécanisme de la question préjudicielle, tendant, notamment, à l'éclaircissement de la portée des articles 102, 93, 53 et 37 du traité, par la voie de l'article 177.
Le gouvernement italien, quant à lui, estime toutefois que le recours est irrecevable, le juge national n'ayant pas à soucier de la contradiction des lois nationales au traité. De même, la loi de nationalisation devait être considérée supérieure, puisque postérieure au traité. Ainsi, même dans le cas ou la loi serait contraire au traité, l'affaire relève, selon lui, de la responsabilité du gouvernement italien, et non de celle d'un juge national ou communautaire.
La Cour de Justice des Communautés européennes ainsi saisie, la question qui se posait dès lors devant elle était celle de savoir si, en l'absence de précisions supplémentaires dans le traité, une norme communautaire peut être supplantée par une loi nationale ordinaire. Plus concrètement, si le droit communautaire doit dorénavant être considéré comme un ordre juridique autonome, s'imposant dès lors pleinement à toutes puissances étatiques de l'Union (...)
[...] En vertu des traités, en effet, les Etats ont créé ainsi un corps de droit applicable à leurs ressortissants et à eux mêmes De là naît le principe d'immédiateté qui entend éliminer tout intermédiaire entre le droit communautaire et les particuliers. Les droits qu'ils peuvent invoquer ne passent donc plus par le truchement des Etats membres. De plus, la Cour établie clairement dès le début de l'arrêt que lorsqu'elle statue sur la question préjudicielle, elle ne dispose que d'une compétence limitée. [...]
[...] L'auto-consécration d'un principe: la primauté du droit communautaire sur le droit national. Dans un premier temps de son raisonnement, la Cour reconnaît le droit communautaire comme un ordre juridique propre et autonome, vis-à-vis notamment des droits nationaux, mais aussi du droit international En découle donc le principe de la primauté du droit communautaire sur les autres; principe relevant, en réalité, d'une exigence logique au regard des objectifs de la Communauté La reconnaissance du droit communautaire comme un ordre juridique propre et autonome. [...]
[...] Seul le postulat fédéraliste pouvait, en effet, laisser entendre que le droit communautaire primerait sur le droit local. Mais il s'agissait d'un postulat plus politique que juridique et, comme tel, susceptible de soulever autant d'espérances que de résistances. Aussi bien, n'est-ce pas sous cet angle que la Cour a traité la question. Elle ne part pas d'un postulat, elle administre une démonstration dont l'argumentation est si claire et la démarche si cohérente que la conclusion s'en impose à l'esprit comme une évidente nécessité. [...]
[...] Le contraire aurait privé l'ordonnancement juridique communautaire lui- même de sa raison d'être. La primauté concerne tant les normes du traité fondateur, que les normes de toute source primaire du droit de l'Union européenne. Cependant, en l'espèce, c'est, plus précisément, la suprématie d'une loi postérieure au traité que le gouvernement Italien faisait valoir. A cela, la Cour répond: Cette intégration au droit de chaque pays membre de dispositions ( ) ont pour corollaire l'impossibilité pour les Etats de faire prévaloir, contre un ordre juridique accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure unilatérale ultérieure qui ne saurait ainsi lui être opposable Le principe de primauté, ainsi décrit, ne peut donc pas être limitée dans sa portée. [...]
[...] Mais, in fine, cette incroyable primauté du droit communautaire, afin d'être pleinement affirmée, n'Est elle pas un pas vers le fédéralisme II- Les conséquences du principe: l'immédiateté de l'application du droit Communautaire entraînant une philosophie anti-étatiste La conséquence première du principe de primauté du droit communautaire est directement exprimée par la Cour, soit l'effet direct du droit communautaire Cette immédiateté d'application lui confère donc, in concreto, une primauté absolue. Primauté qui empiète largement sur les droits nationaux, limitant ainsi largement la souveraineté étatique L'effet direct du droit communautaire: une primauté absolue. La Cour exprime pleinement, en l'espèce, la primauté du droit communautaire, à travers l'effet direct des normes communautaire. Cette primauté ne tolère d'ailleurs aucune exception. Affirmée dans le prolongement de l'applicabilité directe, la primauté en apparaît comme le complément nécessaire au plan national. [...]
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