Cet article est tiré du numéro 47 de 1997 de la Revue française de science politique. Les travaux de l'auteur, Bastien François, portent sur l'histoire et la sociologie des institutions politiques ainsi que sur les rapports entre le droit et la politique. Il part ici du constat que le Conseil constitutionnel et le contrôle de constitutionnalité font l'objet de nombreux travaux depuis une vingtaine d'années. Il s'agit donc de faire dans une première partie le bilan des études menées par les constitutionnalistes (I) dans le but d'aborder dans les trois parties suivantes des questions actuelles autour du débat sur le contrôle de constitutionnalité :
1. Comment expliquer l'aggiornamento du Conseil constitutionnel ? (II)
2. A-t-il modifié le régime de la Cinquième République ? (II)
3. Assiste-t-on à une « constitutionnalisation » de la vie politique ? (IV)...
[...] Ainsi, Bastien François, en tentant de répondre aux questions qu'il pose, apporte plus encore de questions que n'apporte de réponse stricte et orientée. C'est en cela que cet article est avant tout une mise au point sur un débat, une question d'actualité. Concrètement cela aboutit donc à un travail d'analyse d'études précédentes et de mise en perspective des questions structurant le débat autour du contrôle de constitutionnalité. Cet article incite donc avant tout à poursuivre les analyses sur la question plutôt qu'à vouloir apporter sa propre pierre à l'édifice. [...]
[...] Conclusion et approche critique Cet article, en partant des travaux effectués par les constitutionnalistes sur le contrôle de constitutionnalité et qui mettent l'accent du les transformations du droit constitutionnel, cherche à montrer en quoi le développement du contrôle de constitutionnalité au cours des années 1970 a transformé le régime de 1958. Bastien François explique que la métamorphose du droit constitutionnel est bien réelle, mais qu'on ne peut en inférer automatiquement une transformation parallèle de la nature constitutionnelle du régime de la Cinquième République. Mais, on l'a vu, la nouvelle place reconnue au Conseil constitutionnel a eu des conséquences sur la scène parlementaire et sur les modes de légitimation de la compétition politique. [...]
[...] L'orientation de ces travaux pèse sur les débats actuels et certaines questions sont privilégiées au détriment d'autres. Ainsi les analyses dominantes aujourd'hui insistent sur la technique juridique tandis qu'une analyse plus politique des phénomènes institutionnels est abandonnée. Des zones d'ombres se multiplient, comme la question majeure du processus explicatif de la montée en puissance du Conseil constitutionnel depuis la fin des années 1970. Cela s'explique par une double censure conséquence de la juridicisation de l'analyse, qui conduit à étudier le droit en dehors du contexte social et à prendre la parole des juristes pour argent comptant sans s'interroger sur leur travail. [...]
[...] Assiste-t-on à une constitutionnalisation de la vie politique ? Le Conseil constitutionnel et le droit constitutionnel A l'heure actuelle, les constitutionnalistes estiment que le Conseil constitutionnel est bien une juridiction (alors que la nature juridictionnelle du Conseil constitutionnel a été longtemps discutée), ce qui justifie les orientations prises par les travaux menés sur la question. Trois orientations sont privilégiées par ces travaux : L'analyse du contenu du bloc de constitutionnalité (ensemble des textes ou des principes auquel le Conseil constitutionnel reconnaît une valeur constitutionnelle) L'analyse des techniques contentieuses utilisées par le Conseil constitutionnel (c'est-à-dire des modes d'interprétation de la loi soumise au contrôle) L'étude des conséquences juridiques du développement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel : avec le changement de description du Conseil constitutionnel dans les années 1980 juridiction chargée de la protection des libertés publiques et des droits fondamentaux des citoyens alors qu'il était considéré dans les années 1960 comme un organe régulateur de l'activité normative des pouvoirs publics les conceptions du contrôle de constitutionnalité se sont transformées : il peut désormais concerner des individus ordinaires C'est sur cette base que les constitutionnalistes effectuent, dans un second temps (fin des années 1980), des travaux sur la constitutionnalisation du droit (c'est-à-dire l'invasion du droit constitutionnel dans les autres branches du droit) résultant de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (avec l'élargissement du bloc de constitutionalité et de la saisine dans les années 1970) qui cherchent à accroître la légitimité juridique du droit constitutionnel en démontrant son effectivité pratique au delà de la scène politique, en concernant des individus ordinaires, car intervenant pour toutes les activités sociales juridiquement réglées. [...]
[...] juridicisation du processus législatif (il s'agit de la production par le Conseil d'interprétations de la Constitution et de la réception de ces interprétations par le législateur, qui agit alors comme un juge en interprétant la constitutionnalité des textes législatifs en cours d'élaboration). Ce modèle vise à montrer comment 1 peut produire 2 par l'interdépendance du législateur et du Conseil constitutionnel. Malgré les limites de ce modèle, son principal avantage est de ne pas faire d'hypothèses sur les raisons poussant des hommes politiques à développer des arguments constitutionnels et à s'appuyer sur la jurisprudence du Conseil. Il n'y aurait donc pas de primat de la raison juridique sur la stratégie politique comme explication de la constitutionnalisation de la vie politique. [...]
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